Peu nombreux il y a quelques temps, au point de passer inaperçus, les Subsahariens ont investi, ces derniers jours, toutes les ruelles de la ville d’Aïn El Hammam. Un contingent de plus de quinze personnes est, même, arrivé mardi dernier, «renforcer» ceux déjà en place depuis plusieurs mois, dit un habitant du centre-ville. Ils viennent de prendre possession de la petite placette, située entre le siège de la SDC et celui des travaux publics. Pendant que les mamans s’affairaient à attacher sur leur dos leurs petits derniers, les autres enfants, à moitié nus, trainaient dans la poussière et les détritus. Visiblement affamé, un petit garçon, frêle comme tous les membres de la communauté qui doivent souffrir de faim, grattait le fond d’un sceau en matière plastique pour retirer des restes de nourriture. Dans un coin, un homme essayait de fixer un bout de carton à un arbre, pour s’abriter du soleil, alors que les autres préparaient les petits qui doivent les accompagner pour arpenter les rues, afin d’amadouer les bienfaiteurs qui ne peuvent supporter de voir de tels anges traîner, sous le soleil, d’un trottoir à l’autre. Les membres d’un autre groupe, assis à même le sol, avaient «passé la nuit sur le trottoir, sous un arbre», ajoute notre interlocuteur. Ils ne semblaient pas dérangés par les passants. Ils continuaient à discuter sans se soucier de la chaleur du soleil qui dardait ses rayons sur leur progéniture. Un autre homme arrive en boitant avec un minuscule bébé dans les bras, qui paraissait mal en point. Il ne cessait de l’embrasser. Brusquement, comme s’ils s’étaient donné le mot, ils prennent la route, chacun vers son lieu de «travail». Ils y resteront toute la journée. Chassés certainement des grandes villes, ils sont de plus en plus nombreux à venir s’installer à Michelet. «Personne ne se préoccupe, par humanisme, du devenir de ces mioches innocents qui servent d’appât pour quelques dinars», s’insurge une ménagère de la région. S’ils sont habitués à la chaleur du soleil, ils ne pourront pas vivre dehors, lors de la saison hivernale. «Les autorités ne peuvent pas intervenir, car ces réfugiés ne sont pas venus ici officiellement», rétorque un militant politique. «Malgré tout, les associations, le CRA et autres devraient faire l’effort de leur assurer au moins une tente, en attendant de les prendre en charge convenablement ou de les renvoyer», ajoute la même ménagère. Et de conclure : «Que dirions-nous, si jamais, un bébé ou même un adulte perd la vie en pleine rue, faute de couverture sanitaire, ou de faim ? Notre fierté de peuple hospitalier en prendra un sacré coup».
A. O. T.
