L’ombre de Kaci Iboudrarene plane toujours sur l’ex-Michelet

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Le portrait de l’incomparable joueur de tambour, le défunt Kaci Iboudrarene, trône depuis longtemps au centre-ville de l’ex-Michelet, comme pour rappeler les interminables séances de danse au rythme du T’bel de celui qui est considéré comme le plus grand, même par ses pairs. Le café d’en face, où il était le premier à se produire, demeure le lieu de rencontre des troupes de musiciens et des citoyens qui louent leurs services. On se rappelle avec nostalgie Messaoud, M’Barek et tous les anciens de la génération de Da Kaci. La nouvelle génération reprend le flambeau et s’évertue à imiter les anciens. Les jeunes rivalisent d’ardeur, rêvant d’imiter celui pour qui une chanson «eweth a Da Kaci weth» a été dédiée, déjà de son vivant. Comme chaque matin depuis plus d’un mois, la ville d’Aïn El-Hammam connaît une animation peu commune. Devant «L’Qahwa idhebalen», le café des tambourineurs, situé à la place du centre, les attroupements de villageois renseignent qu’une troupe de «T’bel» s’apprête à «sortir». La fête commence sur place avec des danses pendant une dizaine de minutes, avant que le cortège ne s’ébranle. Avant, il faut que les danseurs soient rassasiés. Le rituel se répète chaque matin, en cette période, quatre, cinq fois de suite, voire plus. Le son du tambour emplira le village, et les pistes de danse ne désempliront pas d’hommes et de femmes, durant deux jours, jusque tard dans la nuit. D’une colline à l’autre, le DJ et les troupes folkloriques se répandent en écho, faisant de la région une grande salle de spectacle à ciel ouvert. Il est difficile d’imaginer, ces derniers temps, une fête de mariage ou de circoncision «dans la stricte intimité» familiale. Rares sont les mariages qui se déroulent «sans tambour ni trompette». Dj ou t’bel, parfois les deux à la fois, égaient les soirées des villages, jusqu’à l’aube. Les traditionnels «ourar» des femmes, connus dans les villages d’Aïn El-Hammam, sont détrônés par le disc-jockey, à la mode. Il est, en effet, de plus en plus rare de voir une vieille femme tenir un «abendayer» qu’on préparait autrefois des mois à l’avance pour égayer la fête. Maintenant, cela arrive accessoirement en période creuse, avant l’arrivée des musiciens, ont la plupart des familles ne peuvent se passer. L’idée d’en mettre plein la vue aux villageois qui doivent «se souvenir de notre fête», comme ils disent, est ancrée dans les esprits depuis longtemps. «Qu’importent les dépenses alors !», argue-t-on. Les soirées dansantes se suivent alors pendant tout l’été, au grand plaisir de tout le village.

A. O. T.

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