L’association culturelle Chahid Yakoubi Ferhat et le comité de village Houra, en collaboration avec l’APW, la direction de la culture, du tourisme et de l’artisanat, organisent la 4e édition du Festival du burnous.
La coup d’envoi s’est déroulé en présence d’invités d’honneur, à l’image d’Ali Fergani, ex-international algérien et star de la JSK, Bachi du MCA, Noureddine Saâdi et Gueroudj, le P/APW, des directeurs de wilaya de Tizi-Ouzou (culture, environnement, tourisme et artisanat) et de nombreux élus locaux et nationaux. Après l’accueil des invités par des chants de lekhouane, le cordon tricolore fut coupé. On procéda, par la suite, à la visite des stands et des expositions, répartis sur trois sites, à savoir Houra Bwada, Ath Sidi Saïd et Ath Varkath, où se trouve le siège de Tajmaât. À travers la visite des multiples stands, l’on pouvait voir une exposition des différents burnous, tissés avec les doigts habiles et raffinés des femmes kabyles de Houra. Le métier à tisser est également exposé aux visiteurs. La robe et le bijou kabyles occupent, aussi, une place de choix. La sculpture sur bois et sur roche, des objets d’art, de la vannerie, de la poterie, des plantes de décoration, des objets en bronze, des outils agricoles anciens, des tableaux de peinture, des ustensiles anciens, les anciens billets de banque, le tapis n’Ath Hichem et le livre, avec l’incontournable poète Ahcène Mariche, ont occupé les espaces des trois sites. La maison ancienne kabyle, avec la soupente, l’écurie traditionnelle (Adaynine), les ikouffanes (silos où sont emmagasinés les graines, les figues sèches et les produits alimentaires), le métier à tisser, le kanoun, est bien préservée dans ce village, témoignant d’un riche patrimoine culturel. À rappeler que plus d’une quarantaine d’exposants a été au rendez-vous. Quant au stand destiné au burnous, l’habit fêté, il n’y avait qu’un seul, en sus d’un unique métier à tisser.
Plusieurs activités au programme
À l’école primaire Omar Yakoubi, où est installée la scène, on lèvera d’abord les couleurs sous l’entonnement de l’hymne national. La chorale du village entame un récital des plus sublimes et comment ?! Puisqu’il s’agit de la chanson de Dda Cherif Kheddam, intitulée ‘’A Lzzayer ncallah ad tehlud’’. Les présidents du comité, de l’association et de l’APC ont, à tour de rôle, monté sur scène, pour les souhaits et les remerciements d’usage. Le président de l’APW, Dr Msela, soulignant l’importance et la valeur de ce festival et l’apport de son assemblée à l’organisation de cette manifestation, invitera Fergani Ali à s’impliquer «pour sauver la JSK du naufrage auquel elle fait face depuis de nombreuses années». Avec modestie et simplicité, Fergani, s’expliquant, répondra : «Je dois d’abord remercier les organisateurs d’avoir pensé à nous, car, dans le passé, on ne venait au village qu’à l’occasion des décès. Assister à ce genre de manifestations culturelles et artisanales est un devoir. C’est une occasion de nous ressourcer, de revoir la terre qui nous a vus naître et de partager la joie des habitants. Pour ce qui est de la JSK, je dirai que sa situation est regrettable. Peut-être qu’il y a un changement et peut-être qu’un grand investisseur la prendra en main. En tout cas, si on me fait appel, je répondrai présent, à condition que le départ de Hannachi soit confirmé». Nabila Goumeziane, directrice de la culture, Rachid Ghedouchi, directeur du tourisme, la directrice de l’environnement, Hadadou Fouzia, Nordine Saâdi et même l’illustre joueur du MCA Bachi ont tous pris, successivement, la parole, pour remercier et encourager les organisateurs. Le coup d’envoi officiel a été donné par l’emblématique joueur de la JSK et de l’équipe nationale Ali Fergani. L’ensemble des présents ont été ensuite invités à partager un repas traditionnel. À signaler que le festival se poursuivra jusqu’aujourd’hui avec plein d’activités, à savoir la remise des prix pour les lauréats des examens, une caravane berbère et une balade avec le burnous. De la magie, un monologue et plusieurs projections sont également prévus. Hier vendredi, une conférence-débat sur le thème, du théâtre, des exhibitions sportives étaient également au menu. Le gala de clôture, prévu aujourd’hui samedi, a été annulé pour cause de décès d’un jeune du village.
Houra, un beau village de Kabylie
Houra est un beau village de Kabylie, situé au versant-Est de la montagne du Djurdjura. Un patelin relevant de la commune de Bouzeguène, distant de 70 kilomètres du chef-lieu de la wilaya. Le village compte environ 7 000 habitants. Perché à 800 mètres d’altitude, il représente le quart de la population de la daïra de Bouzeguène et s’étend sur une superficie de 20 hectares. A l’époque coloniale, cette bourgade s’appelait ‘’Haoura’’. Sa population est plutôt paysanne et s’est donc sédentarisée au pied du Djurdjura, à l’endroit de l’antique village «Aguemoun», dont les vestiges sont visibles à ce jour. Cet endroit a été choisi par la population ancienne de par sa proximité de sources d’eau, la disponibilité du bois de chauffage et des aires de pâturage pour leur bétail. C’est ainsi que des espaces forestiers ont été défrichés par les paysans, pour des besoins agricoles. L’olivier, le figuier et la vigne sont les plantations privilégiées des villageois. La gestion du village est assurée par un conseil de sages (Tajmaât), un système de gouvernance démocratique propre à la Kabylie. Le conseil des sages est toujours un organe délibérant, de consultation, d’orientation et de règlement des conflits. À voir le nombre de projets réalisés par les habitants et la propreté qui caractérise les lieux, on comprend vite que tajmaât tient bien les rênes. Ce village, qui, justement, participe au concours Aïssat Rabah du village le plus propre, a réalisé plusieurs opérations pour figurer sur le podium.
Derrière chaque burnous, une femme
Le burnous, une longue cape avec un capuchon pointu, plus souvent de couleur blanche, est et restera un symbole de paix, de pureté et d’honneur. Ce vêtement traditionnel et emblématique, porté uniquement par les hommes, est l’œuvre des femmes kabyles. Par ici à Houra, on dit «derrière chaque burnous, il y a une ou plusieurs femmes». Le burnous de l’honneur est réalisé uniquement à base de laine de mouton ou de brebis. Ce sont les braves femmes kabyles qui, habilement et finement, le tissent. Pour faire un burnous, il faut au moins trois toisons et sa confection dure environ un mois. La laine, avant de devenir fil à tisser, est triée pour être débarrassée des impuretés, lavées à la rivière, puis séchée, démêlée, cardée et ensuite filée. Ce n’est qu’à ce moment-là que le tissage peut commencer. Le burnous est porté toute l’année, car même en saison des chaleurs, il y a un burnous plus léger. La personne qui porte un burnous doit faire preuve de maturité et de sobriété et ne doit en aucun cas l’égarer, car il s’agit tout bonnement d’une question d’honneur. À tajmaât ou à la mosquée, les hommes arboraient fièrement cet habit, faisant partie de l’identité berbère, puisqu’il symbolise la virilité. Il se porte de plusieurs manières : ramassé sur une seule épaule, disposé sur les épaules avec le capuchon sur le côté pour faire usage de poche,… En revanche, quand l’homme rabat le capuchon sur son visage, c’est un signe de honte et de déshonneur. De nos jours, le burnous est de moins en moins porté et confectionné. Les produits venant du monde entier ont entraîné des changements dans la façon de se vêtir des Kabyles, en particulier, et des Algériens en général. Cependant, à Houra, il est toujours confectionné, à la manière traditionnelle, et occupe même une place de choix parmi les villageois. «Chez nous, nous avons encore une vingtaine de femmes qui continue de tisser les burnous. La matière première existe, mais nous n’avons point de maison de tissage. Cette infrastructure nous est indispensable, pour pérenniser cet art ancestral et le promouvoir. Nous appelons les responsables compétents pour inscrire un projet dans ce sens… C’est pour la bonne cause», appellera, de tous ses vœux, le président de l’association. Enfin, concernant le prix de cet habit, «il oscille entre 25 000 et 50 000 DA, suivant la qualité et les mensurations», informe un des organisateurs.
Reportage de Hocine T

