Par S. Ait Hamouda
Ne faisons pas le parallèle facile avec l’«Éloge de la folie» d’Érasme de Rotterdam, mais soyons Algériens et pensons ainsi. N’est-ce pas que nous autres avons tous un grain de folie en nous-mêmes? Il y a ceux qui dilapident le sable, à n’en plus finir, jusqu’à polluer les rivières où ne coule plus une seule goutte d’eau. Il y a ceux qui braconnent la faune, que la chasse soit ouverte ou pas, jusqu’à mettre le pays, tout le pays, en état de déséquilibre écologique, en noyant la diversité dans un univers dépourvu de ses oiseaux, animaux, insectes, reptiles… Et pourtant, notre pays était, il y a peu de temps, richement doté des espèces animales, végétales et minérales. Nous sommes un peu fous et nous l’assumons magistralement et publiquement. Nous sommes un peu artistes dans notre genre. Qu’à cela ne tienne, notre folie est même géniale. Elle nous inspire les idées les plus folles et nous oriente vers le pire, sans nous précipiter, outre mesure, dans le précipice du malheur. Nous inventons des légendes à dormir debout, auxquelles nous finissions par croire au point d’en avoir foi jusqu’à la démence. Ceux qui peinent encore à croire en notre qualité de zinzins indécrottables sont plus dingues. Nous avons les plus brillants résultats avec la notre, par exemple : interdire les belles plages de notre pays aux femmes en tenue appropriée. C’est que le sexe dit faible nous dérange par son existence même. Si nous permettons aux femmes d’être, c’est que nous n’avons pas trouvé le moyen de procréer par nous-mêmes. Si nous observons, profil bas, leur façon de vivre, c’est que nous n’avons pas dégoté encore une manière de leur imposer notre diktat unilatéral et imparable. Mais nous arrivons quand même à leur imposer une tenue étrangère qui sied, cependant, à notre misogynie irascible. Cela va avec le minimum acceptable, nonobstant les règles demeurées intransgressibles pour le siècle des siècles. Réveillez-vous de votre sommeil et criez au monde votre rage de vivre et jetez aux orties votre folie !
S. A. H.