La colère de Mustapha Limani

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«Je reste convaincu qu’on n’aurait pas dû affecter ces terrains tant que la zone n’avait pas été viabilisée !»

En visite d’inspection à la zone industrielle d’Oued El Berdi, le wali de Bouira fut désagréablement surpris et remonté après s’être aperçu que l’extension de la zone industrielle de Sidi Khaled, dans la commune d’Oued El Berdi, se débat dans un bourbier administratif , mais aussi dans un bourbier au sens propre du terme, en l’absence d’aménagement sur le terrain. A noter que la nouvelle zone industrielle en question s’étend sur une superficie de 189 hectares, répartie en 218 lots, dont 153 ont été affectés à une quarantaine d’investisseurs. C’est ce qui ressort, en gros, de la présentation de Mme Amrous Safia, directrice de l’investissement de la wilaya de Bouira. Sur ces lots, 65 sont libres, dont 25 sont touchés par les servitudes du gaz HP et des conduites d’AEP. Des travaux d’aménagement devaient être entamés sur le site par l’Agence nationale d’intermédiation et de régulation foncière (ANIREF), dont le directeur régional, M. Boughazi, a tenté d’expliquer au wali les raisons du retard enregistré. Ainsi, celui-ci reconnaîtra, qu’à l’origine, une conduite de gaz existe et alimente la ville d’Oued El Berdi, ainsi que deux conduites d’eau. Des conduites fonctionnelles qui existaient même lorsque le choix de terrain a été fait. Mener des travaux d’aménagement sur le site peut, donc, les endommager. Le wali demandera si elles peuvent être déplacées, ce à quoi le responsable de l’ANIREF répondra par l’affirmative. La directrice de l’industrie indiquera, elle, qu’il est impossible d’affecter les lots de terrain encore disponibles. Le directeur de l’énergie et des mines (DEM) de Bouira, M. Guemini Lazhar, expliquera au wali que ses services avaient alerté, en temps réel, de l’imbroglio dans lequel se trouve cette zone : «Pour le gaz, une étude a été réalisée et un site a été choisi pour le poste de détente, car actuellement le poste existant alimente la ville d’Oued El Berdi, mais est destiné uniquement à la consommation domestique. Il ne suffit pas pour alimenter la zone… Nous avons, alors, préconisé le renforcement du poste existant et son déplacement. Pour ce faire, une enveloppe de 10 milliards de centimes est nécessaire. Mais cette enveloppe, une estimation faite par le GRTG, demeure inexistante. Nous avons fait un rapport au ministre de l’Énergie concernant le gaz. Quant au renforcement et le déplacement du poste de détente, nous attendons toujours cette enveloppe pour concrétiser l’opération. Pour l’électricité, le poste est en cours de réalisation. Il subvient, cependant, aux besoins d’une seule partie de la zone seulement. Le problème actuellement, c’est que ce poste n’est pas encore achevé, car la SDE a un problème de financement. Aussi, on ne peut pas alimenter la zone, car elle n’est pas encore aménagée. Il faut, donc, qu’elle soit alimentée en souterrain», expliquera M. Guemini.

«J’ai l’impression qu’on a mis la charrue avant les bœufs…»

Devant une telle situation, Mustafa Limani lance : «J’ai l’impression qu’on a mis la charrue avant les bœufs ! Il ne fallait pas du tout attribuer ces lots, car maintenant les investisseurs sont là. Ils ont engagé de gros moyens financiers, pour réaliser leurs usines et ils se retrouvent sans gaz, ni électricité». La directrice de l’Industrie dressera, elle, un tableau de la situation des investisseurs en activité, au nombre de 14, ainsi que le taux d’avancement des autres projets du «parc industriel», réparti en zooning, c’est-à-dire chaque activité est regroupée selon la nature du projet. Ainsi, les activités à fortes nuisances sont rassemblées dans une zone qui leur est destinée, «selon leur degré de nuisances et suivant une étude menée dans ce sens», indique la directrice de l’Industrie. Au niveau de l’ancienne zone industrielle de Sidi Khaled, un topo sera également présenté au wali. Créée en 1979 par arrêté du ministère de l’Habitat, cette zone, dont le démarrage remonte à 1996, s’étale sur une superficie de 225 hectares, dont une superficie cessible de 202 hectares avec 105 lots créés, attribués et affectés dans leur totalité au profit de 85 investisseurs. On apprendra que 24 projets sont opérationnels, 37 en cours de réalisation, 7 en cours de lancement, 6 à l’arrêt, et 11 en cours d’annulation, faute de mise en chantier. «Nous avons adressé 10 mises en demeure à l’adresse des investisseurs défaillants», indique Mme Amrous. Il sera détaillé que, pour la viabilisation de la zone, plusieurs tranches ont déjà été allouées avec, en 2002, des aménagements partiels, ainsi qu’en 2004.

Manque d’eau, de gaz, d’assainissement, oppositions de particuliers,… ces blocages qui contrarient l’investissement

Par contre, pour la tranche de 2007, elle n’a pas été réalisée à cause d’oppositions de propriétaires terriens. En 2015, une autre tranche a été allouée et un avis d’appel d’offres national a été lancé par le ministère de l’Industrie, mais demeure actuellement gelé. Le wali s’inquiétera ensuite des doléances des investisseurs se trouvant sur le site en exploitation : «Nous avons pu régler quelques problèmes de manière provisoire, comme le raccordement à l’électricité et au gaz», indique la directrice de l’industrie. Mais une liste est en attente pour bénéficier de l’énergie et de l’eau. «Ce sont plus de 8 000 emplois qui seront garantis une fois l’ensemble des projets de cette zone réalisés», fera-t-on savoir au wali. D’autres problèmes d’assainissement ont été soulevés à cause de la situation géographique des terrains, situés en hauteur. Qui a réalisé l’étude initiale ? demande le wali qui se verra répondre que c’est l’URBAB de Blida. «On ne peut pas rentrer en activité tant qu’une route, devant traverser, le site n’est pas réalisée», se plaint un investisseur. Le wali sera, par la suite, littéralement submergé par des demandes d’investisseurs sollicitant qui de l’eau, qui une extension, qui de l’énergie et d’autres des lots de terrains pour implanter leurs projets. A la fin de cette inspection de travail, M. Limani visitera une usine de peinture décrite comme «un modèle de réussite». L’investisseur en profitera pour expliquer au wali que, pour son projet, il avait demandé cinq hectares, mais seulement 7000 m2 lui ont été attribués. «Un frein» pour son activité qui nécessite des zones d’entreposage, pour éviter, entre autres, d’éventuels dangers, les incendies notamment, qui peuvent détruire sa production : «Pour la peinture, nous avons des produits dangereux qui nécessitent d’être stockés dans des endroits séparés de l’unité de production», fait savoir M. Naïli, gérant de cette usine. Après avoir pris connaissance de l’ensemble des doléances soulevées, le wali promettra la tenue prochaine d’une réunion avec les investisseurs, pour voir quelles sont les priorités à engager.

Hafidh Bessaoudi

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