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«Nous nous sentions tout petits devant Mammeri !»

Une rencontre littéraire avec l’écrivain Rachid Boudjedra eut lieu, dans la matinée du samedi dernier, à la bibliothèque principale de la lecture publique de Tizi-Ouzou.

L’auteur s’est déplacé à Tizi-Ouzou, à l’occasion de la 10ème édition du Salon Djurdjura du livre, pour parler de Mouloud Mammeri. «Parler des œuvres de Mouloud Mammeri, cela demande beaucoup de temps. Ce sont des œuvres qui ont dépassé les frontières algériennes». Pour rappel, Boudjedra a connu Mouloud Mammeri très jeune. «Je l’ai connu pour la 1ère fois en 1965 à la sortie de son premier recueil, «Pour ne plus rêver». Nous étions les amis de Jean Sénac. Nous avions décidé de créer l’Union des écrivains algériens et Mouloud Mammeri en était le premier président et Jean Sénac le vice-président». Pour montrer la grandeur de Mouloud Mammeri, il dit : «Nous nous sentions tout petits devant lui. L’Union des écrivains algériens n’a pas duré longtemps, étant donné les interférences du FLN qui voulait s’en accaparer, pour en faire un outil de propagande. Des luttes internes ont surgi entre la gauche et la droite et l’Union des écrivains n’a pas survécu longtemps. Mouloud Mammeri démissionna et c’était la rupture». Parlant de son premier recueil, l’auteur confie que Mouloud Mammeri l’avait félicité, ce qui lui avait permis de se tracer une voie dans l’écriture. À la question du combat de Mouloud Mammeri, qui n’a pas abouti selon certains, le conférencier répond : «Il faut faire la part des choses. Je sais que son combat pour l’amazighité et la langue maternelle a abouti à certains résultats dans la revendication de la langue amazighe, qui a désormais un statut de langue nationale et officielle. Cela n’est pas suffisant certes, mais il faut y aller de l’avant. Il reste beaucoup à faire». Boudjedra aborde, par la suite, son penchant pour la peinture. «Je m’exprime par le pinceau et la couleur, la joie et la douleur d’autrui, notamment de la femme», l’artiste affirme, en évoquant une autre œuvre qu’il a écrite, s’intitulant «Journal d’une femme insomniaque». Rachid Boudjedra n’a pas omis de citer le «Printemps Arabe», en disant que «c’est un échec total». «Des morts et des destructions pour rien. Des éléments, qui en étaient la cause de ces soulèvements populaires, sont parmi les gouvernements actuels!», affirme-t-il. Quant à l’état de la littérature mondial, il nous dit : «Il faut distinguer la littérature du Nord et la littérature du Sud, dont je suis attiré». «La littérature mondiale est en tain de se dégrader», regrette-t-il. Selon lui, 60 % des livres sont publiés par des femmes en France. Il encourage, ainsi, cette initiative à l’échelle nationale et affirme que «la femme est l’avenir de l’homme». À la fin de cette rencontre, pleine d’enseignements, Rachid Boudjedra procède à la vente-dédicace de ses ouvrages, notamment «Les figuiers de barbarie», «La dépossession», «Les contrebandiers de l’histoire» (Pamphlet) et «Journal d’une femme insomniaque».

M. A. Tadjer

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