Cherif Kheddam ou la voix ensorcelante…

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S. Ait Hamouda

Dire l’artiste en texte aussi court ou aussi long est une démarche fabuleuse, voire compliquée. Surtout lorsqu’il s’agit de celui qui fut l’un des plus inspiré, en l’occurrence Cherif Kheddam. Il forma des artistes à son image, et fit de la musique (sa musique) un moyen de survie et d’existence pour les Kabyles des montagnes ou pour l’émigré. On ne dort pas sans l’écouter. Et on ne peut l’entendre qu’au coin du feu, sa voix est certes ingrate mais juste, il en a fait l’instrument idoine pour la domestiquer, la rendre malléable, il l’a sertie comme un joaillier de Ath Yenni qui fabrique un bijou avec amour, comme un potier ou potière face à une pièce qu’ils veulent la meilleure possible, ou comme un paysan laboure, bêche, tourne et retourne sa terre pour la faire fructifier. Il est décédé le 23 janvier 2012 et inhumé le 27 janvier 2012 au village Boumessaoud qui l’a vu naitre le 1er janvier 1927, léguant à toutes les générations un pur produit de ses tripes, de sa sensibilité inégalée. Cherif Kheddam a puisé à toutes les sources de musique universelle dont il a irrigué ses morceaux. Il a chanté l’Algérie comme personne, Bgayet, et tant d’autres de sa voix inégalée. Surtout «Sligh I Yemma thenna» une thèse de sociologie, pour ainsi dire, de l’époque coloniale. Un texte fort de ses métaphores, de ses allégories, mais direct, clair et net et ne s’embarrassant pas de descriptions aussi réelles que fantastiques de la scène : Nessa aguerthil di lqa3a (…) udan ugin adekfun…Qui est-ce qui peut remplacer Cherif Kheddam aujourd’hui ? Personne, parce qu’il est irremplaçable mais sa leçon mérite d’être retenue car il s’est sacrifié en partageant son temps entre des boulots de fortune, qu’il a été obligé de pratiquer, il faut reconnaitre qu’il n’était pas fortuné, et la musique. Il faut beaucoup de sacrifice pour concilier l’un, peintre-ouvrier dans une fonderie et l’autre musicien qui suivait un chemin pour sa formation magistrale en musique. Bien sûr, il faut pour ce faire, du cran, du courage, de la patience et beaucoup de volonté…

S. A. H.

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