La salle du presbytère était trop petite pour contenir le nombre important de présents. L’assistance était constituée essentiellement d’universitaires, comme Idir Zaïd vice-recteur, Imarazène chef du département de tamazight, Nora Tigziri doyenne de la fac des lettres… Dans la matinée de jeudi, il a été procédé à l’inauguration officielle du centre de rencontre et de documentation (bibliothèque) en présence de l’ambassadeur de la France à Alger, de Rabah Kahlouche recteur de l’université Mouloud-Mammeri, Améziane Medjkouh président de la Chambre du commerce du Djurdjura et le maire de Tizi. L’assistance a été agréablement surprise de découvrir des centaines de livres réalisés par les Pères blancs sur une période de près de cent ans.On y trouve des documents sur les coutumes de la région, comme le mariage en Kabylie, sur la géographie, sur l’histoire des villages sans oublier le célèbre fichier périodique berbère. Ce document était confectionné régulièrement de 1946 à 1972 et il a compté plus de 350 numéros. On y trouve de précieuses informations au plan ethnographique, contes, coutumes au plan linguistique de la Grande Kabylie, du M’zab, de Ouargla et de Ghadamès. L’instigateur de ces fichiers fut le Père Jean-Marie Dallet qui assura la publication avec près d’une centaine de contributions. Le Père Dallet est né en 1902 en Auvergne. Sa première nomination en 1934 fut en Kabylie. Il y passa presque toute sa vie. Doué pour les langues, après ses études d’arabe, il se passionna pour la langue kabyle dont il saisit très vite le spirantisme caractéristique des parlers kabyles. Avec le P. Jacques Lalfry, dès 1935 ils se lancèrent dans l’établissement d’une lexicographie avec précision phonétique. Le Père Dallet est aussi l’auteur de “L’initiation à la langue berbère” avec Louis de Vincennes, “Le verbe kabyle”. Son livre le plus important est : “Le Dictionnaire kabyle-français et français-kabyle” que sa mort imprévue en 1972 ne lui permit pas de terminer.Dans l’après-midi, Mgr Henri Teissier a donné une communication ayant pour thème “Culture, foi et dialogue”. L’orateur a affirmé que la Kabylie est un pays de cœur et rappelé que la foi est identique dans toutes les religions.Il a indiqué que la culture religieuse possède ses spécificités. “La foi est profonde et traverse les différences culturelles. La foi est un mouvement intérieur, un don de Dieu avant d’être un acte de l’homme. La foi s’exprime dans une culture et engage le croyant dans sa destinée ultime”, a déclaré Mgr Teissier. Il a indiqué que pendant longtemps, les sociétés étaient enfermées dans leurs cultures religieuses, mais depuis cinquante ans, il y a eu une prise de conscience inter-religieuse. Et d’ajouter que le dialogue entre religions ne doit pas être abstrait, il faut transformer les relations entres les croyants.Mgr Teissier a souligné que quand les Pères et les Sœurs sont arrivés en Kabylie ils ont compris la spécificité culturelle de cette région. “Des relations étroites liaient les Pères et les Sœurs à la population. Les Pères vouaient un respect pour la culture de cette région. Si la confiance existait, il y a un siècle entre la population de la région et les Pères et Sœurs c’est parce que ces derniers ont respecté la foi de la population. Ils étaient conscients que la population avait sa culture et sa religion propres”, a enchaîné l’intervenant. Les Pères et Sœurs intervenaient dans la vie quotidienne, dans les services de l’éducation, la santé, la formation et la culture.Aujourd’hui, il faut chercher les voies du dialogue inter-religieux. Pour Mgr Teissier “le signe d’ouverture inter-religieux est que la ville de Tizi Ouzou accepte cette initiative prise par la communauté chrétienne”. Avant de clore, l’archevêque a rappelé leur respect de la culture et de la foi de la population et exprimé leur motivation profonde de servir.
Aomar Mohellebi