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Les travailleurs en grève illimitée

Des dizaines de travailleurs de l’unité chinoise de l’aluminium Dauphain d’or industries, sise à Bechloul, ont entamé, hier, une grève illimitée pour dénoncer leurs conditions de travail qu’ils qualifient de «déplorables et surtout d’indignes». Les travailleurs protestataires, dont le nombre avoisine les 300 employés sur le site, évoquent des problèmes essentiellement socioprofessionnels. Ils énumèrent, entre autres, ceux liés aux salaires, aux heures supplémentaires, aux horaires, à la médecine de travail, à la couverture sociale, aux allocations familiales et aux congés de maladie. Sur le volet professionnel, les mêmes travailleurs déplorent l’absence des tenues de travail, des équipements de sécurité (casques, gants…). «Nous sommes victimes de la hogra et nous en souffrons sur tous les plans. Nous avons des problèmes de salaires et du paiement des heures supplémentaires. Pis encore, nous ne disposons pas de tenues de travail et des équipements de sécurité à même de nous protéger en cas d’accidents», confie un des grévistes rencontré à l’entrée de l’usine. Et d’ajouter : «Nous avons, à maintes reprises, soulevé tous ces problèmes et des engagements nous ont été donnés par les responsables de l’usine quant à leur prise en charge, mais il n’en est rien. Nous sommes à la deuxième année et on attend toujours la concrétisation de toutes les promesses faites.» Questionné sur ce problème de salaires, un des travailleurs indique que cela fait une année qu’il travaille à l’usine et il ne sait toujours pas combien il touche par mois : «À la fin du mois, tu te présentes à l’administration et on te remet une enveloppe et on te dit de quitter les lieux. Le mois dernier, on m’a remis une enveloppe contentant 17 000 DA en liquide», confie un des travailleurs. Ce dernier affirme n’avoir jamais reçu de fiche de paie durant les douze mois qu’il a passés à l’usine. Ces témoignages des travailleurs renseignent sur une gestion archaïque et surtout contraire à la législation du travail. Sinon, comment expliquer qu’aucune fiche de paie n’est délivrée aux salariés et qu’aucun salaire de base n’est fixé au préalable ? Pire encore, les employés déclarent ne disposer d’aucun contrat de travail les liants à l’entreprise. Selon nos interlocuteurs, une administration existe bel et bien au sein de l’usine, mais celle-ci ne fait rien. Pour les travailleurs, s’ils acceptent de telles conditions de travail en 2018, c’est qu’ils sont des pères de famille et ils n’ont pas vraiment où aller. À la question de savoir si l’inspection de travail a été alertée sur cette situation, les grévistes indiquent que celle-ci a été alertée et s’est même déplacée sur les lieux en début de l’année. Une plate-forme de revendications a été soumise par les travailleurs à l’inspection et des engagements ont été pris par la direction de l’usine quant à la prise en charge des problèmes soulevés, mais à ce jour, rien n’a été fait. «Aucun engagement de ceux pris n’a été respecté», indique-t-on. Pis encore, et sur le plan professionnel, les travailleurs évoquent des horaires de travail dépassant parfois les 16 heures par jour. Il est aussi fait état d’accidents de travail qui s’étaient produits dans l’usine, mais dont les victimes n’ont pas été prises en charge. Les travailleurs déplorent, également, l’absence d’équipements de protection particulièrement pour les travailleurs manipulant des produits chimiques. «Je travaille au niveau de la fonderie et je ne dispose même pas de chausseurs de sécurité ou d’une combinaison», témoigne un travailleur. La liste des préoccupations évoquée est encore interminable et des dizaines de travailleurs ont témoigné de conditions de travail déplorables. Nous avons voulu connaitre l’avis des responsables de l’usine mais il n’y avait aucun interlocuteur pour nous recevoir. Hier, alors que la plupart des travailleurs étaient en grève, l’usine tournait comme même avec des ouvriers chinois. Pour vérifier certaines informations évoquant les atteintes à l’environnement dans la région et la pollution que génère cette unité, nous nous sommes adressés aux services de l’APC de Bechloul. Selon le chargé du bureau de l’environnement de Bechloul, il y a bel et bien des atteintes à l’environnement et aussi une extension non autorisée de l’usine. Notre interlocuteur affirme que de nombreuses mises en demeure ont été adressées à la direction de l’usine, mais en vain. Selon lui, son service a carrément préconisé la fermeture du site. Nous apprenons au niveau des mêmes services de l’APC que des inspecteurs de l’environnement de la wilaya, alertés par les services de l’APC de Bechloul sur les atteintes à l’environnement, se sont déplacés sur les lieux et un rapport de la situation a été dressé, mais depuis il n’y a eu aucune suite.

Djamel M.

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