La Dépêche de Kabylie : Si le taux d’électrification de la wilaya donne des motifs de satisfaction, à contrario celui du gaz, 17% à peine, est loin de la moyenne nationale qui est de 35%. Quelle en est l’explication ?ll Abderrahmane Ykhlef : C’est un chiffre qui a été calculé par la Direction des mines et de l’industrie. Ce chiffre tient la route. La DMI a tenu compte pour son estimation du parc de logements existant au niveau de la wilaya. J’ai travaillé ailleurs et j’ai constaté que nombre de conventions ont été passées entre la wilaya et Sonelgaz, des conventions RCN (raccordement clientèle nouvelle) qui ont augmenté de manière conséquente le taux de pénétration du gaz. Ces wilayas n’ont pas attendu le programme national. Ce type d’opérations s’est réalisé à travers beaucoup de wilayas. Certaines APC de la région sont assez riches pour étendre le réseau et nous pouvons donc lancer ce type d’opération avec elles. Il ne faudrait pas rester tributaire d’une programmation publique pour que la couverture en gaz fasse tache d’huile. Il faut recourir aux subventions wilaya et APC. Autre facteur qui peut expliquer la faible couverture en gaz : dans le temps et dans le cadre de logement social, les raccordements à l’électricité et au gaz étaient systématiques. Mais à partir de 1995, la partie gaz a été supprimée. Faut-il rappeler aussi que la période 1986-1998 à Béjaïa n’a connu aucune réalisation ou branchement de gaz ! Voilà, ce qui peut expliquer le fait que la couverture en gaz de Béjaïa n’ait pas évolué par rapport aux autres wilayas.
Quelles sont vos projections, toujours pour le gaz ?ll Dans le cadre du programme complémentaire de soutien à la croissance, il est prévu une partie « distribution publique » avec l’alimentation en gaz naturel de Kherrata, Tizi-Ihaddaden, à Béjaïa, et Tizi-El-Oued, à Melbou, ce qui reste très faible, j’en conviens par rapport aux besoins exprimés. Il est prévu aussi une partie « quartier et lotissements sociaux » avec une enveloppe de 624,70 millions de dinars pour une consistance de 185 km au bénéfice de 8 820 foyers. Au total, c’est une cagnotte de 4 945 millions de dinars qui est allouée pour alimenter 26 700 foyers soit l’équivalent du nombre actuellement alimenté. Cela dit, la gestion du réseau gaz ne pose pas de problème particulier. Les seules fois où il y a eu des pannes, elles ont été le fait de sabotages ! Il arrive aussi que sous l’effet d’une surconsommation, le débit diminue dans un immeuble et les détendeurs ne font pas le nécessaire. La réparation est rapide dans ce cas.
Revenons si vous le voulez bien au segment énergie électrique. Est-ce qu’il y a des normes auxquelles Sonelgaz se réfère pour évaluer la qualité du service ?ll Nous travaillons avec le système UNIPED mais nous sommes encore loin de ses critères. En dehors des intempéries, nous avons enregistré un temps de coupure équivalent à 17 heures. C’est en somme comme si on avait 17 heures de coupures ininterrompues pendant toute l’année. D’après les ratios retenus, le chiffre devrait tourner autour de 8 heures. Pour améliorer ce chiffre, nous avons mis une couverture radio ainsi qu’une permanence sur pied, 24 heures sur 24.
Est-ce que vous disposez d’une espèce de tableau de bord qui vous signale en temps réel toute survenue de panne sur le réseau ?ll En temps réel, non ! Nous aurions dû bénéficier, dès 2005, du Bureau central de conduite qui devrait nous permettre de télécommander tout le réseau à travers la wilaya…Nous attendons.
Si vous n’êtes donc pas prévenus par un citoyen d’une coupure dans un quartier, vous n’avez aucun moyen de le savoir ? ll Exact, pour la basse tension, l’appel de l’abonné est nécessaire. Laissez-moi vous dire aussi que notre organisation est appelée à se développer avec les recrutements que nous allons faire pour en finir avec la sous-traitance notamment en matière de prélèvements des indices des compteurs. Nous avons déjà mis fin au contrat de 23 agents préleveurs et allons continuer jusqu’à leur remplacement total prévu pour septembre 2007.
Quelle est la puissance électrique disponible dans la wilaya ?ll Il y a les 245 MVA existants, plus 140, donc un total de 385 MVA disponibles. Dans ce dernier chiffre, les 80MVA de Sidi Aich qu’on ne peut évacuer pour le moment ne sont pas inclus. En une année, la puissance a été doublée, le développement industriel de Béjaïa peut se faire sans problème, notamment dans le secteur touristique.
Dernièrement, un problème s’est posé pour le transport de l’électricité à THT à Tinebdar. La population s’étant opposée au transit de cette énergie sur ses terres. Qu’en est-il aujourd’hui?ll Il y a toute l’étude qui doit être refaite et sûrement beaucoup d’intérêts en jeu. Quant à cette prétendue radioactivité soulevée par certains, je vous assure qu’au stade actuel des connaissances, rien ne permet une telle assertion.
Sonelgaz parle souvent de piratages ou si vous préférez d’énergie détournée. Quelle est l’ampleur du phénomène ?ll Pour 2005, nous étions à un taux de perte de 11,91%, pendant que, chez nous, on tolère 7 à 8% alors que le meilleur réseau du monde, l’allemand, est à peine à 4%. Cette énergie est soit mal gérée, soit volée. La fraude commence cependant à diminuer. Nous disposons d’équipes de nuit qui nous permettent de déceler beaucoup de ces cas de fraude.
Les événements que la région a connu ont entrainé un lourd contentieux entre la population et Sonelgaz. Maintenant que tout semble aplani est-ce que les consommateurs ont réappris le réflexe de payer leurs factures ?ll Les citoyens reviennent à de meilleurs sentiments, c’est sûr. Nous avons pour l’heure deux régions qui demeurent quelque peu récalcitrantes : Smaoune et El Kseur. Nous avons pris le taureau par les cornes et décidé de procéder à des coupures. Il y va de la survie de l’entreprise. Nous étions à 98 milliards de centimes sans les créances Arouchs et avec, nous arrivons à 221 milliards, ce qui correspond au chiffre d’affaires d’une année. Est-ce qu’avec 221 milliards de créances, l’unité de Béjaïa peut continuer à fonctionner ? Sachez que les créances Arouch prises en charge par le Trésor public ne sont pas encore rentrées dans nos caisses.
Sonelgaz n’a pas toujours réparé les dommages causés aux abonnés par un service parfois défaillant, pourquoi ? ll Nous avons un problème avec la CAAT de Béjaïa qui n’a jamais joué le jeu. Son rôle s’est limité à prendre nos dossiers et à les expédier à Alger, ignorant superbement la convention qui nous lie. Ce problème nous l’avons porté à la connaissance de notre direction à Alger. Il est en voie de règlement. Pour nous, il s’agit beaucoup plus du respect des principes de base car le montant n’est pas important. Le dommage par nous commis, aussi insignifiant soit-il, doit être réparé.
Vous en êtes parfois arrivé à couper le courant à des sièges d’APC, pourquoi ?ll J’ai été obligé, fin 2005, de procéder à la coupure de certains sièges APC, onze au total. La wilaya nous a dégagé une enveloppe de 14 milliards de centimes, mais le temps que les fonds arrivent, d’autres factures affluent et l’on se retrouve dans le schéma initial. On maintient donc juste le solde, sans l’aggraver.
L’éclairage public relève des APC. Avez-vous procédé à sa coupure ?ll On ne l’a pas fait, pour ne pas provoquer le citoyen
Des projets à court terme ?ll Oui, une formule, style Ousratic, va être lancée pour le gaz. Le P-DG de notre entreprise est en train de négocier avec la BNA pour débloquer des crédits à tous les citoyens désireux de bénéficier des bienfaits du gaz de ville. Le crédit, près de 30 000 DA, sera étalé sur plusieurs années.
Dernière question, on a parlé, à un moment donné, de l’utilisation des prises électriques comme prises Internet. Où en êtes-vous avec cette technique ? ll L’expérience a été lancée au niveau de certains lycées d’Alger, Oran, Constantine et Annaba. Et cela marche plutôt bien. En guise de conclusion, je dirais que je souhaite rencontrer un peu d’aide des autorités locales, notamment dans la transmission des informations. Quant à la population, j’émets le vœu de la voir apprécier davantage nos efforts. Je lui demanderais aussi de se montrer indulgente vis-à-vis de nos ratages et des problèmes qui surviennent de temps à autre surtout en cas de conditions extrêmes.
Entretien réalisé par Mohamed Bessa et Mustapha Ramdani