La filière apicole en difficulté

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La production mellifère dans la wilaya de Boumerdès a enregistré une baisse sensible ces trois dernières années. Des résultats négatifs qui témoignent des difficultés que vit la filière apicole.

L’actuelle campagne n’étant pas encore clôturée, les apiculteurs refusent d’avancer un chiffre précis. En 2016/2017, la production ne fut que de 1 500 quintaux, alors qu’elle avait approché les 2 070 q en 2015. Ce recul de production n’a pas été sans conséquence sur les prix de ce produit très demandé, notamment pour les besoins de soin et de médecine traditionnelle.

Il y a deux ans, une ruche pouvait produire plus de cinq kilos de miel, mais à présent, la moyenne de rendement n’atteint plus les 3 kilos. Cela s’explique par plusieurs facteurs et causes, selon des apiculteurs. Certains estiment que les aléas climatiques en sont les causes, notamment les fortes pluies et beiges qui détruisent les colonies d’abeilles.

«L’hiver dernier, la plupart des apiculteurs qui choisissent la transhumance ont perdu plusieurs ruches en raison des chutes de neiges de décembre», nous dira un apiculteur de Baghlia. Ce dernier précisera que les mauvaises conditions climatiques sont déjà néfastes pour la floraison. Ce qui pousse les abeilles à chercher partout les fleurs et elles se perdent ainsi, car elles ne peuvent s’éloigner à plus de 10 kms à la ronde.

Le facteur des maladies, dont le varroa, est une autre cause qui abîme la ruche. Des apiculteurs déplorent par ailleurs la cherté des traitements et des pesticides qui sont souvent hors de portée, notamment pour les nouveaux qui se lancent dans la filière. Cette activité est jalonnée d’embuches surtout lorsqu’il n’y a pas d’accompagnement par les pouvoirs publics. «J’ai commencé l’activité avec cinq ruches, au bout de trois ans mes ruches ont prospéré et atteints près de 60. Mais ces dernières années, j’en ai perdu la moitié, à cause du manque de moyens et des conditions climatiques.

Si j’avais un moyen de transport, j’aurais fait la transhumance pour éviter la perte des abeilles», nous dira un apiculteur d’Ouled Moussa, approché lors de l’exposition consacrée au miel organisée au niveau du centre culturel islamique. Des centaines d’autres apiculteurs sont pénalisés par le handicape de l’absence de terrain. Yacine, un apiculteur de Thénia, nous dira qu’il a loué une parcelle de terrain à Boufarik pour pouvoir profiter des champs d’orangers.

Les pesticides en cause ?

Mais l’utilisation effrénée des pesticides dans l’activité agrume a causé la perte et la mort de beaucoup d’abeilles. «Beaucoup d’agriculteurs ignorent que l’abeille est essentielle pour les arbres et utilisent des pesticides chimiques pour augmenter la production», lance Yacine, avant d’enchaîner : «L’abeille ne peut survivre dans une atmosphère polluée par les produits chimiques».

Said Djatit, un autre apiculteur des Issers fut lui contraint de louer des terrains, à raison de 50 000 Da, pour la transhumance et augmenter ainsi sa production. Une apicultrice de Legata, qui s’est lancée dans l’activité grâce à une association locale qui aide les femmes au foyer à s’insérer socialement, dit avoir compris le langage des abeilles et investi tous son temps et ses moyens pour réussir, malgré les embûches.

«Les débuts étaient difficiles dans un créneau dominé par les hommes. Mais ma volonté a fini par payer. J’ai pu passer de 10 ruches à 70 en quatre ans», dira-t-elle. Elle aussi dit rencontrer le problème d’absence de terrains. Il y a le facteur formation aussi qui joue un rôle déterminant dans l’apiculture. M. Djazairi, un apiculteur de Laaziv, nous dira que certains ont hérité du métier de leurs parents ou proches, mais que d’autres sont doués.

Mais, ces derniers temps, la formation devient un outil incontournable, en raison des avancées technologiques et des procédés de traitement de l’abeille et son environnement. Mohamed, un jeune de Chabet El Ameur, dit avoir un diplôme en techniques de conduite d’un rucher, délivré par le centre de formation agricole de Bordj Ménaïel, mais il n’est toujours pas apiculteur. «J’ai déposé un dossier au niveau des services des forêts pour une aide et j’attends toujours leur réponse.

On m’a dit qu’ils allaient me former avant de m’octroyer dix ruches, en contrepartie de paiement d’une petite somme d’argent qui me sera remboursée plus tard», nous a-t-il confié. Et ils sont nombreux à être titulaires d’un diplôme d’apiculture et à continuer à endurer les affres du chômage. Près de 2 240 personnes exercent le métier d’apiculteur dans la wilaya de Boumerdès et le nombre serait plus important si les conditions étaient favorables dans un créneau aussi porteur que l’apiculteur.

Youcef Z.

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