Alors que la Kabylie commémore les cinq ans des événements d’avril 2001, au rythme de marches et meetings et où tout le monde se rappelle des martyrs tombés lors des affrontements, les traumatismes laissés par les incidents semblent quasi intacts chez les blessés du Printemps noir.Touchés plus ou moins gravement, certains ont eu une prise en charge complète et se sont remis de leurs blessures, alors que d’autres présentent aujourd’hui de graves infections qui bouleversent leur existence.Medjkoune Ali et Djaït Hocine en font partie. Depuis qu’ils ont été touchés au niveau des jambes, le 25 avril 2001, ce sont d’interminables rechutes dans leur état de santé, en dépit de plusieurs interventions chirurgicales, des mois d’hospitalisation et des traitements ruineux qui n’ont pas atténué leur mal.“J’ai passé sept mois à l’hôpital d’Akbou, 18 jours à celui de Tizi Ouzou ; j’ai subi quatre opérations, reçu deux greffes osseuses dont le rejet continue jusqu’à présent, la peau collée à l’os blessé et un rétrécissement de la taille de ma jambe” résume Hocine. Avant d’ajouter : “Avec un traitement qui me coûte 12 250 da et qui ne tient que 21 jours, je n’arrive plus à subvenir aux frais médicaux avec les 8000 da d’indemnisation utile, certes, mais insuffisante”. “Un professeur m’a déconseillé de faire l’opération en Algérie, mais à l’étranger” nous confie-t-il. “Est-ce cela la prise en charge complète promise ?” s’interroge-t-il enfin.Autre cas, autre désarroi : celui de Ali. Il vient de subir une énième intervention au niveau de la jambe droite à cause d’une ostéité chronique qui, sans une bonne prise en charge, risque de mener à l’amputation. Son état est déjà très alarmant depuis l’incident. Les nombreux rapports des différents médecins traitants (chirurgiens, orthopédistes et psychiatres) soulignent, à chaque fois, que le blessé nécessite, comme Hocine, une prise en charge à l’étranger.Ainsi, “… Malgré un traitement antidépresseur, l’évolution s’est aggravée (…) autodestruction psychologique, anorexie (…) une prise en charge à l’étranger s’impose d’elle-même…”pouvait-on lire dans un compte rendu médico- psychologique du 14/10/2001, par le Dr Benmessaoud, psychiatre.Mais les demandes du blessé sont restées, à ce jour, sans écho favorable. “Malade à traiter en Algérie”, avait répondu la commission médicale nationale du CHU Mustapha Pacha daté du 23/11/2005, à un recours du blessé fait le 11/10/2005, ou “pas de risque vital” répond-t-on encore à un autre recours. Jusqu’à présent, les nombreux EMG notent que “le nerf SPE droit est toujours paralysé” et le patient “souffre d’une affection psycho-pathologique chronique (P.T.S.D)”, ce qui l’a poussé même à faillir commettre l’irréparable, ne semblent pas avoir assez de poids. Où se situe le blocage ?“Si l’on attend que ma jambe soit amputée pour me délivrer ce droit, à quoi servira-il vraiment ? La victime devrait-elle rester en vie jusqu’au dernier jour, afin de ressentir tout son compte de souffrance ?” se demande cyniquement Ali.Les différentes promesses reçues dans ce sens sont également restées sans lendemain.Par ailleurs, les blessés comptent beaucoup sur la reprise de langue, ces jours-ci, entre gouvernement et archs dans l’espoir “de voir leurs cas reconsidérés”, espèrent-ils.
S. A. B.
