L’habitat rural, cette formule d’aide que l’Etat a proposé comme l’une des solutions permettant d’“éradiquer” la crise de logement, vécu par la majorité des citoyens surtout en zone rurale, n’est en fait qu’un leurre, dira d’emblée un P/APC lors de la réunion, qui a regroupé ce vendredi, plusieurs élus des différentes municipalités de la wilaya de Tizi Ouzou. Ladite réunion est en fait la deuxième qu’a organisé la mairie de Beni Yenni, et qui est une réunion où un rapport a été rédigé et sera adressé aux autorités compétentes afin de solutionner les multiples problèmes rencontrés par les représentants des citoyens et les citoyens eux-mêmes, bénéficiaires de l’aide à “l’habitat rural”.En effet, les présidents d’APC réunis se sont tous plaints de la lenteur administrative d’une part, à débloquer la somme nécessaire aux bénéficiaires de ce programme de logements, au point ou la question qui revenait à chaque fois est “cet argent existe-t-il réellement ?”. A entendre les différents intervenants, il y a de quoi s’inquiéter. Sinon comment se fait-il qu’à ce jour, selon les P/APC présents, même si tous les dossiers sont ficelés, la CNL ne débloque toujours pas la première tranche d’aide. Et pour argumenter ses dires, un des élus de la commune de Boghni dira : “Nous avons constitué et finalisé 230 dossiers des bénéficiaires, mais ils ont été rejetés pour motif qu’il faut délivrer un acte de naissance n°12”. Un autre intervenant ajoutera : “Après avoir établi l’acte de naissance, exigé, on vous demandera une autre pièce de l’état civil, un certificat de nationalité, un casier judiciaire et pourquoi pas un certificat de célibat ou je ne sais quoi d’autre, ceci juste pour que ce soi-disant argent, n’arrive pas aux bénéficiaires, à savoir déjà si cet argent existe !”. Ainsi, dans un rapport déjà envoyé au wali, les présidents d’APC de Béni Yenni, Iboudraren, Yatafen, Aït Toudert, Aït Boumahni et Ouacif, ont tenu à interpeller le wali “Vous n’êtes pas censé l’ignorer, la Kabylie dans sa globalité, se distingue des autres régions du pays, par son relief accidenté et par le caractère d’indivision qui fait que les terrains appartiennent à tout le monde et à personne en même temps.”Ceci est justifié, selon les auteurs de ce rapport : en premier, l’exclusion des cas des extensions sur des dalles existantes, alors qu’à la réalisation de cette extension on produit réellement un nouveau logment, ce n’est pas un aménagement ou une extension du logement déjà existant, c’est plutôt une chance pour un ménage de sortir de la cellule traditionnelle et d’accéder à la propriété du nouveau logement produit, sachant que le problème d’indivision dans notre société et chose non seulement courante mais réelle et permanente. “Pourquoi exiger des RDC +0 alors que pour certains c’est la seule parcelle que possède toute la famille et malgré l’établissement du titre de propriété au nom d’un seul individu, la parcelle est toujours moralement dans l’indivision, comme il est de coutume, en Kabylie, que des frères construisent l’un au-dessus de l’autre. Pourquoi aussi exiger une toiture en tuiles pour ne laisser aucun espoir à une extension ?”, ou encore “comment exiger une construction sans sous-sol quand la topographie du site l’impose, sachant que ce sous-sol peut ou pas être habitable”. Les rédacteurs du rapport au wali de Tizi Ouzou, pour défendre leurs administrés n’hésitent pas à avancer les causes des difficultés assimilées à des blocages par “pourquoi exclure les constructions où le RDC est affecté aux garages ou aux locaux à usage commercial ou professionnel en bordure de la route, alors que l’habitation du RDC comporte beaucoup de nuisances, et en milieu rural posséder un commerce n’est pas synonyme d’aisance”. La raison qui a poussé tous les citoyens de ces régions montagneuses, donc au relief très accidenté, à opter pour ce programme d’habitat rural, n’est autre que l’inexistence d’autres formes de logements à savoir, l’AADL, le LSP ou L’OPGI. Les multiples entraves, rencontrées par les bénéficiaires de l’habitat rural, même si en réalité personne n’en a pour le moment réellement bénéficié, puisque sur les 832 accordés pour la daïra de Béni Yenni, aucun des inscrits n’a bénéficié d’un sou, toujours selon les présidents des APC de cette daïra. Par ailleurs, les présents à la dite réunion ont aussi soulevé et attiré l’attention du wali sur les moyens financiers dont disposent les attributaires, à savoir que pour finaliser déjà le dossier, le postulant doit d’abord débourser près de 50.000 DA entre les frais qu’engendre l’établissement d’un certificat de possession, d’un permis de construire, des plans de construction. En plus de tout cela, la CNL refuse les permis de construire renouvelés, même si le bénéficiaire n’a jamais entamé les travaux ; ceci conduira donc le pauvre citoyen démuni de logement et de moyen financier, à refaire un autre permis de construire pour une nouvelle somme d’argent. Les problèmes et autres embûches rencontrés par les attributaires de l’habitat rural ou des postulants à cette formule de logement, sont multiples au point qu’il est très difficile de les énumérer en totalité, mais nous citerons les cas soulevés par le représentant de la commune d’Aït Boumahdi “Comment ce fait-il que les bénéficiaires de l’aide au séisme soient exclus, de l’habitat rural, à l’exemple de ces gens qui ont bénéficié d’une aide de 20 000 DA ou 40 000 DA, alors que l’ex-wali lors de sa visite dans la daïra des Ouacifs avait avancé que tous ceux qui ont bénéficié dans le cadre du séisme d’une aide inférieure à 120 000 DA, porraient bénéficier de l’aide à l’habitat rural, mais la CNL a rejeté près de 20 dossiers de citoyens ayant bénéficié de l’aide après le séisme”. L’Etat doit se pencher sur ce dossier, car selon les P/APC la population doute de la sincérité de celle-ci et du programme, à l’image des citoyens de la commune d’Aït Bouadou qui ont observé, un sit in, devant la daïra de Ouadhias la semaine dernière, selon le représentant de cette commune, présent à la réunion. Le nouveau wali, qui effectue ces derniers jours des visites à travers les daïras de la wilaya de Tizi Ouzou, entendra sûrement ces doléances et aura fort à faire. Enfin signalons qu’avant de saisir le wali de Tizi Ouzou, les P/APC cités ont déjà écrit au ministre de l’Habitat. De même qu’il ne serait pas étonnant que toutes les APC de la wilaya soient dans un proche avenir concernées par ces réunions, qui ont été initiées par le P/APC de Béni Yenni et son équipe, ainsi que les maires des communes de Yatafen et Iboudraren, qui ont été les premiers à suivre ce qui est appelé, un mouvement de contestation des élus locaux.
M. A.B.
