Une injustice à réparer

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n Perle parant l’écrin de nos plus beaux bijoux artistiques, « yemma azizen » de Farid Ali, à défaut d’être inscrite au patrimoine mondial immatériel de l’UNESCO, reste de l’avis de tous, Kabyles ou non, la plus belle chanson créée en terre d’Algérie. Il n’est par conséquent pas étonnant que cet héritage fasse l’objet de tant de douteuses convoitises et de tirs croisés de piratages. Dans de tels cas d’atteinte au patrimoine, est-ce à la seule famille et aux héritiers de se protéger ? N’est-ce pas à l’Etat de préserver les intérêts matériels et moraux des héritiers de ce patrimoine, qui appartient la mémoire collective nationale autant qu’à la sphère privée, et ce, par l’entremise de l’institution des Droits d’Auteur ? Rendre hommage aux artistes, les soutenir en cas de besoin, relève d’un très noble souci. Mais cette préoccupation et les gestes de bonne volonté qui vont avec, restent à double tranchant, puisque toutes les attentions de soutien sont réduites à néant si l’on oublie un seul artiste méritant. Alors là, quand l’ostracisme, l’oubli officiel et la mise à l’écart frappent une personnalité de la trempe de Farid Ali, il y a de quoi se dire que les décideurs de la reconnaissance sont soit injustes, soit, et ce serait pire, incultes, de par l’impardonnable ignorance de l’auteur de l’inoubliable « yemma azizen ». Ce méprisable mépris, qui dure d’ailleurs depuis des décennies, est encore plus condamnables lorsqu’on sait que Farid Ali est méritant à triple titre, celui de moudjahid actif de la première heure, puis d’artiste engagé avec la troupe du FLN, enfin d’artiste tout court, ayant inscrit son œuvre dans la postérité. Sa légendaire modestie et, pour ceux qui se souviennent de lui, son choix de mutisme lors des dernières années, ont fait que par sa mise au ban de la reconnaissance de la part des pouvoirs, c’est en fait son humilité qui est pénalisée. La faute, parfois, n’est pas tant de commettre une injustice, que de ne pas reconnaître la faute et, surtout, de ne pas la réparer. Il n’est pas jamais trop tard pour bien faire, et pour transformer le mépris passé en hommage présent…

N. Stambouli

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