C’est la vacance

Partager

Comme wilaya de l’intérieur, Bouira est d’abord handicapée par l’absence de la mer. Mais, d’aucuns pourront rétorquer que cette contrée n’est pas plus mal située que Sétif ou Sidi Bel Abbes. Mieux, elle dispose de potentialités de récréation et de loisirs qui ne demandent qu’à être valorisées.Les noms des sites potentiels ou ayant par le passé servi d’exutoires ou de lieux de détente sont presque connus de tous. Mais, ils se confondent à présent avec un passé “glorieux”, un mythe qui n’a pratiquement aucune projection dans la vie de tous les jours, Tikjda, Tala Rana, Tizi n’Jaboub, Hammam Ksenna, le massif des Bilans, Djebel Dirah, etc. Ces noms risquent de faire partie d’un passé révolu si aucune action n’est entreprise pour les réhabiliter et les mettre à la disposition des citoyens.En tout cas, depuis plus de dix ans, les habitants de la wilaya de Bouira, et particulièrement la frange juvénile, souffrent réellement du déficit en infrastructures de détente et de divertissement. La saison de l’été met en évidence ce désert touristique. Une fois les vacances scolaires arrivées, les enfants sont pris par un sentiment d’angoisse. Les plus chanceux, se rendent chez des proches à Alger ou à Béjaïa pour mieux se rapprocher de la mer.D’autres, adolescents de 16 à 19 ans, se déploient dans les fermes qui sont à la recherche de la main-d’œuvre pour les travaux des moissons.Pour espérer une simple trempette à la mer l’espace de quelques heures, certains louent un taxi collectif (fourgon) sur Zemmouri, Figuier ou Tichy. Mais, pour ce faire, il faut passer par l’inévitable portefeuille de papa qui doit vous accorder 600 à 800 DA, le coût du déplacement d’une journée, cela sans compter la bouffe et les boissons.Parmi les anciens sites que compte la wilaya de Bouira, seule Tikjda garde encore l’allure et le charme d’un lieu touristique de montagne qui mérite d’être visité. Cependant, même si le site n’est qu’à une trentaine de kilomètres de la ville de Bouira, le déplacement n’est pas des plus aisés. Il n’existe pas de navette de transport public. Ceux qui tiennent vraiment à s’y rendre, devraient se résoudre à une solution onéreuse : louer un taxi ou un transport clandestin. L’alternative n’est pas à la portée de tout le monde, d’autant plus que le visiteur doit penser au retour. Quant à la mythique station de Hammam Ksenna, le projet de sa réhabilitation (dont nous avons rapporté déjà les détails dans ces colonnes) prend l’allure d’une véritable Arlésienne. Après les premiers terrassements, les chantiers sont mis mystérieusement à l’arrêt. Cela dure depuis plus d’une année. Il se trouve que par une malheureuse fatalité, même les anciennes infrastructures traditionnelles, vers lesquelles accourraient des visiteurs de tout le centre du pays, ont été démolies dans le cadre de l’installation du nouveau projet. Les lieux sont aujourd’hui frappés d’une vacuité sidérale. C’est un véritable gâchis économique et touristique.Déjà chétive et insignifiante au cours des trois autres saisons, l’activité culturelle est réduite en été à la portion congrue. Ce ne sont pas, en tout cas, les séminaires pédants et inintelligibles sur les « Formes de l’écriture littéraires » et “Le patrimoine immatériel” qui risqueraient d’emballer les foules ou de contraindre les villageois de Takerboust et de Taghzout à venir passer la nuit sur les trottoirs de la ville de Bouira.Par ces journées caniculaires, certaines âmes, soit esseulées soit gagnées par un certain romantisme, se rendent sur les deux barrages de la wilaya (Oued Lakhal à Ain Bessem et Tilesdit à Bechloul) pour une partie de pêche ou pour passer quelques moments de tranquillité loin du brouhaha des villes. D’autres encore prennent la destination de la forêt suburbaine d’Errich. En fin d’après-midi, des files de jeunes en tenue de sport se forment le long de la piste forestière pour se livrer à des activités physiques comme le footing. En se plaignant du manque de loisirs et de lieux de détente à Bouira, Krimou, gérant d’un kiosque à tabac se prépare à se rendre dans un hammam à Biskra. “Avant d’emménager dans le hammam, je passerai quelques jours sur le sable avec des amis et je compte me soumettre à la thérapie par le sable ardent pour soigner mon rhumatisme. Je ne reviendrai ici qu’au début de septembre”.

Amar Naït Messaoud

Partager