Mickey Spillane, le créateur du détective dur à cuire Mike Hammer, est mort lundi à 88 ans dans sa maison de Caroline du Sud (sud-est) d’une manière qu’il avait épargné à ses personnages: sereinement.Chez Spillane, on ne fait pas dans la dentelle. Son détective, machiste, violent, raciste et parfois pire encore, cogne, trucide, désosse. Et s’en vante.Né Frank Morisson Spillane, Spillane a vu le jour à Brooklyn le 9 mars 1918. Il abandonne la faculté de droit en 1935 et commence à écrire des histoires pour des pulp magazines, ces publications peu coûteuses et extrêmement populaires aux Etats-Unis jusque dans les années 50. Il écrit aussi des scénarios pour des « comics ». La seconde guerre mondiale va l’obliger à poser la plume. Mobilisé dans l’aviation, il instruit de jeunes pilotes et participe lui-même à plusieurs missions. De retour à la vie civile, il reprend sa machine à écrire pour les « pulps » et les « comics » avant de devenir artiste de cirque. On le voit ainsi faire du trempoline chez Barnum (il interprètera son propre rôle dans le film Les géants du cirque en 1954!). Touche à tout, il collabore un temps avec le FBI dans une enquête sur un trafic de drogue. Ce n’est pas sans risque. Spillane récolte deux blessures par balle et une au couteau. Mais cotoyer la pègre l’inspire. En 1947 il publie J’aurai ta peau (I, the jury), le premier Mike Hammer.Pourquoi Hammer? « Parce que je crois que tout homme, au fond, désirerait être un marteau pour frapper la tête de son prochain », répond Spillane. Un style est né. Son privé rend sa propre justice sans l’ombre d’un sentiment et tue sans état d’âme. Le succès est foudroyant. »Dans +Charmante soirée+ (One lonely night), il y a la scène finale au cours de laquelle Mike Hammer arrose et abat 80 types avec un pistolet mitrailleur. Mes éditeurs, qui trouvaient cela trop saignant, m’ont fait ramener le chiffre à 40″, racontait volontiers Spillane, le visage buriné d’un vieux loup de mer, portant volontiers une casquette d’aviateur, un air de ressemblance avec John Huston.Mike Hammer n’a que très peu de rapport avec le froid Sam Spade (le privé créé par Dashiell Hammet) ou l’humaniste Philip Marlowe (de Raymond Chandler) mais il bénéficie de l’incontestable talent de conteur de son créateur, d’un style sans fioriture et de dialogues ciselés.En 1952, après sept romans décapants Spillane arrête l’écriture. Témoin de Jéhovah il préfère prêcher la bonne parole à travers les Etats-Unis. Il revient avec Hammer en 1961 et publiera encore quatre romans jusqu’en 1970. Hammer, un peu vieilli mais toujours antipathique, revient en 1986 et 1990.Outre son privé, Spillane est également le créateur de Tigerman, un espion qui vomit le communisme. Il a écrit une dizaine d’autres romans en dehors de ses deux séries.Au cinéma, Spillane a connu de nombreuses adaptations, dont la plus célèbre est le Kiss me deadly de Robert Aldrich adapté de son roman En quatrième vitesse considéré par de nombreux critiques comme son chef-d’oeuvre.Longtemps méprisé par la critique américaine, qui soulignait ses opinions de droite et ses idées primaires, Spillane aimait en rajouter sur ce chapitre. « Je suis un ultra-conservateur dans ma façon de penser. Je n’ai pas de sympathies pour les gens de gauche », disait-il dans un entretien publié dans les années 70. Mais il demeure un des classiques du « noir » et a eu une influence majeure sur de nombreux auteurs, notamment James Ellroy un des maîtres du nouveau roman noir.
