Reportage réalisé par Salah Benreguia
Chaque saison estivale, des centaines de milliers d’émigrés reviennent au pays. Si le bonheur de retrouver les siens est indubitablement immense, les conditions d’accueil au niveau des ports et aéroports restent insuffisantes. Des jeunes, vieux, femmes, familles entières viennent chaque jour d’Alger ou de d’autre wilayas, donnant à l’aéroport une ambiance colorée faite de différentes dialectes, et d’accents aux intonations tantôt fines, tantôt gutturales ou rauques (à cause du retard). Une seule cause les a réunis, l’attente d’une personne chère. Il suffit de rester quelques instants à côté de ces gens qui attendent les leurs, pour constater les énormes retards que mettent les voyageurs pour sortir de l’enceinte portuaire et aéroportuaire. Beaucoup de personnes expliquent ce fait par le retard des dessertes et parfois par les lourdeurs des formalités douanières et de la Police algérienne des frontières (PAF), au niveau des ports et aéroports. Mais après la mise en service du nouvel aéroport international Houari-Boumediene (ouvert le 1er juillet), et malgré le nombre élevé des passagers, l’accomplissement des formalités de Police de frontières et de Douane est relativement rapide grâce aux dispositions prises à cet égard. Rien n’a été laissé au hasard. Selon un responsable de la PAF, plus de 203 000 passagers ont été enregistrés du 1er juillet au 3 août. Soit plus de 15% par rapport à l’année passée. Sur une superficie d’environ six hectares, en plus de vingt-quatre autres réservés à des parkings, cette gigantesque infrastructure est un joyau, on y trouvera également, une salle de restauration et des cafeterias de qualité avec des boutiques. On y trouvera aussi des espaces pour guichets de banques, assurances, poste sans oublier, évidemment une place pour les trois inévitables opérateurs de la téléphonie mobile. Si toutes ces infrastructures ont pour objectifs de faire » se reposer » les gens qui attendent leurs familles vivant sous d’autres cieux, et faciliter la tâche aux voyageurs, prendre des boissons ou un dîner est quasi-impossibles pour bourses moyennes. Et pour cause, les tarifs sont exorbitants. Si l’on sait que le prix d’une tasse de café est à 70 DA, on peut avoir une idée du prix d’un sandwich ou d’un plat. A ce propos, Mohamed venu attendre son cousin, s’est dit très surpris par ces prix, » Certes, toutes les commodités sont présentes (des espaces pour s’assoir, des espaces pour non fumeurs et fumeurs….), mais consommer une tartelette à 200DA est inacceptable » a-t-il contesté.
Compagnies aériennes : tout pour satisfaire les voyageurs. Côté compagnies, tout le monde se met de la partie. Dès le 1er juillet, la compagnie française Aigle Azur a pris plusieurs mesures spéciales afin d’assurer le retour des émigrés. Un personnel spécialement Aigle Azur, en vue de garantir l’accueil des membres de la communauté algérienne à l’étranger dans les meilleures conditions et les orienter. La flotte a, dans ce cadre, pris des dispositions spécifiques concernant ses dessertes. En effet les vols du transporteur aérien français se poseront sur le tarmac de l’aéroport Houari-Boumediene environ quatre fois par jour, en provenance de Paris. La compagnie est reconnue pour sa sécurité et sa ponctualité. Quand à la compagnie nationale Air Algérie, toutes nos tentatives pour savoir quelles sont les dispositions prises pour faire face, un tant soit peu, à l’engouement en cette saison estivale sont restés vaines. Par ailleurs, toutes ces dispositions de la part de toutes les compagnies sont considérées comme une petite bouffée d’oxygène pour les émigrés souhaitant passer leurs vacances au pays, et pour cause le nombre des émigrés n’a pas cessé d’augmenter. Face à la porte de sortie des arrivées, des familles, des proches et des amis s’impatientent. Cela fait des heures qu’ils sont là. Un monde fou se déplace dans tous les sens. Outre celui de Paris, l’autre est en provenance de Tunis. Les passagers, pour la plupart des émigrés, débarquent comme chaque été, pour passer des vacances chez les parents et profiter du soleil d’Algérie. Femmes, hommes et enfants poussent leurs chariots. Une femme en jean, tient son bébé dans les bras. » Ça y est l’avion de Paris vient d’atterrir, ils l’ont affiché sur l’écran « a-elle lancé avec un soulagement. Lamia, une jeune Kabyle vient d’embarquer à l’aéroport d’Alger via la compagnie Aigle Azur. Venue de Paris où elle s’est installée depuis six ans, pour passer des vacances à Azazga, la ville de ses parents. Représentante commerciale dans une société parisienne, l’émigrée, portant collier pendentif représentant forme un sigle kabyle, n’a pas mâché ses mots pour qualifier le nouvel aéroport de bijou. » Franchement, je suis très surprise par cet édifice qui me rappelle ceux des pays développés « . Elle nous a fait savoir qu’elle est très heureuse de retrouver les siens et son pays. Car à ses yeux rien ne peut égaler la chaleur familiale et la beauté de pays. « Je ne peux pas rester une année sans visiter au moins une fois mon village. Je me ressource et je recharge mes batteries pour mieux affronter les taches que je dois accomplir, une fois en France » a-t-elle déclaré avec un sourire angélique.
Cap sur le port d’Alger.
Lundi, 9 h du matin la salle d’attente est pleine à craquer, le bateau Corse-Marseille est en face de nous. Selon un responsable, le bateau reprendra le large bientôt. Chaque jour que Dieu en fait, et spécialement cette saison estivale, les voitures de toutes marques et de toutes couleurs sortent du port d’Alger l’une après l’autre, bien » bourrées » de sacs et cabas. Les voyageurs sont fatigués, ils viennent d’accomplir le parcours du combattant. Côté salle d’attente, des dizaines de personnes venues pratiquement de l’intérieur de pays donnent à la faveur d’une journée très ensoleillée, libre cours à leur joie en attendant de voir la voiture de l’un des leurs apparaître. Le bonheur des retrouvailles se transforme de plus en plus en stress à cause du retard. Les spéculations vont bon train, et les services douaniers font l’objet de critiques de la part des assistants et parfois des émigrés. Tous les regards sont braqués sur le côté gauche d’où sortent les passagers. Karim venu de Reghaia est là depuis 7 h du matin, pour accueillir son frère vivant à Marseille, » je ne comprend pas pourquoi ils mettent tout ce temps pour sortir de l’enceinte portuaire » et d’ajouter » il semble qu’on oublie que les voyageurs viennent de loin « . » C’est eux » lance un jeune homme, avec une joie qui se lit sur son visage à son compagnon, après avoir vu les siens. « De toute façon, chaque fois que je viens dans mon pays pour passer des vacances, je songe toujours à mon prochain voyage « , nous dira avec une mélancolie Salah, un jeune habitant à Marseille. Il est vrai que la plupart des émigrés viennent dans leur pays pour passer uniquement des vacances. Mais il y a ceux qui sont là pour régler quelques » affaires « . A cet effet, Lyes, originaire de Blida rencontré au port d’Alger, avec un accent purement marseillais nous avoue que le motif de son déplacement est le mariage. » Je suis venu pour organiser mon mariage la fin de ce mois et régler la paperasse de ma future femme à l’ambassade « . Mais comme les vacances se planifient longtemps à l’avance, beaucoup de familles interrogées nous ont déclaré que les plages et les forêts ont été déjà choisies….en France. » Pour nous tout est clair, le site est préalablement choisi et l’argent ne manque pas ! « , ont-t-il conclu.
S. B.
