Ambiance familiale et bon enfant

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C’est avec une profonde sincérité et le cœur gonflé d’espérance que nous nous retrouvons tous ensemble aujourd’hui, pour célébrer nos rêves de clarté dans la convivialité. Vous ne pouvez pas imaginer toute ma réjouissance de voir la ville de Bgayet renouer (l’espace d’un week-end, comme dirait Al-Pacino) avec l’animation culturelle des grands jours d’antan : de la chanson à texte avec Farid Ferragui à la Maison de la culture, du cinéma avec Belkacem Hadjadj présentant son film El Manara à la Cinémathèque, et ce café littéraire (autour d’un thé) que nous animons dans cette sympathique petite salle du TRB à l’initiative des Ateliers des Lettres de la Ligue des arts dramatiques de Bgayet. » C’est par ces mots pleins d’émotion que Brahim Tazaghart, auteur de Salas d Nuja, invité de ce premier jeudi Littéraire, a entamé sa conférence-débat sur son roman. Cette ambiance familiale et bon enfant autour d’un débat littéraire dans laquelle Bizek, le président de la ligue a présenté l’invité du jour et annoncé dans la foulée le lancement des « jeudis Littéraires », on l’a plus revue depuis la fin des années 1980, début 1990 (du temps où feu Abdelmalek Bouguermouh était à la tête du Théâtre régional de Bgayet). Là est le grand mérite des organisateurs.Devant une audience nombreuse, de tout âge et de tous les horizons : étudiant (es), lycéen (ne)s, auteurs, poètes, chanteurs, dramaturges, cinéastes, musiciens, artistes-peintres, fonctionnaires ou chômeurs, mais tous citoyens passionnés de lecture et du livre, le conférencier s’est fait plaisir ( et nous a donné autant) en narrant le bel amour liant Salas et Nuja, ses deux personnages principaux que ceux qui n’ont pas lu le roman découvraient pour la première fois, les yeux suspendus à ses paroles envoûtantes, tellement imagées. « Cela est peut-être dû au fait que notre ami Brahim est d’abord un poète », essayera d’expliquer par la suite Mohand Aït Ighil, lors des débats qui ont suivi l’exposé fortement applaudi. Bgayet, comme Vérone est une ville assez romantique, où l’on peut s’aimer et se sacrifier pour son amour ! De même que la langue berbère (tout comme celle de Sir W. Shakespeare) est capable de porter une aussi belle romance, digne de celles de Roméo et Juliette ou encore de Kaïs wa Leïla. « Salas ! ilaq ad ruhegh ! Ahat mazal-it, ahat yettâasa-yagh-d nekkni ur t-nezri ara. Akka i de netta ! Tezrid, ccek yezdegh win ikesben ul ur t nebghin ara ! »Mazal, rnu cwit, cedhadh rriha-m cedhagh kem M’lalent xallen-nsen. Temmured targagayt n lehmala deg-sent « Kemmini inu, inu iman-iw, inu i lebda. Ulac di ddunit win izemren ad agh yebdu, ulac… D wawal-agi, ccurent wallen-is d imettawen. Nuja tessuk afus-is ghef lhenk n Salas, teslef i wallen-is s’l henna. Tenna yas : « Ulac win i zemren ad agh-yebdu, ulac ! Bgayet y sied à merveille dans le roman (et en dehors) avec Nuja dans le rôle d’une jeune fille amoureuse, qui au lieu de se lamenter sur son sort, parce que comme dirait Brassens chantant un poème d’Aragon : « Jmaâ imettawen-im a tudert-iw, ulac tayri ur neccih ara ! », l’auteur l’a au contraire voulu active et battante pour sauver son amour après avoir été elle-même sauvée d’une noyade par Salas à la plage de Boulimat. Par son roman, l’auteur nous renseigne par ailleurs sur des faits vécus dans la région de Béjaïa et pourquoi par exemple, Djerba est la seule ville tunisienne où l’on retrouve le parler berbère.Mise à part quelques coquilles d’impression et une chute qui nous laisse à la fin quelque peu sur notre faim, Salas d Nuja est un beau roman d’expression berbère qui se lit d’un trait, surtout pour mes semblables passionné (e)s des lectures nocturnes. A lire absolument !Lors des débats agréablement arrosés avec du thé à la menthe, le conférencier n’a pu s’empêcher de déborder sur le devenir du livre d’expression amazighe, pour faire le procès de la situation critique dans laquelle se débat la création, l’édition et la diffusion des œuvres littéraires en Algérie. Pouvait-il vraiment faire autrement, quand on sait que pour éditer son roman à compte auteur (comme beaucoup d’autres d’ailleurs), cela a nécessité un effort financier personnel, considérable pas facile à amortir de sitôt. De là à espérer « gagner son pain » par ses œuvres… Quel pauvre sort, notre pays réserve-t-il à nos artistes et autres créateurs ! Avant de conclure, Brahim Tazaghart a gratifié l’assistance par la lecture d’un inédit beau et long poème tout en souhaitant « Mon espoir est de voir des rencontres telles que ces jeudis Littéraires, durer dans le temps ! Avec les meilleurs sentiments d’amitié et bon courage ! », écrit-il sur le Livre d’or ouvert à cet effet par les organisateurs.Bonne continuation à l’équipe organisatrice (Nourredine, Brik, Nassim, Chérif, Slim et tous les autres) sans oublier Khellaf (l’infographe) pour la conception de l’affiche. Grand bravo aux membres des Ateliers du cinéma de la ligue toujours qui ont pensé à immortaliser l’événement sur cassette vidéo. Importante initiative pour la mémoire collective.A jeudi prochain donc pour un hommage tout en poésie, cette fois à la mémoire d’Ahmed Azeggah, avec la précieuse collaboration de l’association Timseyit d’Ighil El Bordj (de son village natal à Imezayen) et bien d’autres partenaires.

Khaled Khodja

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