Le dernier communiqué de l’UDR qui tente de tirer la sonnette d’alarme sur la montée du péril islamiste en appelant à un rassemblement des forces démocratiques, nous remet dans le bain du début des années 1990 lorsque a été lancé le débat sur la nécessité de la formation d’un bloc démocratique face à un pouvoir ‘’finissant’’ qui avait dilapidé toutes les richesse du pays et qui plus est, fut tenté par un ‘’concubinage’’ avec la mouvance islamiste sortie réellement de ses laboratoires. Qu’un parti, même s’il n’a pas encore été agréé, s’inquiète de l’évolution négative de la pratique et de la culture politiques et de l’atmosphère de déliquescence dans laquelle baignent tous les rouages essentiels de l’État, cela relève de son droit et même de son devoir civique et moral. Cependant, force est de constater que les entités qui ont pour nom ‘’partis politiques’’- et que l’organisation de Amara Benyounès cible en priorité dans son appel- sont, dans la majorité des cas, dans une situation de décomposition organisationnelle, politique et organique. N’est-ce pas que la politique de “redressement’’ est devenue une véritable pandémie au sein de ces organisations que les pouvoirs publics appelaient naguère avec un mépris fort révélateur ‘’associations à caractère politique’’ ?Sans vouloir accorder à l’UNJA une importance et une assise qu’elle ne possède guère, l’on est tenté de nous arrêter sur la dernière “anecdote’’ qui fait état d’un processus de scission au sein de cette ex-organisation de masse. C’est, en quelque sorte, l’illustration de la pulvérisation et de l’atomisation continuelles du tissu associatif (culturel, professionnel et social) et des organisations politiques.Les cas les plus graves pour la mouvance démocratiques sont immanquablement les déchirements qui rongent ces derniers temps le MDS et le FFS. Le premier cité a pourtant su s’adapter à toutes les situations d’infortune qui lui furent imposées par le passé en maintenant l’unité des rangs et une rare cohérence dans la vision.L’interdiction de son ancêtre le PCA (Parti communiste algérien) au lendemain de l’Indépendance, a mobilisé l’Assemblée constituante de l’époque avec comme premier animateur Hocine Aït Ahmed. La vie de clandestinité à laquelle était réduit le parti n’a pas pu casser les ressorts et les énergies de l’organisation malgré les sévices subis par nombre de ses militants à commencer par feu Bachir Hadj Ali. Sous le nom du PAGS, le parti rebondira en adoptant un type de pragmatisme appelé ‘’soutien critique’’ par lequel il entendait défendre les choix sociaux du pouvoir tout en se permettant une marge de manœuvre ouverte au regard critique. De par sa composante humaine, majoritairement instruite et cultivée, ce parti a su éviter le culte de la personnalité et le danger des luttes de leadership. Quelles que fussent les limites de son rayon d’influence et d’action, le MDS a le mérite de la clarté et de la cohérence dans les idées.Il fait, en tout cas, partie du paysage et du patrimoine politique algérien porteur d’idées de progrès et de démocratie qu’il serait dommageable de perdre par de sordides calculs politiciens venus de l’intérieur ou de l’extérieur de la structure. Le terrorisme islamiste ne s’est pas trompé en liquidant physiquement des cadres et des militants de ce parti déclaré comme ennemi juré. Quant au FFS qui fêtera ses 43 ans d’existence dans une dizaine de jours, il a été forgé par la culture du Mouvement national et par la répression et l’ostracisme qui s’abattirent sur lui et sur tous les villages de Kabylie qui soutinrent son action- après 1963. Le charisme dont jouit son leader et la diabolisation du parti par le pouvoir- en le présentant comme un parti régionaliste ennemi de la nation- n’ont pas empêché le FFS de lutter pour les idéaux de liberté, de démocratie et de justice sociale. La crise qu’est en train de vivre ce parti depuis quelques jours n’augure rien de bon. Avec les interférences extérieures et l’âge avancé de son président, ce parti risque d’être laminé et décomposé comme la majorité des autres formations politiques. Si d’autres partis ne sont pas encore secoués par des crises organiques, ils sombrent néanmoins dans un silence et une atonie pour le moins inquiétants, qui renseignent sur la décrépitude et l’effritement qui les rongent. Dans une conjoncture aussi délétère et aussi peu sûre pour l’exercice politique, la mouvance islamiste se fortifie non seulement de prosélytisme religieux qui gagne de plus en plus l’école, les médias publics lourds et les mosquées, mais aussi par le retour annoncé de certains idéologues extrémistes mis au ban de la société une décennie durant.
Amar Naït Messaoud
