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La “mère des batailles’’ ?

Depuis maintenant plus d’un mois, les massifs et les contreforts de la Kabylie vivent au rythme d’une lutte antiterroriste digne des années chaudes vécues sur les monts de l’Ouarsenis au milieu de la décennie écoulée. On est bien sûr loin, Dieu merci, des massacres collectifs de Aïn Tarik, Ammi Moussa ou Malaâb. Cependant, l’on ne peut que légitimement s’interroger sur le regain d’activité des branches armées islamistes sur les monts du Djurdjura et des Bibans dans une conjoncture considérée comme la phase descendante des hordes terroristes vaincues par la résistance populaire et les institutions républicaines du pays. Après la neutralisation d’un émir de triste réputation il y a un peu plus d’une année dans la région de Béjaïa, nous intitulâmes une chronique tenue dans ce même espace : “Ci-gît la bête immonde’’ en pronostiquant que la ‘’mère des batailles’’ livrée par le peuple algérien contre le crime intégriste et contre la régression historique programmée contre notre pays aurait lieu dans la région de Kabylie. Même si cette fière et ombrageuse partie de l’Algérie n’a pas de prédispositions particulières à un recrutement massif d’intégristes armés, elle a été affectée par un phénomène souvent ‘’importé’’ par ses enfants vivant dans les villes. Ceux-ci, pourchassés par les services de sécurité au niveau des zones urbaines, trouvent dans les vallons et les maquis de la montagne des refuges temporaires. La jonction avec la société n’a pratiquement aucune chance de se réaliser en dehors du banditisme marginal auquel mène souvent, par une fatale évolution, ce genre d’impasse stratégique. En investissant la Kabylie, les dernières bandes terroristes qui gardent encore une certaine capacité de nuisance, ignorent certainement les capacités de résistance de cette région et son rejet catégorique de la solution islamiste. Ceci est d’autant plus probable que les jeunes enrôlés dans cette mouvance antinationale ne sont pas toujours instruits sur l’histoire ancienne et récente de cette montagne qui a donné des leçons de vaillance et de patriotisme face à toutes les occupations et à toutes les tentatives de soumission qui l’ont visée de près et de loin. Depuis l’occupation d’Alger en 1830- que les bataillons kabyles ont essayé d’arrêter à Sidi Fredj- jusqu’à la guerre de Libération nationale où cette région s’est distinguée par des milliers de martyrs, aucune phase de l’histoire nationale ne s’est déroulée sans le précieux apport et la participation active de la Kabylie. Dans une belle image propre aux gens façonnés par la rudesse de la nature et le labeur des jours, un vieil homme de Kabylie eut cette réplique à une question d’un journaliste qui se démenait pour faire son reportage : «L’on est, sur ces pitons et ces crêtes, tellement proches du ciel et de Dieu que l’on n’a pas besoin de le héler à tout instant ou de commenter ses commandements».Il faut souligner que la réalité des choses sur la scène sécuritaire au cours de ces dernières semaines est largement ‘’travaillée’’ par la conduite ou la manipulation- c’est selon- des outils réglementaires contenus dans la Charte pour la paix et la réconciliation nationale. Au cours de cette débandade générale des derniers terroristes irréductibles, certains milieux, y compris des anciens exilés ayant un lien direct avec la décennie rouge, essaient de se repositionner, tandis que les services de sécurité mènent admirablement l’une des nobles missions républicaines à Sidi Ali Bounab, au Col de Tirourda- où le projet de réfection de la RN 15 est sécurisé par une unité de l’ANP-, dans l’Akfadou et sur les massifs des Bibans. Face au nihilisme moyenâgeux, la ‘’mère des batailles’’ se déroule probablement sous nos yeux.

Amar Naït Messaoud

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