La Dépêche de Kabylie : Comment évaluez-vous aujourd’hui le processus de la revendication amazighe depuis avril 1980 ?ll Ould Ali El Hadi : C’est un processus long, mais assez souvent marqué par des passages douloureux comme l’emprisonnement des militants de la cause. Il est également ponctué par la grève du cartable qui a coûté une année pour les écoliers, lycéens et universitaires. On peut aussi souligner les événements du Printemps noir qui ont fait 124 victimes. C’est par devoir de mémoire qu’il faudra citer toutes ces vérités historiques, aussi douloureuses soient-elles cela n’ébranlera nullement notre détermination et notre clairvoyance. L’amnésie est à combatte mais aussi, l’honnêteté intellectuelle et politique avec le substrat d’intelligence, nous amène à l’évidence de reconnaître les avancées considérables enregistrées dans les acquis du combat. Cela dit, la visite du chef du gouvernement en Kabylie, en ce moment exceptionnel, constitue un message fort de l’Etat algérien à l’adresse de cette région qui a eu à poser la problématique de taille. : la question identitaire et celle citoyenne. A ce titre, il est notoire que tamazight a fait des sauts qualitatifs et que la question citoyenne est en train d’être réglée dans le cadre du dialogue en cours entre le Mouvement citoyen et le gouvernement.Toutes les voix en porte-à-faux, de ce constat relèvent de la myopie politique, et sont otages de la volonté d’instrumentaliser la région à des fins étroitement claniques. Désormais, la Kabylie tourne le dos aux options du chars et du pourrissement.cependant, il reste que la mobilisation, un quart de siècle durant aboutisse à des fruits qui sont nombreux et même considérables. L’enseignement de tamazight dans les écoles et sa concrétisation comme langue nationale ainsi que la mesure du Conseil du gouvernement relative à la régularisation du statut de l’enseignant de tamazight sont, entre autres, les acquis de la revendication. Cela sans oublier le lancement prochain de la télévision amazighe, un mouvement associatif amazigh de plus en plus actif dans le sens de développer et de promouvoir la langue et la culture amazighes.
Comment voyez-vous l’avenir du Mouvement culturel berbère ?ll Aujourd’hui le chemin est défriché pour laisser place à une expression libre positive et autonome pour les différents acteurs de la promotion de la langue, à savoir les universitaires et les hommes de culture. Ces derniers doivent s’impliquer davantage pour faire face aux différents blocages en mettant à la porte les aventuriers et les saisonniers politiques afin de permettre à cette culture de s’inscrire dans l’exigence du 3e millénaire.
Comment le MCB compte-t-il célébrer cette année le 20 avril ?ll Le MCB et son mouvement associatif célèbrent dans la liesse, mais aussi en hommage aux militants qui ne sont plus parmi nous aujourd’hui, les festivités du Printemps berbère. Ainsi, avec des acteurs qui mettent en valeur les acquis enregistrés, mais aussi avec un esprit déterminé à poursuivre la mobilisation, les choses vont bon train. Il y a des gens qui demeurent mobilisés jusqu’à ce que la culture et la langue amazighes aient leur place dans toutes les institutions du pays. Autrement dit, son officialisation. Le 20 avril aujourd’hui est célébré aussi bien au niveau du chef-lieu de wilaya qu’a l’échelle des différentes localités, ce qui prouve l’attachement du mouvement associatif amazigh à cette commémoration.
Peut-on savoir quelle est la différence pour M. Ould Ali entre la célébration du 20 avril cette année et celle des années précédentes ?ll Sincèrement, je dis qu’en ce 20 avril, 25 ans après, la question amazighe n’est plus un tabou dans les institutions étatiques et elle ne cesse de gagner plus d’espace. La célébration du 20 Avril n’est plus une commémoration polarisée au chef-lieu de wilaya. Des activités sont d’ailleurs organisées à travers pratiquement toutes les localités.
Entretien réalisé par A. Hafid