Il est des timbres de voix tellement mielleux que, même éteints ou absents, ils continuent encore à “hanter” les ouies les plus atones.
C’est qu’ils sont, à l’instar de la volupté du regard, les interprètes de l’âme, et l’âme de Hakim, comme le traduit si bien sa voix, est toute délicatesse et volupté.
C’est ainsi que les inconditionnels de BRTV se souviennent encore des “Tidwilin” (émissions) de ce frêle trentenaire dont les thèmes n’échappent guère au label. Elle sont tout naturellement, et cela va de soi, appelées, en toute simplicité, “Tighri Idourar”, c’est-à-dire l’appel des montagnes ou “Tighri n’wul”, c’est-à-dire l’appel du cœur, émissions à travers lesquelles Hakim, en animateur maîtrisant son thème à merveille, interpelle les êtres, les âmes et tout ce qui a trait à l’amazighité.
Tâche énorme ? Nullement, car Hakim sent, en son âme et conscience, que c’est le moindre de ses devoirs. Et il ne faut pas oublier que ses références pédagogiques le prédisposent amplement, étant un pur produit de la première promotion des enseignants de tamazight. Obtenu en 1995 à Ben Aknoun, ce diplôme le “renvoie” instantanément à Mekla, la matrice, la région natale pour y enseigner, en précurseur de cette nouvelle génération d’enseignants en langue tamazight jusqu’à l’année 2001. Cela peut-il suffire, à ce jeune qui subit les effets de “la bougeote” et qui ne s’est pas contenté d’investir le monde de “Tanaga” (l’éducation) ? Il a su aussi donner le meilleur de lui-même dans le domaine de l’art et de l’engagement, par le biais d’un activisme socioculturel sans pareil qu’il suscite dans son entourage immédiat.
Il est bien obligé de reconnaître, en toute modestie, être “cofondateur” de l’Association culturelle Issegh, n’omettant pas de préciser que le mérite est partagé par tous ceux qui peuvent se sentir fiers d’avoir placé la première pierre pour asseoir cette structure, d’autant plus que les jeunes de Souama peuvent se targuer d’avoir été créatifs en cette période-là.
Diversement sollicité, Hakim s’investit sur tous les fronts, en plus de ses obligations didactiques. Tout en animant festivals et galas à travers la Kabylie, il collabore également dans diverses revues, particulièrement aqqaren (les rayon du soleil) ainsi que A Tasghount n uselmad (revue de l’enseignant) toutes deux axées sur le domaine amazigh, objet de surenchères perpétuelles.
Ces surenchères ? Hakim les transcende royalement en joignant la voix à la voie, le geste à la parole, à travers une disponibilité sans pareille, une disponibilité désintéressée, à “toute œuvre qui concrétiserait son aspiration”. Et, en pionnier dans le domaine, il participe à la réalisation du film-documentaire sur Md Amokrane Khelifati, cultivant la mesure par la modestie et répugnant à tout chauvinisme. Dans le domaine de la pédagogie, il a su inculquer à ses élèves le sens de l’ouverture sur l’universalité dont le résultat s’est exprimé par des essais de ceux-ci, tentant des travaux en tamazight sur… Karl Marx. Rien que ça ! Mais, l’éternel “batailleur”, dans une ambition rattrapée par le désarroi, face à la conjoncture des remous sociaux, n’a-t-il pas pensé continuer sa quête, sous des cieux plus cléments, d’un prélude ou d’une fin pour un éternel recommencement, dans une éternelle recherche de la voie à travers les moyens que lui donne la voix.
Sofiane Mecherri
