Le frère qui veut épouser sa sœur

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(3e partie et fin)

Les choses étant rentrées dans l’ordre, Silia eut un petit garçon. Arrivé en âge de comprendre, il fut un jour insulté par un garnement qui lui dit méprisant :- Ta mère n’a pas de parents, c’est pour cela qu’elle ne t’amène jamais les voir comme le font toutes les mères !Il rentre en pleurant à la maison et dit à sa mère :- Je veux connaître mes grands-parents maternels. J’en avais il y a fort longtemps, je ne sais pas s’ils sont encore vivants. Vivants ou morts, je veux le savoir !- Je les ai quittés dans un moment douloureux, je ne veux pas remuer le couteau dans la plaie. Oublie que j’ai des parents mon petit, contente-toi de tes grands-parents paternels, nous sommes bien heureux ainsi !- Non maman, j’insiste, je veux prouver à ceux qui m’insultent que moi aussi j’ai des grands-parents !- Puisque tu ne veux pas en démordre, je vais demander à ton père de nous laisser partir « Ar thmourth anda loulagh » (a l’endroit où je suis née).La permission étant accordée, Silia et son fils prennent la route. Chemin faisant, elle lui recommande, qu’une fois chez ses parents, il insiste pour qu’elle lui raconte une histoire.Malgré que les années ont passé, Silia reconnaît aisément la demeure de ses parents. Elle frappe à la porte et demande l’hospitalité pour la nuit. Affublée d’un foulard sur ses cheveux enroulés, habillée d’une robe ample, Silia ne fut reconnue ni par sa mère, ni par son père, ni par son frère cadet, ni par son frère handicapé. On la place avec son fils à côté de l’handicapé. Elle demande à sa mère ce qui lui est arrivé. – Je ne sais pas ma fille ! Cela remonte à des années, plus exactement au jour où ma fille Silia a quitté la maison sans explications. J’ai envoyé mes deux fils pour aller la ramener dès qu’ils sont revenus l’aîné a été paralysé subitement. On dirait qu’il a été victime d’une malédiction. Heureusement que le cadet n’a pas subi le même sort, sinon je serai devenue folle.Une fois le dîner fait de couscous aux fèves (laghmoud’ ou thameqfoulte) est avalé, le fils de Silia prie sa mère de lui raconter une histoire. Elle se tait.L’enfant insiste et supplie. Le père prend la parole et lui dit :- Ah’kouyas-d thaqçitAs-d ensel oula d’noukni !(Raconte-lui une histoire, nous l’écouterons nous aussi !)- Puisque vous voulez tous des histoires, je vais vous raconter mon histoire, ma propre histoire et elle est vraie !Silia raconte en détail sa malheureuse histoire sans rien omettre.Au fur et à mesure de la narration, son père, sa mère et ses frères comprennent que ce sont eux dont il s’agit. Le frère aîné handicapé se sent aspiré par la terre, demande pardon, ses parents pleurent et s’excusent. PLus aucun doute n’est permis, cette femme qui est devant eux est bel et bien Silia. Ils l’entourent, l’embrassent, la serrent. Tout le monde est en larmes, sauf le petit garçon qui s’écrie euphorique.- D’ayen oufigh jida, oufigh jedi, h’amdoulah ya rebbi !(C’est fini j’ai trouvé ma grand-mère, et mon grand-père, Dieu soit loué !)Quand ceux qui l’entourent recouvrent leurs esprits, du frère handicapé, il ne reste plus que la tête. Tout le corps est englouti. Avant qu’il ne soit trop tard, Silia se précipite sur son frère objet de tous ses malheurs et le saisit par les cheveux et tire de toutes ses forces. Dès qu’elle dégage tout le corps, la terre se referma comme par enchantement. C’est alors qu’un miracle se produit, le frère handicapé retrouve tout à coup l’usage de ses mains et de ses pieds. Il se met à genoux devant sa sœur et lui demande de nouveau pardon.Depuis ce jour, la famille reste unie, et tous les mauvais moments oubliés. »Our kefount ethhoudjay inouOur kefoun irden tsemzine. As n-elaïd anetch aksoum tsh’emzine ama ng’a thiouanzizine. »(Mes contes ne se terminent comme ne se terminent le blé et l’orge. Le jour de l’aïd, nous mangerons de la viande et des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).

Benrejdal Lounes

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