De telles rencontres sont à encourager. Malgré quelques insuffisances et autres défaillances, le Salon national propose de nombreux ouvrages aux amoureux du livre.
Des éditeurs de Kabylie
De nombreux éditeurs des wilayas de Tizi Ouzou et Bgayet sont présents et en force à ce salon. De Bgayet et pour la première fois, les Editions Talantikit sont de la partie. Cette maison d’édition n’a jamais pris part aux salons. C’est donc sa première expérience, indique M. Mohamed Berri, rencontré au stand Talantikit. Les Editions Talantikit, créées en 1991, occupent un espace de 18 mètres carrés où sont exposées plusieurs dizaines de titres en plus de leurs propres publications. Les Editions Talantikit ont publié une soixantaine d’ouvrages dont plusieurs romans, notamment des rééditions de romans classiques et de chefs d’œuvres de théâtre comme Le Cid de Corneille, qui est proposé uniquement à 130 dinars. Talantikit a édité des livres en français, en arabe et en tamazight. De même qu’elle prend en charge l’édition et l’impression de livres à compte d’auteurs puisqu’elle dispose de sa propre imprimerie. Talantikit possède également son propre réseau de distribution qui arrose pratiquement l’ensemble du territoire national et plus particulièrement les grandes villes.
La wilaya de Tizi Ouzou participe avec deux maisons d’édition : L’Odyssée et El Amel. Ces dernières, et contrairement à Talantikit, sont des habituées de ce genre de salon. El Amel, riche de quatre cents publications depuis sa création en 1997, prend part régulièrement aux salons international et national du livre d’Alger. Le gérant de cette boîte, M.Si Youcef, dont le siège se trouve à la Nouvelle-Ville de Tizi Ouzou, précise qu’il a édité des livres dans les quatre langues : français, berbère, arabe et anglais. Cette maison est spécialisée particulièrement dans le livre scolaire et les manuels parascolaires sur lesquels la demande est très forte. M.Si Youcef informe que les Editions El Amel s’apprête à rééditer pour la troisième fois en moins d’une année les mémoires de Salah Mekacher, ancien moudjahid et secrétaire du Colonel Amirouche. Ce livre a enregistré des ventes-record particulièrement dans les wilayas d’Alger et de Tizi Ouzou. La nouvelle édition est revue et corrigée, selon notre interlocuteur qui annonce par ailleurs la parution imminente d’un nouveau livre en arabe de Mohand Arezki Ferrad sur la Kabylie. Si Youcef ne cache pas sa satisfaction à chaque fois qu’un salon du livre est organisé. Pour lui, c’est le meilleur moyen de permettre le rapprochement entre le livre et le lecteur. Et bien entendu, ces rendez- vous permettent de tisser des liens entre les éditeurs et les auteurs dont les nouveaux ont souvent du mal à se frayer le bon chemin vers la publication. Les éditions Odyssée qui sont aussi présentes, favorisent le livre parascolaire et le livre pour enfants. En plus d’un rayon consacré aux livres dont les thèmes ont trait à la Kabylie, ses coutumes et ses traditions. Les Editions Odyssée dont le gérant Ali Oubelil est très dynamique, privilégient un travail de qualité et ne tablent guère sur la quantité. La maison a édité seulement cinq livres mais à la qualité indiscutable tant sur la forme que le fond. Parmi les livres édités par la boîte de Ali Oubelil, on peut citer Florilège de la poésie kabyle de Boualem Rabia. Cet ouvrage comporte des poèmes kabyles inédits, avec des traductions de niveau en langue française. L’Odyssée a aussi publié le dernier roman de l’écrivain-chanteur Abdelkader Chemini, ainsi qu’un roman du journaliste Rachid Si Ahmed, précédemment sorti à Paris aux Editions L’Harmattan, intitulé Tanekra.
Le Coran en tamazight, Littel et Freud
L’une des nouveautés de ce salon national et qui ne passerait pas inaperçue, se trouve sans doute au stand des Editions Zyriab, lancé par Youcef Necib, il y a quelques années. Il s’agit du Coran traduit en langue tamazight. Le livre saint est disponible au prix de huit cent dinars seulement et il est accompagné d’un CD-Rom qui faciliterait la lecture à ceux qui ne maîtrisent pas parfaitement tamazight à l’écrit, explique le représentant des Editions Zyriab. Le Coran en tamazight a été rendu possible grâce à un travail acharné de l’universitaire Ramdane Ait Mansour. Ce dernier a besogné pendant quatre longues années pour réaliser ce travail de longue haleine et ardu. Le livre a le mérite aussi d’avoir été écrit dans les deux transcriptions latine et tifinagh. En plus, il porte l’homologation du ministère des Affaires religieuses. C’est dire que le travail de Ramdane Ait Mansour est méritoire et louable. D’ailleurs, le ministre des Affaires religieuses a même adressé des félicitations à l’éditeur après la sortie de ce livre dont même le prix n’est pas excessif quand on prend en considération la qualité technique de l’ouvrage. Le représentant de Zyriab promet que le coran en tamazight sera disponible dans les librairies algériennes dans les jours à venir. Zyriab expose des livres, qu’on a cru épuisés, comme le roman Djazia et les Derviches de Abdelhamid Benhadouga, traduit par l’infatigable Marcel Bois.
Le stand des Editions Kitabi, propose pour la première fois en Algérie le prix Goncourt 2006 : Les Bienveillantes de Jonathan Littel, édité en début de rentrée littéraire 2006/2007. Ce livre de mille pages coûte malheureusement 2500 D.A. On devine aisément la frustration des amoureux de la littérature, notamment ceux qui ont suivi la campagne médiatique ayant accompagné la sortie de ce roman qui a reçu également le Grand prix du roman de l’Académie française. D’autres romans édités par Gallimard sont exposés dans cet espace qui fournit aussi à des prix exorbitants des essais de Sigmund Freud dont trois essais sur la sexualité ainsi que des ouvrages de Rousseau, de Sartre et d’autres grands philosophes. Dommage que dans ce stand qui offre pourtant des livres attirants, les prix sont mirobolants. L’Etre et le néant de Jean- Paul Sartre est cédé à 1500 dinars.
Dans l’espace Edhouha, pour la première fois en Algérie, le lecteur peut acheter le plus grand best-seller de ces dernières années : Da Vinci Code de l’Américain Dan Brown, traduit en arabe, à seulement 550 DA. Un autre exposant expose un nombre impressionnant des romans du seul prix Nobel arabe de littérature, Naguib Mahfoud, et à des prix raisonnables. Au stand Edif 2000, les lecteurs peuvent acheter à 400 DA une biographie de Matoub Lounès intitulée Le Barde flingué et signée par Abderrahmane Lounès et un autre livre d’entretiens entre Matoub et Abderrahmane Lounès intitulé le Testament à seulement 250 DA. Dans le même endroit, sont exposés trois romans de l’écrivain originaire d’Ighil Ali (Bgayet) dont le célèbre La Robe kabyle de Baya.
Le salon a vu aussi la participation de plusieurs autres éditeurs comme l’ANEP, Média-plus de Constantine et Dar El Gharb d’Oran. L’absence d’éditeurs professionnels et importants comme Casbah, Barzakh et Chihab reste un mystère d’autant plus qu’ils font partie du SNEL, l’association qui est derrière ce salon du livre.
Aomar Mohellebi
