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La loi du plus fort… et la culture de la défaite

Très souvent, faute d’un perdant qui “refuse” d’admettre les règles du jeu, la rencontre et les plaisirs qu’on attendait d’elle vire au drame et à une bataille rangée qui déborde du terrain et aux conséquences gravissimes.Faut-il pour cela mettre en œuvre les résolutions extrêmes et arrêter cette autre discipline génératrice d’amitié ou tout simplement revenir aux lois du sport ? La question reste posée. Il est grand temps qu’une large réforme aux consignes “courageuses” soit mise en œuvre et appliquée dans sa plus grande rigueur.Il n’y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir, et il n’y a pas également de pire perdant et de mauvais sportif que celui qui ne reconnaît pas sa défaite. Certains prétendent être de “mauvais perdants”, ce qui ne veut absolument pas dire qu’ils sont “bons gagnants”, car comme personne n’aime la défaite, nul ne déteste non plus la victoire.On apprend tout à nos sportifs, y compris “ce qu’ils ne doivent pas savoir !…” mais à aucun moment on ne les discipline à travers l’enseignement particulier de la culture de la défaite.Le sport est par essence une pratique loyale où il y a toujours vainqueurs et vaincus, et dans certains cas, parité quand les deux adversaires ont un même niveau, c’est en sorte la logique bien connue de tous qui s’applique. “Que le meilleur gagne !”. Le meilleur… c’est le plus fort, le plus subtil, le plus malin, le mieux préparé… ou tout simplement celui qui se serait le mieux pris pour parvenir à la victoire.Ainsi donc, les acteurs sur leur scène se livrent à un duel en toute loyauté où chacun des deux veut imposer tout son arsenal, sans tricherie, dans le total respect des règles, des lois, de l’adversaire… et surtout d’un homme, l’arbitre, qui est là pour assurer la direction du jeu. Une mission délicate qui suppose également erreurs, mais impartialité.Toute cette philosophie ne signifie désormais plus rien, dès lors où chaque partie doit s’assurer la victoire à tout prix… n’importe lequel, comme quoi la devise, “A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire”, n’a plus ses effets et est plus que d’actualité.Aucune des deux parties en lice n’accepte dès lors la défaite, dans des rencontres biaisées d’avance, qui engendrent combines, tricheries et partialité de quelques hommes en noir et toute la valse “des valises” dont use certains de nos clubs pour s’assurer titres ou éviter une relégation… Situation qui ne profite guère au sport, mais qui favorise le mauvais au détriment du meilleur, et également a toute une caste qui fait grande fortune avec un argent supposé servir le sport.La culture de la défaite, c’est tout l’art de se remettre continuellement en cause pour toujours mieux faire, se surpasser au besoin et s’aguerrir dans une discipline qui forme aussi bien le corps et l’esprit. Certes, il n’existe pas encore de méthodes précises pour contrecarrer les conséquences néfastes du refus de la défaite, qui est à l’origine de la déliquescence du sport dans toute son étendue. En premier lieu, c’est tout le niveau du sport qui prend un sérieux coup à travers la médiocrité qui est installée à ses avant-postes et qui ne lui permettra “jamais” de se hisser là où on veut qu’il soit. La violence qu’on voit sur nos terrains, nos salles… n’est pas souvent le fait de ces “hooligans” qu’on instrumentalise et qu’on désigne après comme alibi, comme seuls coupables. Elle est aussi celle des sportifs indisciplinés, des éducateurs… de tout un staff du club.Des dirigeants qui, pour ne pas reconnaître une défaite – assimilée chez nous à une humiliation -, désignent tantôt l’arbitre (il est toujours le premier à faire les frais), le service d’ordre, le terrain… ou comble de l’absurdité, c’est le journaliste qui est pour quelque chose dans une défaite.La défaite peut enseigner l’humilité (pas l’humiliation), elle est fatale, mais utile à plus d’un titre pour revoir ses copies, réviser ses schémas, accorder ses violons et se mettre au diapason d’une pratique certes déformée par tout l’argent qu’elle se permet, mais qui, heureusement, garde encore le peu de spectacle, d’émotion, de suspense… qu’elle peut produire quand on sait se corriger sur certains plans.Nos instances doivent s’atteler à bannir cette concurrence déloyale, à combattre tous les fléaux qui nuisent au sport, et instaurer cette obligation au perdant d’accepter la défaite ou à défaut y recourir par les voies légales, mais en aucun cas faire justice soi-même à travers la confusion et la casse. En 1972, à quelques encablures du mondial, l’équipe de l’Allemagne fédérale, a infligé à celle de l’Angleterre une défaite de 3 buts à 1 au stade même de Wembley. Le public anglais jusqu’à l’ultime minute n’a pas manqué de soutenir son équipe, et au sifflet final il s’est levé comme un seul homme pour applaudir longuement les victorieux Maier, Breitner, Beckenbauer et Netzer, leur rendant ainsi l’hommage qui leur convenait. Un souvenir que les Banks, Madley, Cooper, Peters et Tochak ne doivent pas oublier et qu’on doit nous-mêmes méditer, 34 ans après.

Mohand Oulhadj

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