Cette journée fixée par les Alliées comme “fête de la Victoire”, suite à la capitulation de l’Allemagne nazie allait montrer le vrai visage de la France coloniale. Les Algériens, dont plusieurs avaient été mobilisés et envoyés en première ligne pour servir de chair à canon, croyaient naïvement que cette victoire du monde libre sur la plus grande puissance hégémonique de l’époque allait sonner le glas des inégalités et de l’esclavage sous toutes ses formes. Naturellement, ils sortaient défiler en cette journée, pour exprimer leur joie et surtout demander l’indépendance, mais c’était sans compter sur la vraie nature du colonialisme… Les manifestations des Algériens ont été réprimées dans le sang. Les manifestants qui défiaient pacifiquement sous la houlette du PPA, en arborant des petits drapeaux algériens et en scandant “Vive l’indépendance” et “Libérez les détenus”, ont été surpris par la violence de la répression. Ils ne pensaient pas que la France de la résistance, la France gaulliste, la France qui venait tout juste de sortir d’un cauchemar puisse atteindre de tels extrêmes. Cette répression qui a touché toute l’Algérie sera particulièrement brutale dans les régions de Guelma et de Sétif où des villages entiers ont été pilonnés. Les colons qui craignaient de perdre leurs privilèges par cette montrée du nationalisme se mettaient de la partie et prêtaient main forte par leurs “Comités de salut public” à l’armée française. Révoltés par ces massacres massifs, la riposte des nationalistes algériens ne se fera pas attendre, 104 européens y laisseront leur vie. Mais le bilan du côté algérien est 400 fois plus lourd : 40 000 à 45 000 morts seront recensés. Devant l’ampleur du génocide, la direction du PPA réunie probablement la nuit du 8-Mai décide après un débat houleux de passer à l’action armée. La nuit du 23 mai est retenue pour déclencher, une insurrection généralisée. Mais l’arrestation des uns, la réticence des autres avait fait avorter un projet qui ne se réalisera que dix années plus tard. En tout cas, le 8-Mai a servi énormément à la prise de conscience des Algériens.Les assimiliationistes qui défendaient au départ, le projet Blum-Violette puis réclamaient l’intégration pure et simple à la France, se rendaient compte, lors de ces évènements, de la caducité de telles revendications. L’indépendance totale est la seule solution. Aujourd’hui, plus d’un demi-siècle après ces évènements, on se rend compte de l’importance d’une telle journée, sans lequelle la Révolution aurait été vraisemblablement retardée.
Boualem B.