Multiples dysfonctionnements

Partager

De par l’importance du programme et l’engouement que suscite la formule auprès du public, le secteur du logement social participatif (LSP), inquiète d’autant plus à cause de son enlisement dans divers et multiples problèmes. Formule alternative entre l’acquisition dans le cadre du social concernant les revenus modestes et l’accession à la propriété par l’achat réservé aux couches aisées et/ou fortunées, le LSP se veut une offre aux catégories intermédiaires, communément identifiées en tant que  » classe moyenne « . L’aide de l’Etat aux postulants à un LSP, à travers la Caisse nationale de logement (CNL) et le prix plafonné du LSP fixé à 2000 000 de dinars à Béjaïa, à l’instar de la majorité des autres wilayas, constituent les principales mesures qui fondent la vocation sociale du modèle. Ainsi, l’apport initial des bénéficiaires étant de 30% du coût du logement, ils auraient à participer à raison de 500 à 600 000 dinars environ, si l’on suppose le prix maximum du logement fixé à 2 millions de dinars.

Or, cet apport, déjà raisonnable en soi, eu égard à l’importance de l’enjeu ( l’accès à la propriété immobilière), est largement couvert par la CNL qui finance jusqu’à hauteur de 500 à 600 000 dinars non remboursables de surcroît, les projets des acquéreurs. Ceux-ci, qui plus est, ouvrent droit à un prêt bancaire pour l’achat du logement pour peu qu’ils satisfassent à certains critères exigés par les règles prudentielles des organismes bancaires (âge, structure des revenus, essentiellement.). Autant de facilitations, expliquent le succès de l’option auprès de la population du point de vue de la demande. Encore faudrait-il que l’offre suive, ce qui est bien loin d’être le cas dans la wilaya de Bejaïa.

Nous en sommes, en effet à ce jour, aux seuls 50 logements achevés, de l’EPLF sur un quota quinquennal 2005-2009, de 4500 logts répartis entre les promoteurs, outre l’EPLF, l’OPGI, l’AADL et 8 promoteurs privés. La quasi-totalité, donc, des logements LSP inscrits pour être livrés dans le cadre de la première tranche, 2005-2006, soit 2465 logts, demeurent inachevés à ce jour. A l’origine du retard, deux principales causes : les lenteurs et/ou défaillances bureaucratiques et administratives et les coûts jugés excessifs des facteurs de production par rapport au prix de revient du logement. La Fédération du bâtiment et des travaux publics (FNBTPH), affiliée à la CAP, représentant les promoteurs LSP adhérents de l’organisation patronale au niveau locale, se met aux avant-postes pour dénoncer ce qu’elle juge être des incohérences de la politique du logement en général et des rapports régissant leur relation avec l’administration locale. Ces promoteurs, par la voix de leur président, M. Azzoug Djamel, expliquent la raison immédiate empêchant l’achèvement du quota de la première tranche dont ils ont la charge.  » Nous avons des promoteurs qui sont avancés à 85% notamment à Melbou et Aokas, affirme

M. Azzoug, mais ils sont confrontés au problème des voiries et réseaux divers (VRD) qui sont à la charge de l’Etat”, explique-t-il. L’argument se veut d’autant plus imparable que lui fait écho l’avis des architectes de Bejaïa.  » Un programme doit être implanté sur un site couvert par les instruments d’urbanisme ( PDAU et POS) qui réglementent les modalités d’implantation, aussi, n’intervient-on pas sur un site sans qu’au préalable il y ait un tracé de voirie « , explique-t-il avant d’appeler par conséquent, à la  » professionnalisation  » du métier de la construction. A ce problème pénalisant la finalisation du programme de la première tranche, s’ajoutent la question du prix estimé excessif du terrain où devrait être lancé celui de la seconde tranche comprenant un nombre de 1707 logts. Début février, les promoteurs adhérents à la FNBTPH, engagés dans la réalisation du programme LSP décident le non-paiement de ces terrains d’assiette, tant que l’administration n’aura pas donné suite à une série de doléances de ces promoteurs.

Une action qui a dégénéré en conflit avec la direction des Domaines de Bejaïa qui a procédé, quelques jours après, soit aux environs du 20 février, au blocage des comptes bancaires des promoteurs protestataires. Le litige a finalement été réglé après une réunion de conciliation en présence du wali, mais sans que la question du prix du terrain ait trouvé de solution pour autant.

M. Louiba Kamel, membre dirigeant de la FNBTPH, explique le caractère  » injuste  » du prix des terrains d’assiette, dans la mesure où  » ils ont augmenté de 100% voire de 200% dans certains sites sans accroissement en conséquence du nombre de logements à constriure « , commence-t-il par développer avant d’illustrer ses propos par l’exemple du site de Tichy.  » La surface totale du terrain affecté à la première tranche valait 1034 DA le m2 pour un nombre de logements de 58 logts alors que le terrain prévu pour la réalisation du programme de la seconde tranche équivaut au double soit 2200 dinars le m2 avec imposition faite aux promoteurs de payer les voieries et espaces publics, pour un nombre de logts de 68, soit une différence de 10 logts seulement.  » Or, le manque à gagner pour les promoteurs est d’autant plus certain pour les promoteurs selon M. Louiba que le prix du logement LSP est plafonné à

2 millions de dinars alors qu’il a été déplafonné à 2,5 millions de dinars pour sept wilayas ( Alger, Oran, Constantine, Annaba, Blida et Boumerdès),  » comparables pourtant à la nôtre, à plus d’un titre « , s’étonne-t-il.

Aux yeux des promoteurs de la FNBTPH, cette  » différenciation de traitement  » est d’autant moins justifiée, que le déplafonnement du prix du logement dans ces wilayas  » équivaut à une reconnaissance  » de la faiblesse du prix de revient d’un logt à

2000 000 de dinars, estime M. Azzoug Djamel. Celui-ci crie d’autant à l’urgence d’une prise en compte de ce problème de coûts, qu’entre 2003 où il a été décidé de plafonner le prix du logt LSP et aujourd’hui  » les matériaux de construction, la main-d’œuvre, et les terrains, ont connu des augmentations « .

Autre facteur de surcoût et non des moindres, puisque caractéristique de la topographie de la wilaya, concerne la nature contraignante du sol de par, notamment, sa résistance à la compression. L’illustration en est faite à Sid Ali Labhar  » qui nécessite un ancrage à moins de 3m et surélévation des fondations de 1,5m par rapport au niveau 0.0, la zone étant inondable « , explique M. Azzoug. Enfin, les lenteurs bureaucratiques dont celles touchant au système de financement bancaire et aux aides de l’Etat (CNL), génèrent des non-paiement des situations et limitent les capacités financières des promoteurs. Autant de contraintes qui font craindre à ces derniers l’échec d’une formule qui avait charrié beaucoup d’espérances auprès du public, dans la mesure où le LSP  » est déjà en voie d’essoufflement « , avertissent-ils.

H.O.

Partager