Arezki Aït Larbi acquitté

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Arezki Aït Larbi, correspondant journaliste des quotidiens français le Figaro et Ouest France, poursuivi en justice pour diffamation par Abdelkader Sallat, ancien directeur central chargé de l’application des peines, a eu finalement gain de cause après une persécution judiciaire des plus rocambolesque. La présidente du tribunal correctionnel de Sidi M’hamed a prononcé, hier, son acquittement. Une décision accueillie avec soulagement par les journalistes et des militants des droits de l’Homme, venus lui exprimer leur soutien. M.Aït Larbi fut l’un des membres fondateurs de la Ligue algérienne de Défense des droits de l’Homme ( LADDH).

Flash-back sur une affaire des plus drolatiques. Prisonnier politique de la sinistre prison de Lambese-Tazoult à Batna en compagnie d’autres collègues de lutte, M.Aït Larbi a eu à subir avec ses amis emprisonnés de la LADDH les pires sévices allant de l’humiliation, la torture jusqu’à la mutilation. En bon militant, M.Aït Larbi décide à travers une lettre envoyée au ministère de la Justice de l’époque et publié sur les colonnes de l’hebdomadaire français l’Evénement en 1994, d’interpeller celui-ci sur les cas graves de tortures. Des pratiques barbares reconnus par les instances de lutte contre la torture comme crimes contre l’humanité, donc passibles des juridictions internationales.

La longue lettre en question, d’une actualité brûlante, portait le titre :  » Lambèse :l’Alcatraz médiéval.  » Un véritable cris de détresse contre les conditions inhumaines dans lesquelles des détenus politiques, notamment Aït Larbi, Arezki About, Ali Yahia abdenour, Ali Fawzi Rebaine, Mohamed Haroun, Ferhat Mhenni, la liste est encore longue, ont été soumis à un  » programme de rééducation spéciale  » par leurs bourreaux et geôliers. Se sentant touché dans sa dignité, Abdelkader Sallat, qui d’ailleurs n’a jamais daigné se présenter devant la justice pour apporter ses preuves, crie à la diffamation et evoque une atteinte à sa personne dans l’article incriminé. Et c’est le début d’un procès inique tenu dans les secrets d’alcôve. Qu’en on juge. Sur plainte de ce responsable, M.Aït Larbi avait été condamné en décembre 1997 à six mois de prison par contumace. Une décision qui n’a pas été portée à sa connaissance qu’en mai 2006 lorsque la police bloque le renouvellement de son passeport. Pire encore, l’appareil judiciaire délivre un mandat d’arrêt, au lieu, comme le veut le procédure, d’émettre une convocation. Selon la version policière, M.Aït Larbi serait en fuite alors que le journaliste a eu à regagner la France plus de 16 fois par l’aéroport Houari-Boumediene.

Une version battue en brèche par le collectif des avocats de la défense. Une grande mobilisation en Algérie et en France lui permet de récupérer son passeport en novembre 2006.Toutefois, l’affaire refait surface jeudi 26 avril 2007, lorsque voulant se rendre en France, le journaliste du Figaro est interpellé par la police des frontières qui décide d’exécuter le mandat d’arrêt.

Devant le parquet d’Alger, notre confrère persécuté s’est vu signifier le 28 avril dernier la cessation des recherches par le tribunal avant de décider de la date du procès prévue pour le mercredi 2 mai avant d’être reporté au 24 du même mois.

Selon des avocats de la défense, de nombreuses zones d’ombres subsistent dans cette procédure d’exception.. Il s’agit notamment des raisons inavouées ayant amené la justice à délivrer un mandat d’arrêt alors que le journaliste n’était pas en fuite puisque une convocation aurait suffi. Pourquoi déterrer un mandat d’arrêt,vieux de 10 ans, si ce n’est pour punir M.Aït Larbi suite à ses articles au vitriol envers le pouvoir, impliqué dans l’affaire Khalifa. Ou encore pourquoi tenir un procès clandestin et décider d’une condamnation par défaut ou quelles sont les raisons qui ont empêché le journaliste de bénéficier de la grâce présidentielles décidé par Bouteklifa au profit des journalistes poursuivi pour des délits de presse.

En prononçant l’acquittement de notre confrère, l’instance judiciaire, en attendant d’ouvrir le charnier de la torture dans les prison algériennes, n’a fait que rendre justice à un militant et un journaliste qui a vécu dans sa chair les affres et les supplices de pratiques inhumaines. Le comité de soutien à Arezki Aït Larbi, dénonce, dans un communiqué parvenu à notre rédaction,  » les ravages d’une justice à ordres lorsqu’elle est soumise aux manipulations claniques « . Cependant, il salue  » ce verdict qui rétablit la vérité après une décennie de mensonges et de violation de droits « , en invitant le ministère de la Justice à ouvrir une  » enquête administrative  » et  » une informations judiciaire  » sur des crimes contre l’humanité pour  » situer les responsabilités  » des uns et des autres.

Hocine Lamriben

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