Virée dans un centre de correction du bac

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Par cette décision, ô combien rassurante pour les parents et les élèves, la tutelle a opté pour la clarté de l’opération dans le but de la rendre accessible au grand public qui jusque- là ignorait toutes ces étapes importantes mais aussi synchroniques et concordantes assurées par une cohorte d’enseignants et inspecteurs qui veillent pendant tout un mois sur les copies, et ce, jusqu’à la proclamation des résultats finaux.

En effet, c’est une première dans l’histoire de notre école de pouvoir assister pendant une journée aux différentes opérations qui requièrent sécurité des uns, aptitude et éveil des dirigeants chargés de chapeauter l’équipe des correcteurs. Lors de ces moments importants, personne n’a le droit à l’erreur, puisqu’il y va de l’avenir des élèves.

Avant de nous enquérir de toutes les étapes de correction, depuis l’escorte des copies par les services de l’ordre vers le centre, il y a lieu de dire que la nouveauté cette année en matière de correction consiste à la délocalisation des feuilles d’examen vers d’autres wilayas, au lieu du déplacement des correcteurs comme cela se faisait avant. La décision émane de l’Office national des examens et concours (ONEC) sur décision du ministre. Ainsi, dans le centre d’El Hammadia, ou le lycée Polyvalent, ce sont les copies des élèves de Bouira qui y sont corrigés par les enseignants de la wilaya de Béjaia. Celles des candidats de la wilaya sont transférées vers la wilaya de Jijel où seront traitées par les correcteurs de cette wilaya. Nous apprenons aussi auprès du chef du centre d’El Hammadia, M. Haddad, dépêché depuis la wilaya de Batna, que l’équipe assure son travail à partir de 7h30 jusqu’à 14h. Pour permettre aux correcteurs de se reposer, une pause de 30 minutes leur est accordée entre 10h à 10h 30. A 14 h, c’est la clôture des travaux de la journée, la suite des corrections ne reprendra que la journée suivante. Dans ce centre d’examen, situé non loin de la Direction de l’éducation de la wilaya, près de 700 personnes entre dirigeants, correcteurs et agents de sécurité veillent au bon déroulement de l’opération. On y traite 15 351 copies d’examens de toutes les filières, à savoir sciences de la nature et de la vie, science humaines, sciences islamiques, langues étrangères, gestion économies et toutes les matières techniques. En cette matinée du lundi, quatrième jour de correction, hormis les secrétaires généraux et les chefs d’ateliers qui se déplacent entre les salles, mains chargées de feuilles ou d’autres documents, aucune trace d’enseignants, bien qu’ils y sont au nombre de 514 chargés de voir et de revoir les copies (double correction), de toutes les filières. Ils sont convoqués par l’Office régional des examens et concours de la wilaya de Béjaia (OREC), attenant au centre de correction. Et pour que l’anonymat des copies soit garanti, l’administration a réquisitionné un bloc séparé des autres pour les correcteurs mis en quarantaine durant les heures de travail.

En cette journée d’été, 16 enseignants ont faussé compagnie à leurs collègues. Ils assurent pour la plupart la philosophie. L’absence de ces derniers, s’explique selon M.Haddad par le fait qu’ils ne soient pas nombreux dans la wilaya. Quant aux références exigées de l’enseignant pour qu’il puisse intégrer l’équipe des examinateurs et pouvoir participer aux attributions des notes, elles ont trait surtout à la titularisation et aux compétences de celui-ci. Il est exigé de lui, notamment, qu’il ait assuré pendant l’année scolaire une classe d’examen. Sur ce point sensible, et puisqu’il est question de primes et de rétributions, le chef du centre dira, que les directions à travers le pays qui n’enregistrent pas de mécontentement des uns quant aux choix des autres sont rares.

Inspecteur de l’éducation depuis plusieurs années, M.Haddad appelé depuis Batna pour chapeauter cette foule d’enseignants, nous a ouvert les portes du centre, sans nous imposer de limites, si ce n’est d’éviter de déconcentrer les correcteurs en plein travail. D’une cellule à une autre, celui-ci, sans donner d’ordre, nous laissait entre les mains des secrétaires chargés chacun de son côté d’une tâche bien précise. 9h de la journée, et après s’être renseigné sur toutes ces informations ayant trait au nombre de copies, de professeurs et autres auprès du chef du centre et de son adjoint qui assiste à toutes les opérations, il nous confie entre les mains du premier secrétaire principal. Dans ce centre, les corrections ont débuté dans la journée du vendredi 15 juin, dans le même jour le barème des notes, recommandé par l’ONEC, a été d’emblée expliqué aux chefs d’ateliers et aux inspecteurs qui transmettront aux enseignants engagés.Avant de rapporter ad litteram les différentes procédures de corrections, expliquées par Chérif, membre du secrétariat principal, celui-ci nous retrace l’organigramme de cette administration conçue pour l’occasion de la même manière à travers tout le territoire national. Le centre d’El Hammadia, seul au niveau de la wilaya, compte 498 correcteurs, un chef du centre, son adjoint, un secrétariat principal composé de cinq membres, les secrétaires généraux au nombre de 50, 10 agents de saisie chapeauté par un ingénieur, 71 jurés, et 11 chefs de jurés. Dans cette organisation structurée, l’on remarque que les premiers à être bien -informés et détiennent le plus de renseignements, concernant les noms, les codes et les notes des élèves, sont les cinq secrétaires principaux qui veillent minutieusement sur la banque de données. Avant qu’une feuille ne soit remise entre les mains des correcteurs, celle-ci doit suivre impérativement une série de procédures depuis son acheminement par la police et la gendarmerie à partir de Bouira, jusqu’à la proclamation des résultats.

Composter, corriger, saisir et imprimer le listing des notes, contrôler et vérifier une deuxième et troisième fois avant l’impression, sont ces nombreuses et fréquentes étapes qui précédent la délibération. Cela se fait par une équipe très dynamique qui assure depuis le vendredi 15 juin la corvée.

Au niveau de la première cellule, appelée communément le secrétariat principal composé d’enseignant, conseillés de l’éducation, directeur d’établissement, se fait la première étape de la longue chaîne. Une fois les reproductions des élèves sont compostées en leur attribuant de nouveaux matricules en dissimulant le premier numéro d’inscription du candidat, ce qui garanti l’anonymat afin d’éviter toutes sortes de fraude et de triche, l’on entrepose les en-têtes des copies et les nouveaux matricules ou codes dans des enveloppes portant elles aussi des codes que seuls deux secrétaires peuvent décrypter. L’accès à cette salle est strictement interdit à toue personne. Seul, le coordonnateur, chargé de communiquer les notes à la cellule de saisie, peut accéder. Une fois l’opération méticuleusement établie, les copies sont remises par le truchement d’un chef d’atelier au groupe d’enseignants chargé de les traiter.

Auprès de Chérif, El Hadj et Brahim, qui détiennent les secrets et renseignements les plus confidentiels, l’on nous explique qu’après le codage des copies, celles-ci sont portées dans des feuillets regroupant 240 noms avec les nouveaux matricules. Ces feuillets se transforment de juré élèves aux jurés enseignants qui se chargent de la correction. Sur chaque feuillet, sont inscrits les codes, la première note, la filière et la matière et toute autre remarque telle l’absence de l’élève ou autres anomalies. Une fois, ce bulletin validé par le chef d’atelier, ce dernier est remis au secrétariat général pour une première vérification avant d’être confié à la cellule de saisie qui le renvoie accompagné d’un listing pour une deuxième vérification ensuite troisième pour le maintenir sur des cartons où sont portées les deux ou trois notes. Ainsi, la matière est classée.

En ce quatrième jour des corrections, les copies des deux matières, à savoir le français et l’anglais, ont déjà subies deux lectures et parfois même une troisième si un grand écart est relevé. Dans ce sens, Brahim du premier secrétariat, explique que dans les filières littéraires, une troisième correction s’impose si l’écart est de (4) quatre points, par contre dans les matières scientifiques celui-ci est arrêté à 3,5 points. Entre les deux corrections, c’est la note la plus élevée qui est prise en considération. En cas d’une troisième correction, la moyenne se fait en calculant deux notes qui se rapprochent. Et d’ajouter, mécontent, que de toutes ces taches réparties soigneusement, les correcteurs sont les premiers à être récompensés et ce à raison de 33 DA la copie. Au moment où ceux qui veillent depuis le premier jour sur l’opération, à savoir les secrétaires, ne touchent que 6 000 à 8 000 DA pour un travail d’un mois, et d’ajouter par là même que les conditions de travail ne sont pas réellement réunies dans les centres de correction. Midi passé, les agents de saisie, à pied d’œuvre, sont les premiers à se diriger vers le restaurant au sein même du centre. Il faut faire vite pour suivre les correcteurs et les contrôleurs. A 14h30, les professeurs, mis en quarantaine depuis la matinée, sont libres pour le reste de la journée. Approchés, certains d’entre eux ont, à l’unanimité, déploré les conditions d’hébergement auxquelles ils se sont heurtés la première journée. Autrement, toutes les conditions de travail ne sont pas réunies dans ce centre.

Ces différentes étapes se répéteront tout au long de la correction et ce, jusqu’au jour des délibérations, fixé au 4 juillet prochain, soit une journée avant la proclamation des résultats qui se fera à travers le territoire national dans la journée du 5.

Rendez-vous donc pour le jour de proclamation, et pourvu que le taux de réussite soit satisfaisant dans la wilaya.

Fatiha Lahiani

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