Extérieur rutilant, intérieur plein de crotin et de bêtes de somme” disait Mouloud Feraoun à propos de Bordj Ménaiel. Cette ville n’était donc pratiquement qu’une écurie, durant la première moitié du siècle dernier. Si l’auteur du Fils du pauvre était parmi nous, il aurait assurément changé d’avis pour beaucoup de quartiers. C’est plutôt l’extérieur qui est délabré, alors que les citoyens recherchent le confort dans leurs propres maisonnettes.
L’exiguiïté des ruelles suintant l’ennui frappe tout d’abord le regard du visiteur. “ A Bordj, c’est devenu une règle, il n’ y a plus de trottoirs, puisque le moindre espace y est squatté pour servir d’étalage pour les marchandises.
Cédant à des prix abordables différents produits, les revendeurs, par dizaines, occupent chaque jour les artères principales du centre-ville. Et par centaines, les acheteurs se bousculent devant leurs étals. On oublie ainsi Souk El Djemâa, le marché hebdomadaire. Cet état de fait irrite, surtout les commerçant travaillant dans la légalité, payant rubis sur l’ongle la location du local, l’impôt et autres factures d’eau, de gaz et d’électricité.
“Je vais finir moi aussi par fermer ma boutique et étaler ma marchandise, dehors”, lance sur ton colèreux, le propriétaire d’un magasin situé sur l’avenue principale de ce grand centre urbain. La multiplication de ces marchés aux puces-où des réductions de prix de 40% sont souvent concédées, enlaidit et pour cause cette ville. Baptisée Cité des coquelicots, lorsqu’elle prit un essor durant les années 80, la ville qui a enfanté le grand dramaturge Omar Fetmouche a tôt fait de sombrer, la décennie suivante dans l’anarchie. L’ex-FIS y avait installé ses essouak-errahma pour tromper le l’électorat et le résultat fut la transformation de la cité en une grande poubelle. A voir les faits, de près, il semblerait qu’on est en train de reproduire les mêmes reffexes en matière de négoce. Vendre ou revendre à bas prix des produits de base, des fruits et légumes ou effets vestimentaires, loin du contrôle des services des prix et de la qualité. Les artéres de la ville sont devenues, a-t-on constaté une grande surface de marché. Lieux jamais de nettoyés. La circulation automobile y est pratiquement impossible. Dans d’autres quartiers où l’on s’adonne aussi au commerce parallèle, parasitaire, on fait état d’espaces non encore viabilisés.
“Ici, voyez-vous, nous dit un habitant de la cité Bastos, la laideur fait bon ménage avec la beauté.” De superbes villas font face en effet, à des chemins tortueux, bourbeux. Des groupes de jeunes jurent enfin, que “lors de prochain scrutin municipal, ces élus-là n’auront aucune chance d’être reconduits.” Il est temps de faire sortir la ville de sa léthargie, de l’ère de l’anarchie par des moyens pacifiques.
Salim. Haddou.
