Par cet hommage, nous comptons faire connaître la vie et l’œuvre riche, variée, de cet illustre « inconnu » pourtant de renomme internationale.
Le 13 novembre prochain, seront passés cent ans depuis que le grand maître de la musique classique que fut Iguerbouchène a vu le jour, le 13 novembre 1907 à Ath Ouchéne, Aghribs (T.O) ; Il y a 41 ans, le 23 août 1966, il décède chez lui à Hydra, par suite d’un diabète.
Il est le fils de Saïd Ben Akli et de Oucik Fatma.
Issu d’une famille modeste, il quitta son village natal, pour s’installer à La Casbah d’Alger.
Da Med Iguerbouchène, auteur-compositeur, réalisateur de télévision et de radio, professeur de musique classique et producteur à la radio (ELAK), fut aussi un talentueux auteur de contes et scénarios. A l’âge de 6 ans, il s’inscrit à l’école franco-arabe de rue Montpenser. « C’est sous les préaux de l’école où résonnaient des voix cristallines et enthousiastes que je sentis naître ma vocation. Et souvent, je fuyais ma charmante compagnie pour me recueillir à l’écart, et siffloter tout à mon aise des bribes de phrases musicales glanées au cours de mes excursions sentimentales dans les concerts publics. » Mohamed s’inscrit au cours de solfège à l’âge de 12 ans ; (…) le soir, dans ma chambre, je complétais mes connaissances en me livrant à de nombreux exercices et n’acceptait le sommeil qu’après les avoir parfaitement réussis”. En 1922, l’Ecossais Fraser Ross séduit par les capacités du jeune musicien, lui proposa de l’embarquer en Angleterre. Il entra alors à Norton Collège à Londres, où sans abandonner le solfège, il étudia l’anglais, la littérature, le latin et la philosophie, fis des cours de piano avec le professeur Livingson de la Royal Academy Of Music.
En 1925, alors qu’il n’avait que 18 ans, il donna un concert à Bregens sur le lac de constance à Vienne ( Autriche) où il exécuta ses magnifiques œuvres, parmi lesquelles deux rhapsodies mauresques sur des thèmes spécifiquement algériens. Là, il obtient le premier prix de compositions d’harmonie contrepoint aussi le 1er prix d’instrumentation et de piano. Parlant de virtuose, Mahiaddine Bachtarzi confiait à Algérie Actualité du 23 décembre 1966, que Mohamed avait reçu de nombreux prix durant son premier séjour en Europe, parmi lesquels le 1er prix du conservatoire de Vienne et le premier prix d’harmonie de Rome, distinction éminemment rare. De 1930 à 1934 : il composa la musique du film Aziza et du court métrage Dzaïr. Entre-temps, il se consacre à la composition d’œuvre musicales, trois préludes, une danse arabe et une autre danse kabyle, deux valses. En 1934 : M.Duvivier lui demande son concours musical pour réaliser le film Pepe Le Moko. il fut admis à la société des auteurs-compositeurs de musique et fut membre de la société des auteurs dramaturges.
En 1937 : il écrivait la partition du film en couleur Terre idéale sur la Tunisie. Durant la même année, il composa la musique pour le film Kadour à Paris, réalisé par Andrey Sarroy. En 1940, il a été chargé de la direction musicale de Paris Mondial (actuelle RF1). La BBC l’invita à diriger une de ses œuvres, il présenta la 3e Rhopsodie mauresque ce qui déchaîna le public anglais qui le croyait russe, “Igorbouchen”.
En 1941, il compose pour deux films de Tahar Hannache, cinéaste algérien, Cirta et les plongeurs du désert. Vers les années 40, il composa des musiques pour Mohamed El Kamal, Farid Ali, Cheikh El Hasnaoui, Salim El Hellali. Mohamed composa une vingtaine de courts métrages, une centaine de mélodies d’après les poèmes des Mille et une Nuits venant s’ajouter à son répertoire déjà riche. Puis, il réalise un poème symphonique interprété par 80 musiciens, intitulé Une nuit de grenade qu’il dédia au roi du Maroc lors de sa visite à Paris. Ami d’Albert Camus, il se forma dans le domaine littéraire. Il parlait couramment le français, l’anglais, l’allemand, l’espagnol, l’arabe, et le berbère (Tamachât, Chleuh, Chaoui). Après l’Indépendance, il composa des mélodies pour la RTA.
Mohamed Iguerbouchene, le génie est décédé le 23 août 1966, chez lui, à Hydra et fut enterré au cimetière d’El Kettar.
Le fils d’Aït Ouchene recevait souvent sa grande amie Edith Piaf chez lui à la rue Saint Didier. Outre cette diva de la chanson française (dont la grand-mère est d’origine kabyle), les amis de Mohamed se comptent parmi les grands de ce monde. On cite entre autres : Taouès Amrouche, Albert Camus, Emmanuel Robles, Georges Auric, Vincent Scotto, Max Derrieux, Salim Hellali, Mohamed Kamal, El Hasnaoui, et le poète hindou Robindranath Tagore disait, K.Kherbouche.
Depuis le 29 juillet 1992, une association culturelle dans son village natal est créée pour raviver le souvenir du grand maestro Mohamed Iguerbouchen.
Mohamed Chami
