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Louis Gardel et Jacques Ferrandez y reviennent

L’écrivain Louis Gardel et l’auteur de bandes dessinées Jacques Ferrandez font revive chacun à leur manière, l’Algérie de leur enfance, dans deux livres entre page d’Histoire et roman familial. Louis Gardel, né en 1939 à Alger, a publié huit livres en trente ans, dont le célèbre Fort Saganne. Grand prix du roman de l’Académie française en 1980. Avec La baie d’Alger (Le Seuil), il poursuit une œuvre profondément marquée par l’Algérie et l’aventure coloniale. Dès le début de l’année 1955, le narrateur encore adolescent a compris avant les adultes que tout est fini et qu’il devra quitter l’Algérie. “Mon goût du bonheur est une connerie. La réalité, c’est la violence. C’est fini. ça mettra le temps que ça mettra, mais l’issue est fatale”, écrit Gardel. Dès lors, poursuit-il, “je dois fixer ces rives où je suis né et où je ne vivrai pas”. Son adolescence algéroise hésite entre l’insouciance du lycéen bon élève, plutôt privilégié, et l’inquiétude face aux attentats et à la montée des tensions entre les colons et la population arabe. Le narrateur s’enthousiasme pour les cours de lettres au “lycée maréchal Bugeaud” et découvre “les vraies richesses” chez un vieux libraire d’Alger. On croise alors en ville Albert Camus ou l’écrivain Emmanuel Roblès. Mais “Alger dans ces années-là était très malsain pour l’intelligence”, comme l’affirme un personnage du livre, et Gardel quittera l’Algérie en 1957 pour la métropole. Jacques Ferrandez né comme lui à Alger, en 1955, est scénariste et dessinateur de bandes dessinée. Il plonge lui aussi ses lecteurs dans l’Algérie en guerre avec le 9e tome de ses Carnets d’orient paru chez Casterman. Après cinq albums consacrés à la période coloniale avant la Guerre d’Algérie, il a entamé en 2004 un nouveau cycle sur l’insurrection algérienne. L’Algérie de Ferrandez relève forcément moins du souvenir que de la reconstitution. Dernière demeure, son nouvel album, s’ouvre sur le discours télévisé du 23 octobre 1958, par lequel le général de Gaulte en appelle à “la paix des braves” après la bataille d’Alger. Ferrandez suit les soldats du contingent égardés dans un conflit qui les dépasse, mais aussi les colons et les combattants du FLN, jusqu’à la débâcle annoncée. Un récit serré, qui intègre images télévisées et unes de journaux de l’époque, et s’aère soudain de lumineuses illustrations de la baie l’Alger ou des immenses propriétés coloniales. Le roman de Gardel et la série de Ferrandez témoignent d’un intérêt vivace par delà les générations pour un monde disparu, qui a également inspiré récemment la réjouissante saga algéroise du Chat du rabbin (Dargaud) au dessinateur de BD Joann Sfar.

Idir. L.

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