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Légende de l’apparition du mouton sur Terre

A la création du monde, il y avait quelques espèces animales sur la terre. D’après une légende kabyle, voici de quelle manière apparurent sur terre les premiers moutons… Un jour Settoute (la sorcière) était affairée à préparer une galette de blé. Pour obtenir la pâte nécessaire, elle mélange de l’eau à de la semoule, une fois la pâte prête à l’emploi, elle le modèle suivant son intuition, en forme d’un animal à quatre pattes, de taille moyenne qu’elle nomme Thikhssi (brebis). En manipulant des braises elle se salit les mains de suie (issèlouane) et touche par inadvertance la tête de la brebis qui devient noire, alors que le reste du corps était blanc. Cette salissure est à l’origine de tous les moutons, à taches noires de la création. Après avoir façonné à sa guise, la brebis, elle la pose sur du son (anoukhal negh ag’archal). Le son se colle à elle et devient laine. Comme la brebis était femelle, pour lui tenir compagnie elle lui modèle un bélier (ik’erri) avec des cornes en spirales pour le différencier. Après avoir fini, elle dépose le bélier à côté et la brebis et, miracle ils prennent vie et se mettent à bêler. Ayant faim, le bélier et la brebis grignotent du son qu’ils trouvent bon à manger. Ayant remarqué cela, Settoute leur donne du son pour engraisser. Bientôt, le son produit par le meule à bras de Settoute, ne suffit plus à rassasier les deux animaux. Un jour, Settoute oublie de fermer la porte de l’écurie (adaynine) le bélier et la brebis sortent. Ils goûtent pour la première fois de leur vie à l’herbe verte qui pousse à profusion dans les champs. Ils trouvent cela excellent et broutent sans arrêt, jusqu’à avoir des ventres ballonnés. En voyant ces “bestioles” pour la première fois, les hommes qui vivaient aux alentours sont étonnés et intrigués. Ils posent des questions indiscrètes à Settoute qui ne veut pas les renseigner. De plus en plus cireux, ils s’adressent finalement à la fourmi qui leur dit :-“D’ak’rarem ouigiElham i outchiTsakend ay fkiOud’i d’-el voussi”(Ce sont les moutons que vous voyez. Leur chair est bonne à manger, les brebis donnent du lait, du beurre et des vêtements de laine). Instruits par la fourmi, les hommes commencent à les élever. Plus tard, avec l’apparition des rites, les moutons sont sacrifiés à des divinités. En évoluant, l’humanité crée des inégalités entre les hommes, et certains ne peuvent plus manger de la viande. Leurs semblables conscients du phénomène inventent “thimchert’ ou “louziâ” (sacrifice collectif d’animaux). Cette pratique consiste à immoler des bœufs ou des moutons et permettre à toute une communauté de manger de la viande quelques fois dans l’année, sans payer pour les démunis. Pour qu’il n’y ait pas de mécontents on procède à “thasgharthe” (sorte de tirage au sort). Chaque chef de famille se procure une branchette ou une bûchette. Le préposé au partage prend les bûchettes de tout le monde et les dépose au hasard sur les tas de viande. Les intéressés reconnaissent leurs bûchettes et en prennent possession au gré de leur affectation.Après avoir connu les vertus du mouton (chair et laine) les éleveurs se servent de sa laine et de sa viande, pour l’échanger contre ce dont ils ont besoin, et qui se trouve chez des tribus voisines. C’est la naissance du troc, avant l’apparition de la monnaie. Le premier bélier que Settoute a créé monte un jour sur la montagne à l’aube. Dès qu’apparaît le soleil, il l’encorne. Depuis ce jour, il est accroché au soleil.«Our kefount eth h’oudjay inou our kefoun ir den ts emz’ine as n-elaid an en etch ak’ soum ts h’emz’ ine ama n g’a thiouenz’ iz’ ine.» (Mes contes ne se terminent comme ne se terminent l’orge et le blé. Le jour de l’Aïd, nous mangerons de la viande et des pâtes, jusqu’à avoir des pommettes rouges et saillantes).

Benrejdal Lounes

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