Site icon La Dépêche de Kabylie

Y a-t-il contradiction entre croissance économique et réformes ?

Egal à lui-même, M. Malek Serrai, expert international connu sur la scène économique, n’a pas mâché ses mots pour brosser un tableau critique à l’égard des réformes engagées et la croissance économique du pays.

L’invité du Forum d’El Moudjahid qui a reconnu l’effort extraordinaire fait sur les conditions de la préparation de la croissance économique et de la richesse s’est défendu de dire que la situation que vit actuellement l’Algérie est caractérisée par  » des contradictions économiques.  » Il indiquera dans le même sillage que les données macroéconomiques  » sont excellentes, les grands projets de construction des infrastructures de bases sont en bonnes voie mais la gestion des agrégats est moins pertinentes  » car, a-t-il dit, elle est le résultat  » d’un manque flagrant de vision et de stratégie à moyen et long termes.  » Pourquoi avec tant d’argent le gouvernement est-il prudent alors que le taux de croissance oscille entre 4 et 6% ?, s’est interrogé le conférencier.  » Quand on lit les conclusions de la Banque d’Algérie et la loi de finances on s’aperçoit qu’il y a une extrême prudence du gouvernement puisqu’on est resté à la référence du baril à 19 dollars et à un taux de croissance de moins de 6%, ce qui n’est pas favorable pour réduire le chômage de 2,8 millions d’Algériens », a-t-il expliqué. M. Benini, directeur général de l’Agence algérienne de promotion du commerce extérieur, dira lui qu’il existe 150 000 demandeurs d’emplois chaque année et  » ce n’est pas les réserves de change qui vont régler ce problème d’un million d’emploi à créer « , s’est-il exclamé.

Pour M. Serrai le problème du chômage ne peut être réglé que  » si on injecte plus de moyens financiers dans les secteurs à fort taux de création d’emploi tel que l’agriculture, les petites industries, les services et l’artisanat.  » Il va sans dire que la politique agraire reste le problème épineux. A ce sujet, l’expert a laissé entendre qu’il faut plus de moyens financiers à travers les projets dans le développement rural afin de réduire les problèmes posés par le lait, les huiles, les viandes rouges, les céréales.

Les PME-PMI était l’autre focal de son intervention qu’il estime être le parent pauvre. Selon lui, beaucoup de PMI disparaissent par rapport à la concurrence internationale tel que les pays asiatiques.  » Il faudrait s’intéresser davantage à ce secteur en favorisant la création de PME-PMI dont les activités pourraient faire face à la nouvelle donne du marché mondial « , a-t-il suggéré. M. Serrai est favorable pour la promotion de l’artisanat créateur d’emploi et de richesse qui favorisent l’image de marque du pays et pouvant participer d’une manière conséquente à la promotion du tourisme et aux exportations. La disparition de ces PME-PMI, a expliqué l’intervenant, sont dues au fait que les banques refusent leur financement au risque que les jeunes promoteurs n’honorent pas leur engagement quant au remboursement de ces financements.

M. Serrai dira donc que le gouvernement devra mettre plus d’effort dans les moyens de garantis pour les projets initiés par les jeunes. Relayé par M. Ould Hocine Mohamed Chérif, président de la Chambre d’agriculture, ce dernier en abordant la question des salaires, dira :  » Si on continue à chaque fois à augmenter les salaires, c’est la fuite en avant alors qu’il faut réguler le marché et établir la vérité des prix des produits de consommation.  » Le conférencier a insisté, par ailleurs, sur la promotion et le développement du secteur de l’agriculture comme étant un secteur clé après celui des hydrocarbures. Il a tenu à souligner que le secteur de l’agriculture ne bénéficie, malheureusement  » que de 2% du budget de l’Etat qui représentent 60 milliards de dinars par an alloués aux équipements et au fonctionnement. « 

 » Pour le communs des mortels, l’on sait que 1 DA d’investissement rapporte 10 DA de plus-value et je suis peiné de voir que l’Algérie ne fait pas beaucoup de financement pour le secteur de l’agriculture. » L’intervenant a révélé que son secteur bute actuellement sur le problème d’approvisionnement d’engrais.  » Je peux vous dire que le problème d’engrais se pose dangereusement nécessaire pour la semence, notamment de la pomme de terre que le ministère de l’Energie refuse pour sa part d’importer. Il est urgent de régler ce problème car le secteur n’attend pas « , a-t-il avertit.

Intervenant sur le chapitre des réformes, M. Nasri, vice-président de l’Association nationale des exportateurs algériens, s’est d’emblée interrogé sur la cohérence dans la conduite des réformes et sur le fait d’être celui qui est comptable de leurs applications. Il avancera, à titre d’exemple, qu’en 2002 les importations de l’Algérie étaient de 8 milliards de dollars et de 24 milliards actuellement et selon le FMI, elles seront de 40 milliards de dollars en 2012.  » Je dis que si on extrapole qu’entre 2002 et 2007,ces exportations ont été multipliées par 3 et si ce même taux d’accroissement se maintient, on sera de 57 à 60 milliards de dollars entre les importations de biens et services « , a-t-il expliqué en substance.

Et d’ajouter :  » L’Algérie est le seul pays grand importateur des services au niveau du Bassin méditerranéen à avoir une balance des services négatifs. On n’a pas un chef d’orchestre pour la conduite et la cohésion des réformes économiques et stratégiques de l’Algérie. » Selon lui, l’Algérie a importé en 2006 l’équivalence de 8 milliards de dollars pour les services et a exporté pour près de 2 milliards seulement.

Nacer Ould Mammar

Quitter la version mobile