»… Je refuse la moitié du bac !  »

Partager

Hier encore, la colère juvénile a occupé, dans le désordre, la rue à Bouira. Tout est parti du turbulent lycée Mira d’où, et c’est devenu un rituel, les ados réfractaires sont sortis et ont décidé que leur exaspération fasse boule de neige. Ils feront du porte-à-porte pour drainer dans leur sillage leurs camarades des autres lycées.

Les services d’ordre essayent tant bien que mal de canaliser le mouvement et surtout de deviner l’itinéraire que devront emprunter les jeunes protestataires. Les policiers ne savent plus où donner de la tête. Ils se contenteront de se mettre devant et derrière les jeunes marcheurs et de prévenir ainsi tout débordement.

Tassés sur les trottoirs, les adultes semblent amusés par ce bouillonnement plutôt bon enfant. La procession de lycéen(ne)s s’amplifie à mesure qu’elle arrive à hauteur d’un établissement scolaire. Ils seront près d’un millier à camper devant le siège de la Direction de l’éducation. Nouvellement réceptionné, le bâtiment est impressionnant. Son architecture rappelle un peu ces vieilles écoles anglaises où l’on ‘’fabrique’’ de l’intelligence. La comparaison s’arrête hélas là.

Le bâtiment est quadrillé par un cordon de policiers. Les élèves aussi.  » Fed up ! (y’en a marre !) « , lit-on sur une feuille brandie par un jeune.  » Benbouzid ma 3endek ma tzid ! (c’en est trop Benbouzid !) « , lit-on sur une autre pancarte. Plus loin un slogan écrit en espagnol. Oui, ici ce n’est pas comme dans l’école : les langues cohabitent sans complexes.

Nous nous invitons au rassemblement et allons d’un groupe à un autre. Quelques uns nous ont reconnu. Ils viennent nous serrer la main et nous signifier leur désir de parler. Nous nous éloignons du brouhaha et prêtons l’oreille à la colère.

Samir 16 ans nous assénera d’emblée :  » Ce Benbouzid n’a rien compris ! « . Et toc ! Il nous expliquera qu’ils ne veulent pas que le programme soit amputé mais allégé. Lyes, 17 ans, illustre les propos de son camarade :  » Pourquoi 3 heures de philo, 2 heures d’éducation islamique et 3 heures d’histoire géographie pour les scientifiques que nous sommes ?  » Abir, elle, dit  » je ne veux pas la moitié du programme parce que je refuse la moitié du bac « . A la question de savoir si le ministre de l’Education nationale avait raison de dire qu’il y avait manipulation politique, Lyes nous répond qu’il était facile de parler et il défie le ministre de dire  » où, comment, quand et par qui est-il manipulé ?  »

Et retoc ! Avec des mots simples, ces jeunes parlent en réalité de la refonte du système éducatif. Et cela renseigne, contrairement aux apparences champêtres, sur leur conscience à propos de leur devenir.

Cette revendication signée par des jeunes que l’inamovible ministre a vu naître depuis qu’il est à la tête de l’Education nationale, gagnerait à être “réfléchie’’ par ces enseignants qui ne se focalisent que sur leur statut.

T. Ould Amar

Partager