Arthur Rimbaud : le poète de sept ans

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Ce qui frappe le plus dans l’œuvre de Rimbaud, c’est qu’elle ne s’étend que sur une période de quatre ans à peine. Adolescent brillant, Arthur Rimbaud semble se désintéresser de l’expression écrite à partir de 21 ans. Son enfance Rimbaud, nous la livre toute entière dans “Les poètes de sept ans”, ce poème féroce et magnifique. Vitalie Cuif, sa mère est celle qui “fermant le livre du devoir / s’en allait, satisfaite et très fière, sans avoir / dans les yeux bleus et sous le front plein d’éminences / l’âme de son enfant livré aux répugnances”. Il est pratiquement orphelin de père, car il ne connaîtra pour ainsi dire pas celui-ci, capitaine d’infanterie de son état. C’est dans la cité de Charleville “supérieurement idiote entre les petites villes de province”, Charleville, qu’Arthur surnommera “l’atroce charlestown”, que Vitalie, “aussi inflexible que soixante treize administrateurs de casquettes de plomb”, essaie d’élever ses enfants, car Arthur a un frère aîné né en 1853 et deux sœurs : Vitalie, née en 1858 et Isabelle née en 1860. Vitalie Cuif aime ses enfants mais à sa manière : fille de cultivateurs, elle a le mutisme des gens de la terre et leur manque de tendresse démonstrative.

En 1870, le choix de la guerre atteint l’adolescent. Il n’a que seize ans et le déferlement de la bêtise guerrière l’atteint profondément. Ses poèmes s’en ressentent. C’est “Le dormeur du Val”, “Morts de quatre-vingt douze et de quatre-vingt treize”. C’est aussi l’époque des premières fugues, à Paris et en Belgique. En 1871, c’est la passion révolutionnaire qui l’atteint. Il applaudit frénétiquement le triomphe éphémère du peuple de Paris. La répression qui suit le dérunte et la révolte à la fois. Il revient à ses amours: la poésie et l’aventure. Il écrit à Paris à Paul Verlaine, qui a déjà obtenu de jolis succès et que Rimbaud admire. “Venez chère grande âme, on vous espère, on vous attend !” Verlaine invite Rimbaud à venir à Paris, mais c’est un drôle de personnage qu’il présente à sa famille : le comportement d’Arthur est déplaisant et agressif. Au bout de quinze jours, on le renvoie, au grand dam de Verlaine qui est déjà séduit par la grâce de l’adolescent.

Auprès des amis de Verlaine, les “Vilains bons-hommes”, comme ils se surnommaient eux-mêmes, il n’est guère plus aimable : sale, horsute, il a le paradoxe provocateur. Il cultive l’arrogance. Attitude puérile renforcée par le fait qu’on le considère effectivement comme un enfant. Il rêvait de Paris, d’une ascension rapide grâce à son “Bateau ivre” et se trouve face à la sottise et à la médiocrité. Il y répond par une provocation constante. Tout lui est bon : Le tabacs, l’alcool, l’absinthe, le haschisch, l’homosexualité. Quelle contradiction entre ce personnage de petit voyou qu’il affiche et son aspect réel. Tel le héros du portrait de Dorian Gray, Rimbaud ne porte sur son visage aucun effet de ses excès. Le portrait de Fantain Latour et la photo de Carjat nous montrent une tête d’ange en exil, rêveuse, un peu floue, un peu désarmée. Alors que Verlaine passe de l’admiration à la passion pour cet adolescent génial, celui-ci se débâche du monde.

En 1872, il écrit “La comédie de la soif” à Charleville et s’enfuit à Bruxelles en 1873, laissant Rimbaud sans ressources. En mai, celui-ci le rejoint. Là, pendant une crise, Verlaine blesse son ami d’un coup de revolver. Demeuré seul (Verlaine est condamné à deux ans de prison pour tentative de meurtre) Rimbaud écrit “Une saison en enfer” qu’il fait imprimer à compte d’auteur. En 1874, il fait la connaissance de Gevmain Nouveau et l’accompagne en Augleterre. L’année suivante, il revoit Verlaine une dernière fois en Allemagne, à Stuttgart. En 1876, il s’engage dans l’armée coloniale Hollandaise et part à Batavia. Trois semaines après son arrivée, il est porté déserteur et rentre en France.

Après de nombreux voyages en Europe, il part en 1880 pour Aden où une Maison de commerce l’engage. Il mène une vie d’Aventurier en Ethiopie : import-export et trafic d’armes. En 1891, une tumeur au genou droit le force à interrompre ses activités pour rentrer en France. A l’hôpital de Marseille, on l’ampute. Après un bref séjour hors de l’hôpital, il y retourne pour mourir le 10 novembre 1891.

Nacer Maouche

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