Alger “by summer”

Partager

Dans notre reportage, nous avons fait le tour des quartiers ainsi que des endroits branchés et fréquentés de la capitale afin de constater l’ambiance qui y règne. Notre première halte est le Front de mer, le boulevard est tendance durant les jours d’été surtout la nuit, du côté de la place des Martyres la direction de la sûreté de la wilaya d’Alger assure la sécurité des citoyens par la mise en place d’un dispositif spécial été, un agent de l’ordre accepte de nous dire quelques mots «la période estivale est très sensible, les agressions et les vols sont monnaie courante surtout autour de cette zone». Le soir, des vieux et moins vieux se réunissent autour de tables de fortune pour se livrer à leur passe-temps favori à savoir le domino. Aux arrêts de bus les bousculades afin de trouver une place ne s’estompent presque pas, des pick pockets rodent autour des passagers comme des hyènes scrutant le moindre détail. Nous avançons petit à petit et nous voilà à la plage d’El Kettani, ce jeudi un monde fou s’y est déplacé, il faut dire que cette plage a été entièrement réaménagée après la tragédie des inondations de Bab El Oued. La plage parait à première vue propre, des parasols sont plantés côte à côte, les plagistes profitent de l’été afin d’en tirer le maximum de bénéfices, ils s’octroient l’espace public afin d’y installer parasols et transats, au loin nous apercevons un citoyen échangeant des propos très vifs avec un propriétaire de parasols, un vacancier nous dira à ce propos «moi je préfère plutôt retourner chez moi avec ma petite famille ou changer d’endroit que d’être soumis au diktat de ces énergumènes, il y a des personnes qui viennent avec leur propre parasol mais on exige d’eux d’en louer un», un autre citoyen visiblement déçu par sa journée nous confie «ils transgressent la loi au vu et au su de tout le monde, pourtant il y a des agents police juste à côté mais ils ne daignent même pas bouger le petit doigt».

Le rush des émigrés

Cet été est marqué aussi par l’affluence record des émigrés, on les aperçoit partout, dans les boutiques, les grandes surfaces, les marchés et surtout sur les plages. La côte Ouest est très appréciée par ces derniers, Sidi Fredj tient la part du lion. A l’hôtel de thalassothérapie la plage «le Solarium», un petit coin familial où le bonheur côtoie la beauté des crêtes. Ici on paie un abonnement de 15 000 DA la saison et on a un parasol à sa disposition. La plage de Palm Beach est aussi l’endroit favori de nos émigrés qui parfois ne lésinent pas sur les moyens, en s’offrant des balades en jet ski, des sorties en bateau et pédalo ou bien un sport nautique très prisé ces dernières années : la plongée sous-marine, «cela reste cher mais que voulez-vous on ne profite de ça qu’une fois par an, quant à nos enfants ils jouent sur la plage en construisant des châteaux, c’est leur passe-temps favori», nous confie Karim, un père de famille venu de Belgique. L’autre passe-temps des émigrés est le shopping, les boutiques d’habillement ne désemplissent presque pas, à la rue Didouche-Mourad on observe un véritable engouement pour cette tendance qui caractérise les grands comme les petits. A l’intérieur d’une boutique on accoste une maman accompagnée de sa fille qui se confie à nous avec une grande joie «vous savez, en Algérie ce n’est plus comme avant, maintenant on trouve de tout et à moindre coût, prenez par exemple ce jean, en France il vous coûtera les yeux de la tête alors qu’ici il ne dépasse pas les 2200 DA, sa fille semble toute excitée à l’idée de revêtir ces beaux vêtement», autre lieu autre conversation dans une grande boutique de bijoux fantaisies «chez nous, c’est rare qu’on se permette une virée dans une bijouterie, ici les bijoux ne coûtent pas vraiment chers il suffit de convertir à l’euro pour s’en rendre compte, nous quand on vient en Algérie, on repart souvent les mains pleines car la vie ici est vraiment à notre portée», nous dira cette dame le regard rivé sur les différents bijoux exposés dans les vitrines.

Entre quartiers pauvres et riches

Sous une température de 35°, les quartiers populaires d’Alger semblent désertés par la population, le sport étant leur loisir favori, les jeunes des cités populaires attendent 18h pour sortir de leur coquille et pouvoir jouer au balon. Aux alentours des immeubles les tables de billard et de baby-foot installées font le bonheur des jeunes gens. Des tournois de football interquartiers sont organisés par l’association «Ouled El Houma» : Dans les cités les petits stades construits par l’APC ne désemplissent pas, «notre quotidien est ainsi fait, le matin on se réfugie dans les salles de sport, le soir on organise des matchs de foot, quant aux week-ends on se rend à la plage», nous dira un jeune homme. La nuit tombée, les jeunes et les vieux se rassemblent au bas des immeubles pour discuter de leur sujet favori, le football. Tantôt USMA tantôt CRB. Les grands boulevards sont archicombles et la banlieue algéroise particulièrement la côte est très fréquentées la nuit par le sexe masculin, la gent féminine quant à elle, elle reste cloîtrée entre les quatre murs de la maison, la société algérienne n’admettant guère de voir leur ombre une fois la nuit tombée. Mais le quartier tendance ces derniers temps à Alger est évidemment «Sidi Yahia». Une avenue très branchée ou la «jet set» algéroise se réunit autour d’une bière, les boutiques chics y poussent comme des champignons offrant aux visiteurs ainsi qu’aux riverains une multitude de choix. Le café, restaurant «Cappuccino» est l’endroit de rencontre de la jeunesse dorée algéroise surtout le vendredi ou dès 15h00, un grand monde se précipite pour trouver une place libre car souvent il affiche complet «Quand je suis au pays, c’est mon endroit préféré,on se retrouve ici pour siroter un café, ici on est loin du bruit du centre-ville, les jours de semaine aussi on est là, l’été on ne rentre à la maison qu’aux environs de 1h00 du matin», nous dira un Algérien vivant en Angleterre. Les boutiques d’habillement ainsi que les centres commerciaux sont pris d’assaut, des Polonais, des Français, des Tchèques s’approvisionnent ici. Trouver un stationnement est quasi impossible, quant aux prix affichés et contrairement aux idées reçues, ils sont à la portée de la classe moyenne. «Ici les mentalités ont évoluées, on traite tout le monde de la même façon, on reçoit des gens très importants et on fait tout pour les satisfaire surtout l’été». La nuit tombée, le Front de mer ainsi que la placette qui donne sur la plage d’El Kettani s’animent peu à peu, les familles sortent de chez eux pour respirer l’air frais, les vendeurs de glaces s’activent pour servir les clients, les hommes en bleu sont présents en force pour faire régner l’ordre et veiller à la sécurité des citoyens, ce quartier a repris vie après la décennie noire et offre aux visiteurs une multitude de choix entre plage, balade sur le Front de mer et restaurants, la vue est imprenable et la plage a subi un grand nettoyage et cette année, le Plan azur déployé par la direction de la Sûreté nationale permet aux vacanciers de passer de belles journées et réduit sur les grands boulevards les embouteillages. A la sortie d’Alger sur la plage «la Sablette», non autorisée à la baignade. Des jeunes âgés entre 12 et 18 ans y nagent sans se soucier des dangers que peut représenter leur acte, des policiers arrivent sur les lieux et ordonnent immédiatement aux jeunes gens de quitter les lieux. Autre fait insolite, des adolescents nagent à «oued El Harrach» ignorant les conséquences gravissimes de leur aventure.

Les plus aisés boudent Alger

Faute de Club des Pins ou Moretti, les Algérois se rabattent sur d’autres destinations, ainsi la côte algéroise fait face à un manque criant en matière d’infrastructures hotelières, complexes touristiques et clubs de vacances, cette situation a poussé les Algérois à quitter la capitale durant leurs vacances privilégiant la cote Est à l’image de Béjaïa, Boumerdes et Jijel. «Moi je préfère passer mes vacances en dehors du brouhaha et du stress de la capitale, chaque année je me rend en Tunisie, même si les prix sont chers je préfère changer d’air». Les plages algéroises sont mal exploitées. Hormis quelques hôtels balnéaires qu’on peut compter sur les doigts, il n’existe aucun complexe touristique, les investisseurs se font rares. La plage de Palm Beach qui dispose de plus d’opportunités pour construire des zones touristiques n’arrive toujours pas à se distinguer des autres plages de l’Algérois traînant une mauvaise réputation comme nous le dira ce père de famille rencontré sur le Font de mer «autrefois j’allais sur cette plage mais depuis, les choses ont changé, des voyous se sont autoproclamés propriétaires des espaces pubkics plage, parkings ils imposent leur diktat ajouté à cela les agressions verbales et physiques dont font l’objet les familles». Les plus aisés choisissent des destinations plus exotiques à l’étranger, d’autres le Maroc et la Tunisie pour le rapport qualité-prix. Tant que les plages algéroises feront face à la pollution et au manque d’infrastructures, ses habitants ainsi que les visiteurs la rejetterons toujours. Entre ceux qui boudent la capitale et ceux qui la choisissent pour y passer les vacances, Alger offre un visage de capitale non balnéaire contrairement à sa voisine Tunis qui exploite le moindre espace pour attirer les touristes, ces derniers sont quasi inexistants dans notre capitale. Ainsi Alger reste plus une ville où les affaires sont florissantes et où les pouvoirs publics ne font rien pour s’ouvrir au tourisme et attirer les vacanciers.

Hacéne Merbouti

Partager