Ils sont arrivés à 9h50 à bord d’une Peugeot-Partner immatriculée à Alger. Ils étaient quatre, selon certaines sources, cinq, selon d’autres, tous armés de kalachniovs. Ils font irruption dans le bureau de poste et demandent au receveur la clé du coffre-fort mais, fait extraordinaire, celui-ci refuse mordicus de s’exécuter. Encore plus extraordinaire : la bravade du receveur ne prête pas à conséquence. Plutôt que de l’exécuter, comme de bien, les assaillants ont une autre idée en tête : la plasticage du coffre-fort. Manque de pot, la charge explosive s’est avérée insuffisante. Tant pis, on se contentera des maigres sommes du guichet : une vingtaine de millions de centimes, selon toute vraisemblance. Ce maigre butin en poche, les assaillants prennent la route de Taghrast, un village situé en contrebas, pour enfin abandonner leur véhicule et couper, à travers les champs, pour revenir à hauteur du mémorial des martyrs. Là, ils s’emparent d’un camion pour enfin prendre la route de l’antenne TDA et s’enfoncer dans la forêt d’Akfadou.Alertés, les services de sécurité avaient déployé, sans succès, un dispositif d’interception. Chemini est une commune rurale des contreforts de l’Akfadou où une simple escouade de gardes communaux assure les missions de sécurité. La brigade de gendarmerie en avait été fermée des suites des événements du Printemps noir. Cet état de fait n’a pas, néanmoins, rassuré les terroristes. Ceux-ci auraient opéré avec une certaine fébrilité. Ils ont d’abord renoncé à casser le coffre-fort après la première tentative puis usé d’une manœuvre de diversion pour échapper à une éventuelle réaction des services de sécurité en abandonnant leur véhicule en contresens de la direction de fuite. Ce mode opératoire écarte, aux yeux des observateurs, l’hypothèse d’un gangstérisme ordinaire au profit de celle de la piste islamiste. Le hold-up de la poste de Chemini marque un retour à un phénomène en extinction. Les derniers hold-up remontent à la période qui avait précédé la grande opération de l’ANP qui avait abouti à l’élimination du chef du GSPC, Nabyl Sahraoui, dans les maquis de Bourbaâtache, le 19 juin 2004.Auparavant, une succession de hold-up a été enregistrée dans l’axe Sidi Aïch-El Kseur. Ces hold-up avaient notamment visé les stations Naftal et les banques. Dans la wilaya limitrophe de Tizi Ouzou, les hold-up se sont poursuivis sans intermède depuis l’année dernière. Le 15 mai passé, 175 millions de centimes avaient été emportés de la poste d’Aït Oumalou dans ce qui est le dernier acte en date du GSPC.Le répit observé dans la wilaya de Béjaïa depuis l’élimination de l’état-major du GSPC est ainsi rompu depuis hier. L’orientation “gangstériste” de l’action du GSPC est à rapprocher, selon des observateurs de la scène sécuritaire, de la perspective de l’amnistie générale énoncée par le président Bouteflika. Les derniers des Mohicans du GSPC font, autrement dit, leurs emplettes dans l’optique d’une réinsertion dans la vie civile.
M. Bessa