Le plus commun des citoyens des Ath Yedjer, sait désormais que pour trouver du pain, il faut se lever à 6 heures du matin et qu’à partir de 8h30-9heures les étagères des boulangeries sont tristement vides. Vendredi dernier, plus de cent personnes étaient amassés devant la boulangerie du centre, la plus ancienne de Bouzeguène, pour une hypothétique baguette. Des hommes de côté, des femmes et des enfants de l’autre, attendent la sortie du pain du four. Quelques instants après le boulanger ramène une cinquantaine de baguettes. Tout le monde sait qu’il n’y aura pas de pain pour tout le monde. Le boulanger décide alors de le rationner en ne donnant que trois baguettes pour chacun. Des cris fusèrent par-ci, des rires cachés par-là, des bousculades s’enclenchent et une bagarre a failli éclater entre un émigré qui a été piétiné et un jeune pour qui la chaîne n’existe pas. L’émigré qui n’en croyait ses yeux, a rebroussé chemin, jurant qu’il ne mangerait pas de pain de cette journée. C’est la triste réalité, aujourd’hui à Bouzeguène où les boulangers qui continuent encore d’acheter de la farine subventionnée comme tous les boulangers d’Algérie, n’arrivent pas à juguler cette tension qui, certes s’est accentuée avec l’arrivée des vacanciers, mais elle n’en reste pas moins chronique durant les douze mois de l’année. Pourtant, les habitants, bien qu’ils n’aient pas consenti à l’augmentation du pain décidée et appliquée par les boulangers de Bouzeguène depuis l’an dernier, continuent d’acheter le pain sans rechigner. Parfois les citoyens ne comprennent pas le véritable prix du pain puisque le boulanger se dissimulant derrière l’absence de monnaie, arrondie le prix des baguettes au plus haut. Certains citoyens, pour éviter d’âtre arnaqué davantage par le problème de monnaie, préfèrent acheter du pain en chiffre pair, c’est-à-dire, deux, quatre ou six baguettes, au lieu de trois, cinq ou sept baguettes. Le plus ridicule encore, c’est que ceux qui achètent une seule baguette se rendent compte qu’ils doivent payer le sachet à raison de 50 centimes (pièce qui n’existe pas) : 9,00 dinars le pain normal et 10,00 pour le pain amélioré. Alors qu’à Azazga, le pain est disponible toute la journée et sort du four même à vingt heures et au prix officiel, à Bouzeguène on continue encore de broyer du noir. Avis aux éventuels visiteurs étrangers de Bouzeguène : avant de venir, apportez avec vous du pain.
Kamel Ihaddadène