Ses nouveaux quartiers sont uniformes; des cubes en béton fades et sans vie. Blottis les uns contre les autres, ils offrent à l’œil un paysage lugubre et sans âme. Ses espaces verts ou ceux qui devraient l’être ont été grignotés par la rapacité des hommes puis détournés au fil du temps pour se transformer en béton et accueillir à leur tour des constructions mornes, semblables aux autres. Durant les années 80 plusieurs nouveaux lotissements ont vu le jour aux quatre coins de la ville de Bouira mais aussi à travers de nombreuses autres localités de la wilaya, le but étant de redynamiser la construction dans le cadre d’une politique globale de développement et de permettre par là même aux populations urbaines, en pleine explosion à l’époque, de s’oxygéner en accédant à un meilleur cadre de vie. Cette ouverture sur le plan urbanistique allait se faire néanmoins dans la confusion et le sillage d’une quasi-anarchie. Au manque de la main d’œuvre qualifiée ainsi que de la compétence dans le domaine technique et architectural s’ajoutait le non respect flagrant des normes et des règles en matière de construction. Dans la frénésie de l’époque, ni les clauses des cahiers de charges, dûment établis par les services compétents, ni même les plans d’aménagement urbain adoptés par les services de la commune pour mettre de l’ « ordre » dans la cité n’étaient épargnés par la bêtise humaine. Il faut rappeler à cet effet qu’en l’absence d’une loi les préservant, les PDAU (Plan de développement et d’aménagement urbain) étaient continuellement modifiés afin de favoriser le détournement des poches et des parcelles initialement réservées à la création d’espaces verts. Que ce soit à Ras-El-Bouira, un quartier périphérique de forte densité surplombant la ville ou à Hay-Ethaoura, deux quartiers importants du chef-lieu de la wilaya et ayant émergé durant la même période, les bâtisses et les immeubles ont été érigés dans la confusion et le désordre urbanistiques. A la faveur d’un manque de suivi des plus impénitents le citoyen ayant bénéficié d’un lot de terrain à bâtir ne se souciait guère du respect des articles contenus dans le cahier des charges et ne daignait nullement se conformer aux exigences de son plan de construction avalisé pourtant par les services techniques de la commune. Dans un climat d’impunité et face à une gestion peu enviée du foncier public, les gens ne reculaient devant rien pour ainsi dire et accaparaient des parcelles de terrains ou des poches devant servir à des espaces verts ou des aires de stationnement au su et au vu de tous. Cet état de faits s’est accentué au fil des ans et les autorités chargées de préserver l’environnement et de sauvegarder le cadre de vie des citoyens affichaient un laisser-aller complice. Aujourd’hui, on hérite d’une ville en mal d’oxygène et totalement enveloppée dans du béton. En bas des immeubles, les enfants, ces êtres innocents, jouent dans la gadoue à proximité des amas de détritus au détriment de leur santé pour la simple raison que l’espace qui leur était destiné a connu un autre sort. Leurs aînés n’ont pas pensé à eux, ni à leur bien-être et encore moins à l’environnement dans lequel ils évoluent.
S. Soumia
