Au lendemain d’une fin d’année épuisante, une nouvelle galère commence donc pour ces petits innocents qui s’apprêtent à une autre tâche pénible et de surcroît forcée et quotidienne. Beaucoup de ses enfants, filles ou garçons, cèdent leurs sacs et cartables pour un moment et les remplacent par des jerricans à la recherche d’eau qui fait défaut dans plusieurs quartiers et villages de cette municipalité. Au quartier Aguemoun par exemple, constitué de bâtiments qui ont vécu presque tout l’été avec des robinets à sec, la besogne confiée aux petits commence très tôt le matin pour avoir la chance de remplir ses contenants en plastiques d’une fontaine de fortune alimentée par un trop plein d’un château d’eau situé sur une colline de ce quartier.
Ce petit point d’eau maigre mais nécessaire est assiégé chaque matin, et en file indienne les petits désignés à cette corvée matinale, même somnolents, s’adonnent à grande joie à faire le plein des bidons dans un brouhaha d’ambiance malgré la pénibilité de ce travail à faire monter ces bidons aux différents étages de leur immeubles. Appelés à accomplir ce service au rythme des jours, cette corvée semble devenir un loisir à défaut de moyens de détente. Ils sont rares ici ceux qui partent en colonies, et la plage se trouvant à une quarantaine de kilomètres est souvent méconnue par plusieurs de ces enfants. Ouarda a comme binôme son frère Aïmed pour se partager le “job”. Ces deux inséparables acheminent chaque matin des dizaines de jerricans à l’aide d’une remorque qu’ils tirent à force de bras. “Nous n’avons pas le choix, nous sommes les plus jeunes de la famille et nous sommes “réservés à apporter de l’eau” ; quant aux vacances, nous n’y pensons même pas”. Le sens des vacances est méconnu chez ces deux transporteurs d’eau, comme chez les autres qui s’occupent d’une même besogne surtout durant l’été. Houssam, Imane, Amel, Karim et d’autres font partis de ces enfants de Barbacha appelés à consacrer leurs vacances à la recherche du liquide vital rarissime.
Tout les moyens sont utilisés : tantôt à l’aide de brouette, tantôt sur dos d’ânes ou carrément sur le dos et les épaules ; on y voit sur le même chemin de l’école des dizaines de bambins à l’assaut des forages privés dont les propriétaires ont ouvert les portes aux assoiffés de cette localité. Le décor est presque identique à Amarat, Bouncer, Aguemoun au centre du chef-lieu et même dans l’autres localités : les porteurs d’eau font parti de ces petites corpulences sans nulles vacances et sans répit. La rentrée scolaire entamée n’est pas pour autant le divorce total avec cette tâche forcée, mais les petits s’apprêtent à un double travail : la scolarité et l’eau à apporter quotidiennement du fait que la fin de la pénurie n’est pas pour demain. En dépit de ce fardeau, les élèves de Barbacha ont gagné le défi en enregistrant des résultats honorables à tous les paliers. Ils attendent le retour de l’ascenseur de la part des responsables qui sont appelés à améliorer les conditions de vie des citoyens pour ainsi épargner à ces petits innocents d’en subir les conséquences.
Nadir Touati
