Une dépendance qui remet en cause l’esprit des réformes économiques

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Il est vrai que le critère des IDE a été fort discuté en Algérie pour savoir s’il constitue une base logique de réflexion sur les vrais investissements porteurs de richesses et de possibilités de création d’emplois dans le pays. Cependant, ce signal demeure un sérieux critère en matière du degré d’attractivité pour les entreprises étrangères, donc du climat des affaires dans le pays.

Au cours de la conférence de presse tenue le 19 septembre dernier à l’issue des travaux du conseil national du RND, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a avoué que les ‘’IDE ne viennent pas en force’’, mais, précise-t-il,  » ceci ne signifie pas que la politique de l’Etat a échoué « . Une autre précision sortant de la bouche du Chef du gouvernement vaut son pesant de bonne analyse et invite à une réflexion profonde quant aux dangers de notre dépendance vis-à-vis du pétrole :  » S’il n’y avait pas l’embellie pétrolière, le Fonds monétaire international (FMI) nous aurait conduit à privatiser de force, non pas des entreprises industrielles, mais des secteurs comme la téléphonie, l’eau, l’électricité et le gaz, qui sont des machines à sous « .

A la fin de l’année dernière, deux signaux venus de deux autres institutions ont probablement valeur d’ ‘’avertissement’’.

Transparency International (TI) s’inquiète des ravages de la corruption et classe Algérie à la 99e place sur un panel de 180 pays.

La Banque mondiale, elle, met notre pays à la 125e place sur un ensemble de 178 pays étudiés sur le plan du climat des affaires.

Un rapport plus récent (septembre 2008) émanant de la même institution renvoie l’Algérie à la…132e place.

Il faut dire que la convergence de ces deux cotations (corruption et climat des affaires) n’est nullement le fait du hasard ; une infernale relation dialectique jette ses ponts entre les deux phénomènes : climat des affaires lourd, empêtré dans une légendaire bureaucratie et dissuadant les investissements, d’une part, et corruption à grande échelle ayant gangrené le corps de la société et miné la pyramide déjà vermoulue des principaux rouages de l’administration, d’autre part.

Cette faiblesse chronique des gros investissements en Algérie dément tous les discours d’ouverture sur le marché des investissements et traîne dans son sillage la symptomatologie d’une économie qui n’arrive pas encore à sortir des ornières de la rente où elle engluée depuis au moins trois décennies.

C’est Ahmed Ouyahia qui explique :  » Les structures de l’Etat n’ont jamais eu à gérer autant d’argent. Ceci a engendré du gaspillage, un comportement, je dirais, d’enfant gâté, en plus de l’existence de la corruption et de détournements, conjugués aux effets de la crise nationale que l’Algérie a subie, qui a fait que des groupes d’intérêts se sont renforcés et ont engrangés des gains illicites « .

Si des responsables, au rang de ministres, réfutent toute idée de retombée de la crise financière mondiale sur l’Algérie, Ahmed Ouyahia met de la nuance en soutenant que :  » Le système bancaire national, du fait de son retard, est relativement épargné. L’économie nationale cependant risque d’en pâtir à cause du ralentissement de la croissance mondiale engendré par cette crise, notamment la baisse de la demande sur le pétrole, dont les exportations constituant la quasi-totalité des ressources en devises de l’Algérie. L’Algérie fonctionne à un baril de 67 dollars. A 70 dollars, nous serions donc en danger. A 60, ça irait mal. A 50, ça irait très mal « .

Ainsi, les limites du ‘’miracle’’ pétrolier sont chaque jour mises en évidence. Après des ascensions successives qui ont fait monter le baril jusqu’à 140 dollars, l’or noir risque de revoir les bas-fonds d’une dangereuse dépression. Au cours de la semaine dernière, il est descendu au-dessous de 75 dollars. L’Algérie, dont l’économie tient jusqu’à présent d’une façon dominante à cette ressource d’exportation, touche du bois et cherche les meilleures voies qui la désembourberaient des ornières estampillées par cette énergie fossile.

Une relation ombilicale étouffante

Comme certains autres pays vivant presque exclusivement des exportations énergétiques, l’Algérie suit avec intérêt l’évolution du marché mondial du pétrole et du gaz. Bien que le processus de transaction entre Sonatrach et deux entreprises de gaz espagnoles portant sur les champs gaziers de Gassi Touil ait échoué-les raisons seraient commerciales mais teintées d’un petit ‘’mystère’’ politique-, les ambitions de notre pays dans ce domaine précis ne peuvent être démenties. Mieux, notre historique entreprise nationale des hydrocarbures ambitionne de distribuer elle-même du gaz dans certains foyers européens à des échéances très rapprochées.

En tout cas, la relation ombilicale entre l’économie algérienne et la ressource pétrolière ne cesse de s’affermir un peu plus chaque jour malgré la volonté affichée par les autorités politiques de s’affranchir progressivement de la rente pétrolière au profit d’une diversification des exportations, seule à même de garantir un minimum de stabilité et d’équilibre dans un contexte économique mondial de plus en plus aléatoire.

Pour les pays producteurs de pétrole, la dépendance est établie particulièrement après les années 1970. Il est maintenant reconnu que la mono-exportation a joué de mauvais tours pour les nations qui ont géré leur ressource comme une rente éternelle. L’exemple de l’Algérie est peut-être le mieux indiqué pour illustrer cette situation. Ayant abandonné sa première vocation qui était l’agriculture, notre pays est vite tombé dans la facilité de l’importation des produits alimentaires et des biens d’équipement. Pis, nos gouvernants ont soutenu les prix des produits importés jusqu’à vendre à perte. Cette politique démagogique a coûté cher au pays et a compromis ces chances de relancer les autres secteurs de l’économie. Dans ce sens, la dépendance vis-à-vis des hydrocarbures est presque totale. Il s’en est suivi une fragilisation générale de l’économie dont le cœur bat au rythme du prix du pétrole sur les places mondiales.

Un nouveau ‘’prix-étalon’’ pour le calcul du budget

Le gouvernement algérien a montré une constance remarquable au cours de ces dernières années quant au calcul des recettes budgétaires censées couvrir les dépenses de l’État. Au cours de son examen par le gouvernement, l’avant-projet de la nouvelle loi de finances complémentaire pour l’année 2008 prévoit, dans son chapitre ‘’recettes’’, un prix de référence du baril de pétrole à 37 dollars. En faisant passer la base de calcul des recettes de l’Etat de 19 à 37 dollars le baril, les autorités ont certainement pris des risques au vu des fortes fluctuations que connaît le marché du pétrole. Elles gardent en mémoire l’historique dépression du prix du baril (entre 9 et 10 dollars) au milieu des années 1990 lorsque le pays était sous la double pression terroriste et ‘’FMI-iste’’. Chat échaudé craint l’eau froide.

L’ancien ministre des Finances, Mourad Medelci, projetait en 2006 que le prix de référence de 19 dollars le baril allait durer au moins jusqu’à 2009, c’est-à-dire à l’échéance du bouclage du Plan de soutien à la croissance économique lancé par le président Bouteflika.  » Aucune somme ne sera soustraite au contrôle, parce que la différence entre les 19 dollars de base et les ressources financières enregistrées est versée au Fonds de régulation des recettes et est soumise à une loi qui en fixe l’usage « . Cependant, les besoins incompressibles générés par l’augmentation des salaires de la Fonction publique, la revalorisation des régimes de retraite et les transferts sociaux colossaux liés au soutien des prix de beaucoup de produits alimentaires, ont remis en cause cette vision austère pour faire porter le prix-référence à 37 dollars le baril. Dans la foulée de ses explications, M.Medelci révèlera que le montant consacré aux projets de développement programmés entre 2005 et 2010 est de 150 milliards de dollars. Ce montant est, d’après le ministre, susceptible d’induire une relative inflation. Ce qui se confirmera plus tard avec un taux de 4,3 % d’inflation.  » Nous voulons maîtriser l’offre et le Fonds de régulation des recettes, et garder une partie des liquidités de ce Fonds. Les réserves y demeureront toujours sans qu’il y ait un quelconque gel. Il est prévu d’autres projets à financer « .

Les procédures des paiements anticipés de la dette extérieure publique enclenchées depuis 2003, ont abouti à l’effacement presque total de celle-ci.  » Les disponibilités en argent liquide et les rentrées financières en devises ont avantageusement contribué à prendre une telle décision. La dette restante, à savoir 4 milliards de dollars, représente à peine 4% du PIB et elle est due aux financement de projets pilotés par des entreprises publiques ou privées. D’autres dispositions seront prises prochainement pour l’allégement de la dette publique interne et pour l’assainissement des entreprises publiques par le dispositif bancaire. Le Fonds de régulation des recettes, doté de plus de 3000 milliards de dinars permet de faire face à la dette publique interne « . En 2008, la dette extérieure, d’après Karim Djoudi, ministre des Finances, est réduite à 0,6 milliard de dollars. Quant à la gestion des réserves de change, évaluées, en janvier 2007, à 80 milliards de dollars (133 milliards à fin juin 2008), l’ancien ministre des Finances affirmait qu’elle relève de la Banque d’Algérie et que l’utilisation de cet argent se fonde sur l’assurance de garanties et de rentabilité. Il ajoute aussi que les accords sur la reconversion d’une partie de la dette contractée avec l’Espagne, l’Italie et la France sont devenus caducs du fait du payement anticipé des montants de cette dette.

Quant à la possibilité de verser une partie des réserves de change dans des fonds souverains, comme le suggèrent certains économistes et des responsables, le président de la République a été catégorique quant au refus de cette option. En recevant le ministre des Finances cette semaine, il déclarera :  » Certains nous suggèrent de nous lancer dans l’aventure d’un fonds souverain pour rentabiliser davantage nos réserves de change à l’étranger. J’estime que le pays continue d’avoir un énorme besoin de capitaux pour le développement de l’économie nationale, qui ne plaide pas actuellement pour ce choix « .

Fuite déguisée de capitaux

L’ensemble des médias ont relevé les appréhensions et les observations du président de la République relatives à la politique nationale d’investissement telle qu’elle est menée jusqu’à présent par le gouvernement. Ces observations ont été exprimées publiquement, face aux maires réunis le mois dernier. Quelques semaines après, une mesure- insinuée par Bouteflika dans le sillage de la nouvelle conception de l’investissement étranger en Algérie- a été prise par le Chef du gouvernement ; elle concerne l’établissement d’une taxe qui grèvera les dividendes réalisés par les entreprises étrangères exerçant en Algérie. Les transferts d’argent- exonérés de toute imposition- effectués par ces entreprises vers leurs pays d’origine vient d’être qualifié, bien tardivement, de ‘’fuite de capitaux’’. Des analystes ont, depuis quelques années déjà, tiré la sonnette d’alarme quant à cette fuite considérable de capitaux qui pénalise l’Algérie. C’est l’Assemblée nationale populaire qui prendra en charge la promulgation de cette mesure dans le cadre du projet de loi de Finances 2009 qui sera débattu après l’Aïd El Fitr par les députés. L’article de la loi de Finances considérera les bénéfices transférables des succursales et autres installations aux sociétés-mères établies à l’étranger comme dividendes qui seront soumis à une taxe de 15 %. Les sociétés étrangères exerçant en Algérie sont censées, d’après la nouvelle loi, créer une filiale ou une succursale, ou bien une autre entité professionnelle au sens fiscal.

Une nouvelle vision du secteur public

L’autre pendant de la politique nationale d’investissement est celle de la privatisation des entreprises publiques. Cette opération, un moment défendue becs et ongles par le ministre de la Participation et considérée comme source d’importantes finances permettant de soutenir l’investissement privé et de renforcer le Trésor public, paraît marquer quelque peu la pas. La remise en cause de la privatisation du CPA n’en est sans doute que la partie visible. En effet, lors de son déplacement à Tizi Ouzou au début de cette semaine pour visiter trois entreprises publiques importantes (Enel, Eniem et Enatb), lesquelles emploient quelque 4 000 travailleurs, le patron de l’UGTA, Abdelmadjid Sidi Saïd annonce publiquement que l’Etat renonce à la privatisation de 220 entreprises publiques. L’argument avancé par le cadre syndical est que la relance économique devrait avoir pour poutre maîtresse le secteur public.  » L’appareil public économique doit être préservé comme étant un élément de souveraineté et stabilité économique « , dira-t-il. La relance du secteur public s’inscrit, d’après Sidi Saïd, dans le cadre de la nouvelle stratégie qui  » vise à consolider la croissance hors hydrocarbures, sans laquelle notre survie deviendra aléatoire, notamment en cette conjoncture où les prix du pétrole viennent de passer au-dessous de la barre des 100 dollars. Pour cela, le secteur public est appelé à être le maillon fort et l’élément moteur de la politique de développement « , ajoutera-t-il. Après que l’UGTA eût approuvé toutes les décisions et orientations du gouvernement, y compris les plus libérales d’entre-elles comme la privatisations des entreprises publiques, on ne comprend le recentrage annoncé par Sidi Saïd que comme un nouveau deal avec l’Exécutif. Ce dernier a pris conscience des limites des investissements étrangers directs, créateurs de richesses et d’emplois, comme il s’est aussi rendu compte que la privatisation à tout-va ne constitue pas la panacée aux problèmes économiques du pays. La méthode du cas par cas devra ainsi imposer ses règles.

Si des faiblesses techniques et des lourdeurs administratives grèvent encore de leur poids l’acte d’investissement, il demeure cependant acquis que les orientations économiques établissant la nécessité de l’investissement privé, qu’il soit national ou étranger, ne relèvent plus de choix doctrinaux qu’il serait loisible de prendre ou de répudier en cours de route, mais répondent à une impérative nécessité de faire redémarrer la machine économique du pays sur des bases solides délestées de la mentalité rentière qui nous a valu bien des errements. Que cela se fasse simultanément avec un secteur public rénové et revigoré, ce n’est qu’un atout de plus. Cependant, les effets de l’ancienne mentalité ne cessent, jusqu’à présent, de brouiller, au sein de certaines structures décisionnelles, la vision et l’organisation de l’acte d’investir au point de faire subir à certains secteurs de l’économie des situations de dommageable surplace. Il est tout à fait vrai que les rentes de situation et la solidarité ‘’clanique’’ autour de certains intérêts ne peuvent être neutralisées du jour au lendemain. Mais une chose demeure certaine : la course effrénée vers la mondialisation et l’interdépendance des économies- tout en ayant leur revers de médaille- ne peuvent tolérer les replis et la navigation à vue qui caractérisent la gestion de certaines économies des pays du Sud. En auditionnant la semaine passée le ministre des Finances, le président de la République est revenu sur la nécessité d’identifier les investissements valables (productifs et sains) et de les encourager par tous les moyens.  » Nous devons encourager davantage les investissements productifs nouveaux, non pas ceux spéculatifs, mais ceux qui contribuent à la création de richesses véritables et qui participent à la création d’emplois. Le gouvernement doit donc trouver des solutions à cette question « , assénera-t-il. De même, dans le cadre de l’installation de nouvelles banques étrangères en Algérie, le président Bouteflika demande l’établissement d’un nouveau cahier de charge qui contraindrait ces établissements à certaines règles allant dans le sens de l’encouragement à l’investissement ; il s’agit de les  » obliger à réserver une partie de leur portefeuille au financement réel de l’investissement et non pas à se limiter à l’accompagnement du commerce extérieur ou à la promotions de crédits à la consommation. Nous sommes pour l’ouverture des banques étrangères et aux banques privées, mais dans le respect des normes universelles. Nous respecterons les normes internationales avec nos partenaires étrangers dans tous les domaines, mais nous attendons aussi de leur part le respect des intérêts de l’Algérie « .

Déphasage monétaire préjudiciable

Avec l’ascension en flèche des prix du baril au cours des trois dernières années, l’Algérie escompte des recettes qui avoisinent les 50 milliards de dollars/an. Une petite ombre au tableau cependant : la majorité des recettes du pays sont libellées en monnaie américaine alors que cette dernière est en net recul par rapport à l’euro, monnaie principale par laquelle sont réglés les achats (importations) de l’Algérie. Il est vrai que depuis deux semaine, un certain raffermissement du dollar a été constaté, d’où- cercle vicieux pour les pays exportateurs de pétrole-la chute du prix du pétrole. Le moins que l’on puisse dire à cet effet, est que l’Algérie se trouve fortement pénalisée par cette situation, laquelle si elle est appelée à perdurer risquerait de remettre en cause une partie des avantages issus des recettes des hydrocarbures.

En faisant jonction avec le renchérissement vertigineux de la monnaie européenne par rapport au dollar, l’envolée des prix du pétrole voit ses effets sur les économies des pays pétroliers, comme l’Algérie, doublement relativisés : d’abord par un déséquilibre de la balance des payements vu que la majorité de nos importations sont libellées en euros et que la plus grande partie de nos exportations le sont en dollars ; ensuite, par un effet complexe de l’interdépendance des économies ; un ralentissement de la croissance en Amérique, en Europe ou en Extrême-Orient induira inéluctablement une baisse de la croissance mondiale qui affectera, de facto, même les pays exportateurs de pétrole, lesquelles importent la presque totalité de leurs produits alimentaires, médicaments, équipements…etc. L’observation vient d’être donnée par l’Arabie Saoudite qui juge que la chute du prix de pétrole à environ 100 dollars est considérée comme une situation équilibrée pour tout le monde (exportateurs et acheteurs).

Au début de l’année 2007, les baisses enregistrées sur le marché de l’énergie fossile ont fait craindre aux autorités algériennes une chute libre qui remettrait en cause même le très raisonnable calcul de la loi de Finances sur la base de 19 dollars le baril. A chaque secousse importante sur le marché des hydrocarbures, l’Algérie ‘’touche du bois’’ et se souvient, comme d’un cauchemar, de la fragilité de son économie dépendant presque exclusivement du pétrole. Pour contrebalancer un tant soit peu cet état de fait, les autorités du pays misent sur les investissements hors hydrocarbures. Or, aucune stratégie n’avait préparé le terrain à des investissements massifs qui viendraient des nationaux ou des étrangers : la bureaucratie administrative, la rigidité des banques publiques, les écueils du foncier industriel et d’autres obstacles hérités de la mentalité rentière ont fortement tempéré les ardeurs de ceux qui tenté de défricher le terrain de l’investissement en Algérie. Seuls les infrastructures et équipements publics (routes, eau, électricité)-faisant partie des projets structurants-constituent pour le moment des éléments tangibles à même d’aider à asseoir une politique d’investissement hors du secteur des hydrocarbures. Sachant que le financement de tels ouvrages provient exclusivement du pétrole, le cercle vicieux risque de se fermer si, par malheur, la conjoncture des marchés mondiaux se détériorait fortement.

Le climat d’investissement réclame de profondes réformes

Le rapport 2009 Doing Business de la Banque mondiale portant sur le climat des affaires dans 181 pays étudiés situe notre pays dans la peu flatteuse 132e place. A titre de comparaison, l’Arabie Saoudite est positionnée 16e. Le rapport en question informe l’opinion que, entre juin 2007 et juin 2008, l’Algérie ‘’n’a enregistré aucune réforme majeure’’.

En matière de création d’entreprises, notre pays occupe la 141e place. Pour l’embauche des travailleurs, l’Algérie occupe la 118e place. Le reste des critères utilisés par la Banque mondiale ne donnent pas une bonne image du climat d’investissement et des affaires de notre pays. Pourtant, au niveau des orientations politiques officielles, des signaux forts et des mesures incitatives de façon à drainer plus efficacement et plus diligemment les investissements hors hydrocarbures, n’ont pas manqué. Dans les rangs de l’Assemblée populaire nationale, seuls quelques députés remettent en cause la politique nationale de privatisation ou la font accompagner de propositions sociales dissuasives. Les grands projets que le gouvernement a conçus depuis 1999 et dont le plus important est le Plan de soutien à la croissance économique (PSCE) étant des projets structurants, c’est-à-dire qu’ils sont censés servir, en tant que grandes infrastructures publiques, d’armatures susceptibles de drainer et recevoir les vraies investissements portés par les entreprises. Ces derniers, en tant qu’actes économiques généreront à leur tour les emplois et les plues-values sociales exigés de tout système économique. Cependant, dans une première phase, comme l’on si opportunément rappelé certaines institutions internationales, les lourds investissement publics déployés dans les ouvrages, les infrastructures et les équipements génèrent toujours un surcroît de consommation sans équivalent en production immédiate. Ce qui, nécessairement nous conduit à un phénomène inflationniste ne serait-ce que temporaire. Les derniers chiffres établis au début septembre par l’Office national des statistiques (ONS) confirment une reprise de l’inflation située à près de 4,3 %. Ses effets sont, en tout cas, bien ressentis depuis quelques mois par les populations algériennes dans leur vie de chaque jour.

Les pouvoirs publics se sont penchés sur l’identification des divers et nombreux blocages qui ont hypothéqué jusqu’ici les grands flux d’investissements que notre pays est en droit d’attendre dans une conjoncture exceptionnellement propice sur le plan des finances publiques et de l’équilibre des grands agrégats économiques. Le traitement des dossiers par l’ancienne APSI, devenue par la suite ANDI (Agence nationale du développement de l’investissement) ne semble pas donner tous les résultats escomptés. Et pour cause, le passage au crible de cette Agence des différents dossiers qui atterrissent sur son bureau se limitait à faire valoir les avantages (fiscaux, douaniers, taux d’intérêt des crédits,…) accordés par l’État aux candidats à l’investissement. De nombreux projets validés par cette institution qui travaille pour le compte de l’État n’ont pas pu voir le jour des années après leur validation en raison des lenteurs, entraves et dysfonctionnements qui caractérisent les autres institutions chargées d’encadrer l’investissement (banques, caisses de garantie, services de la wilaya pour ce qui a trait au foncier industriel,…).

Des entraves persistantes

Le président de la République a pu faire observer, au cours d’un Conseil des ministres en 2006 :  » les entraves résultant de la complexité de l’arsenal juridiques, des difficultés d’accès au foncier et de la rigidité du système bancaire étant identifiées comme principales contraintes que rencontrent les investisseurs potentiels et les entrepreneurs nationaux et étrangers « . Et c’est pourquoi le président a insisté pour libérer l’investissement en ‘’dégrippant’’ la machine bureaucratique qui se met au travers du cheminement normal des dossiers.

Au cours de l’interview accordée il y a quelques mois à l’agence de presse Reuters, Abdelaziz Bouteflika n’a pas omis, dans la série des thèmes qu’il a eu à développer, de revenir sur le phénomène de l’économie informelle qui ronge depuis des décennies le reste des autres activités relevant de l’économie structurée. Sans prétendre résoudre le problème d’un coup de baguette magique, il séria néanmoins un certain nombre de facteurs qui, par un système de synergie, sont appelés à concourir pour endiguer substantiellement ce phénomène. Ainsi, outre les mesures et réglementations destinées à lutter contre le blanchiment d’argent, la contrebande, la contrefaçon et la corruption, le président de la République mettra en exergue  » les réformes en cours qui ont permis une meilleure bancarisation de l’économie, la réduction de la pression fiscale, la libéralisation du commerce extérieur, la convertibilité commerciale de la monnaie nationale, la simplification des formalités douanières ». Ce sont des facteurs, assure Bouteflika,  » qui doivent concourir à l’assèchement des activités dans la sphère informelle « . En tout cas, avec le nombre de personnes qu’il emploie-environ un millions trois cent mille- et l’éventail des activités qu’il embrasse, le secteur de l’informel ne peut laisser indifférents ni les pouvoirs publics, ni les vrais acteurs de la vie économique légalement installés, ni les services des Impôts et Caisses sociales pour qui le manque à gagner se chiffre en centaines de milliards de dinars (évasion fiscale) ni, à plus forte raison, l’opposition politique et les monde syndical.

Amar Naït Messaoud

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