L’assistance, accusent-ils, est manipulée par le P/APC et ses partisans. Le wali s’est levé et a réagi promptement avant de lancer à l’adresse des délégués qui s’apprêtaient à quitter la salle : “Je travaille avec la population. Je suis venu ici pour me réunir avec les citoyens qui veulent travailler.” Les travaux de la réunion ont été suspendus pour reprendre quelques minutes plus tard après le retour dans la salle des délégués mécontents. De fait, le problème entre les partisans du P/APC et les délégués de Taourirt Ighil porte essentiellement sur le lieu où doit être implanté le siège de l’APC. Présentement, il est à Tizi El Korn et les contestataires demandent, depuis un certain temps, son transfert à Taourirt Ighil.
De là, la situation a pris une autre tournure pour laisser présager une ‘‘fitna’’ entre les désormais ‘‘frères ennemis’’ qui pourrait prendre effet à tout moment. D’ailleurs, durant la réunion d’avant-hier, les deux parties se sont adonnées à une guerre de mots pour faire valoir, à coups d’accusations ponctuelles et ciblées, leurs argumentaires devant le premier responsable de la wilaya.
Ainsi, les partisans de la délocalisation du chef-lieu communal de Tizi El Korn à Taourirt Ighil se sont appuyés en substance dans leur argumentaire sur les potentialités que recèle le lieu qu’ils indiquent.
Il dispose, soutiennent-ils, d’une assiette foncière conséquente qui pourrait servir à l’érection de nouvelles infrastructures. Il en va de même de sa situation géographique. Il est situé à quelques kilomètres seulement de la RN12.
Cela pourrait, estiment-ils, contribuer au développement de la commune, sinon la faire sortir de sa situation de marasme. Pour étayer davantage leur argumentaire, l’un des délégués a arboré devant l’assistance une copie du journal officiel de la république qui remonte à 1984 où il est explicitement mentionné, lit-il, “que le chef-lieu de la commune est Taourirt Ighil. Qu’est-ce qui empêche la mise en service du chef-lieu ? Pour nous c’est un déni de justice, une violation de la loi. Donnez-nous notre droit. La mise en service du chef-lieu a été bloquée, et ce depuis 24 ans. Pourtant elle est exécutoire « , explique-il au wali.
Une autre personne bondit de son coin et réplique à l’intervenant : « Le siège de l’APC restera à Tizi-El-Korn. Ceux qui revendiquent sa délocalisation ne font rien d’autres que barricader les routes. Je ne vois pas pour quelle raison veut-on le délocaliser, alors qu’il est là depuis 1958. »
Un autre intervenant, qui avait occupé le fauteuil de P/APC dans les années 190, a remis carrément en cause l’appellation du lieu. Selon lui, il n’y a même pas de lieu appelé Taourirt Ighil. Son nom, a-t-il indiqué, est ‘‘Irza’’.
La réponse ne va pas se faire trop attendre, une carte du sénatus-consult de 1887, sera mise en avant par un autre délégué de Taourirt-Ighil, là où l’appellation est confirmée.
Dans un autre document établi par les services de la commune, le POS en l’occurrence, l’intervenant a révélé que des villages entiers ont été rasés de la carte. Du coup, le ton enfle derechef faisant réagir l’un des présents en criant à gorge déployée : « vive l’APC. » Les délégués de Taourir-Ighil ont, tour à tour, mis leur maire à mal il a été, durant plus de deux heures, désigné en présence du wali, comme étant la personne à abattre, du moins à humilier. Ainsi, il a été qualifié par les uns et les autres de « responsable irresponsable » ou de gestionnaire « incompétent ». D’après eux, les responsables locaux instrumentalisent les citoyens pour satisfaire leurs desseins larvés. Ils ajoutent, comme pour enfoncer le clou, que ces derniers ne veulent pas le développement de la région. « On assiste impuissant à des détournements de projets à grande échelle » dira un intervenant, en faisant part au wali que le maire joue la carte du régionalisme et du favoritisme. C’est ainsi que les personnes exerçant, soit à l’APC, au parc communal ou les personnes travaillant dans le cadre du filet social sont toutes, selon un délégué de Taourirt Ighil, issues du village de l’actuelle maire, à savoir Tizi-El- Karn. L’intervenant s’appuyant sur une liste dans laquelle figure le nombre de postes octroyés et l’origine des personnes bénéficiaires des largesses de l’édile.
Le maire accusé de tous les maux
Dans cette veine, le wali a indiqué que les auteurs des détournements de projets au profit d’une région par rapport à une autre seront punis et l’administration est là pour veiller à leur répartition équitable. « Si l’on constatera une inégalité entre villages, l’administration va agir » a-t-il averti. Au cours de son intervention, le wali Ali Bedrici, a d’emblée fait savoir à l’assistance que les problèmes posés ne peuvent être réglés dans l’immédiat. « Je ne vous dirais pas que Taourirt-Ighil ne souffrira plus. Non ! Il faut dire la vérité aux citoyens, c’est une commune qui mérite un effort supplémentaire » a-t-il dit, en estimant que la population est animée d’une volonté que l’administration doit accompagner pour résoudre et aplanir les situations. « Les problèmes posés seront pris en charge » a-t-il promis en soutenant que la prise en charge des doléances doit se faire en associant toutes les parties et la conjugaison des efforts des uns et des autre. « Si tout un chacun se croit détenteur de la raison nous n’avancerons pas » a-t-il souligné. Tenant compte des déclarations des uns et des autres d’une part et estimant que la situation qui prévaut ces jours-ci à Taourirt Ighil pourrait dégénérer à tout moment d’autre part, le chef de la wilaya a mis en garde contre tout dérapage qui pourrait être l’œuvre d’éventuels ‘‘fauteurs de troubles’’ l’administration ne restera pas les bras croisés a-t-il averti. « J’ai entendu plus de quatre fois le mot irréparable, si quelqu’un le provoque il prendra l’entière responsabilité, et ce d’où qu’il vienne. La loi de la République s’appliquera et toute personne qui osera l’enfreindre en rendra compte devant les instances habilitées. » Il a ajouté qu’ “avec la violence et l’intimidation, on fait fausse route.”
S’agissant du problème de la délocalisation du siège de l’APC de Tizi El Karn à Taourirt Ighil, le wali a apporté à la connaissance des défenseurs du projet que la travail de la commission qu’il a lui même installée au lendemain des actions de rue organisées par les citoyens de Taourirt Ighil se penche toujours sur le problème. « Une fois le problème posé, nous avons installé une commission qui fait son travail. Nous veillerons à ce que cette commission travaille d’arrache-pied et ses résultats seront rendus publics d’ici la fin de l’année » a-t-il rappelé à ceux qui revendiquent la mise en service du siège du chef-lieu de l’APC de Taourirt Ighil, en reconnaissant au passage que le lieudit présente des avantages indéniables et des potentialités énormes. « C’est un site idéal pour implanter beaucoup d’infrastructures. Je l’estime comme étant un lieu d’avenir et un poumon économique pour la région » a-t-il déclaré, en faisant par ailleurs part aux citoyens de la région que l’administration s’attellera dans un futur proche à remettre en état les infrastructure endommagées de même que l’implantation de nouveaux équipements.
“Je ne reculerai pas d’un iota…”
De son côté, le P/APC de Taourirt Ighil, Ali Saâd, a reconnu lors de son intervention, que la commune enregistre certes un retard en termes de développement, mais qu’il s’attelle depuis son installation à prendre en charge les doléances des citoyens. « Vos préoccupations sont les nôtres et nous n’avons jamais tourné le dos par rapport aux préoccupations des citoyens » a-t-il dit avant de lancer à l’adresse de ses détracteurs : « Je ne reculerai pas d’un iota par rapport à mes prérogatives. » Selon lui, le village d’Ath-Yidir a bénéficié d’une enveloppe de 500 millions de centimes pour l’aménagement du territoire. “A Ath-Maâmar, a-t-il ajouté, il reste beaucoup à faire, notamment, cite-t-il à titre d’exemple, la réfection des conduites d’eau.” Le P/APW, s’est dit du côté des contestataires, en estimant que leur revendication est claire. “Le wali est là, a-t-il ajouté, en tant que gardien de la loi et les responsabilités des uns et des autres doivent être assumées, en dénonçant au passage le laxisme des pouvoirs publics quant à la prise en charge des doléances des populations de la région. « Il faut une mise à niveau de cette commune.
Il y a absence de prise en charge des préoccupations des citoyens », constate Hamid Ferhat. A signaler en outre que le wali de Béjaïa et la délégation qui l’accompagnait avaient marqué des haltes à Aguemoune, Ath Yidir, Ath Maâmar, Tizi El Korn et enfin Taourirt Ighil.
Les populations des cinq villages ont fait part au wali, comme s’ils voulaient mettre à profit son déplacement, de leurs doléances qui portent essentiellement sur le problème récurrent de l’alimentation en eau potable, du chômage endémique qui touche notamment les jeunes, du manque d’infrastructures sanitaires et de loisirs, non alimentation de leurs villages en gaz de ville et l’impraticabilité du réseau routier.
Dalil Saïche