Les vieilles images du jour

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L’épreuve de Ghaza, comme l’élection présidentielle à venir, décidément, rappellera à notre bon souvenir des images dont on aurait pu rire de bon cœur à l’ombre d’une nouvelle ère. Le problème est qu’on n’en rit pas parce que trop de choses à la fois nous en dissuadent : la réalité de notre quotidien, c’est malheureusement surtout ça. Au milieu des années 70, le journal télévisé de vingt heures avait diffusé cette information : une délégation de l’UNFA a quitté Alger pour participer à une rencontre internationale… Et pour l’illustration, trois… hommes et une femme avec des attachés-cases à l’aéroport. Question sans enjeu : qu’est ce qui différencie cette image qui date de plus de trente ans de celle diffusée hier d’un wali tremblotant, donnant lecture d’un hommage grossièrement dithyrambique au président de la république en énumérant ses réalisations alors qu’il était sollicité pour intervenir à la télé sur un secteur précis de développement, de celle citée avant ? Rien, autre (s) image (s) surréaliste (s) : alors que la fièvre de la « solidarité » est en train de tomber, Djamel Ould Abbes, le ministre de l’aumône bien ordonnée, ne semble pas vouloir s’arrêter de « faire le point » devant les caméras qui ne lui lâchent jamais les baskets sur les initiatives algériennes de solidarité avec les palestiniens. Il a fallu qu’arrivent les inondations meurtrières d’Adrar pour que M. Ould Abbès observe une halte et « parle d’autre chose », mais ça ne le change pas vraiment. Qu’il parle de Ghaza ou d’Adrar, le président de la république est toujours dans sa bouche. Il ne dit pas un mot bien sûr des organismes et associations qui le sollicitent pour se rendre à Ghaza et de la sélection très « désintéressée » à laquelle il les soumet, mais ceci est une autre histoire. Allez, une dernière image pour la route. Les élèves du lycée Oum El Massakine (ex-Sainte-Elisabeth) ont “décidé” de réunir leur argent de poche pour venir en aide aux enfants palestiniens. C’est très bien. L’élan de générosité est tellement spontané que la directrice de l’établissement, la présidente de l’association des parents d’élèves et sa trésorière ont convoqué la presse pour assister au versement, dans un moment grave et solennel, de vingt-six mille dinars dans le compte du Croissant-rouge algérien. Et de préciser que « ce sont les filles qui d’elles-mêmes ont décidé de cette action de solidarité avec leurs frères palestiniens. » Pour le discours des lycéennes, leur représentante manifestement briefée n’a pas été bien loin: « Les Américains aident les juifs, nous devons aider les musulmans. Les discours et les congrès ne servent à rien, il faut agir en commençant par boycotter les produits fabriqués par les lobbies israéliens. » Et c’est une enseignante qui boucle la boucle : « les filles pensent que les poèmes et les dessins ne servent à rien. » Elles « pensent » vraiment, les petites.

S.L.

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