Rap n’d prêche

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Vous connaissez Lotfi Double Kanon? Sûrement, c’est le rapeur algérien le plus populaire. Ce n’est peut-être pas mon genre, mais par la force des choses, il a fini par envahie mon univers par la grâce-ou la faute-de ma fille qui en raffole. Et pour tout vous avouer, j’ai fini, l’habitude de l’écouter malgré moi aidant, par le trouver sympathique. Sa hargne, sa prose contestataire dans un univers de brutes gagnées par la résignation, son succulent accent annabi bon chic bon genre et ce qui ne gâte rien un brin de talent prometteur sont venus à bout de mon scepticisme qui ne se laisse pourtant pas amadouer facilement. Lotfi Double Kanon fait quand même danser, rêver et pourquoi pas « bouger » de jeunes Algériens en crise de bonheur aiguë. Mais le jeune chanteur est aussi-surtout- un jeune Algérien. L’écoute en éveil, il ne pouvait pas « rester insensible » à la dernière folie nationale à laquelle son pays était invité: Ghaza.

La salle Atlas flambait dans ses nouveaux atours, Madame la ministre de la Culture était là et une pléiade d’artistes algériens, palestiniens, syriens et égyptiens étaient conviés à dire la rime, la mélodie et le discours mobilisateur pour la cause. On savait, depuis le début de l’horrible agression israélienne, que la « solidarité algérienne », menée par un Belkhadem déchaîné, était rangée contre toute logique derrière le Hamas. On savait que le chef du FLN a été très loin dans la surenchère et l’affront fait à une représentation palestinienne officielle et légitime à travers son ambassade. On savait l’usage qui a été honteusement fait de la tragédie palestinienne pour des enjeux de politique interne, mais on ne savait pas que l’ambassadeur palestinien allait boire le calice jusqu’à la lie. Entraîné dans un véritable guet-apens, il a eu le coup de grâce à l’Atlas rénovée.

 » L’armée de Mohamed, va revenir », « Dieu a son armée », « Les juifs doivent disparaître », « Les gouvernants palestiniens sont des traîtres », sont les perles sélectionnées de “la prestation du jour de Lotfi Double Kanon » qui a terminé son passage par de délirants « Allah Akbar ». Et dans une salle conditionnée, il n’y avait que son Excellence pour s’en émouvoir en compagnie de la légendaire actrice égyptienne Abdelhamid Firdaous qui pensait pourtant apporter un autre son de cloche que « la rue » de son pays.

Elle est l’une des rares stars égyptiennes à avoir résisté à l’islamisation rampante de « la maman du monde », qu’est- elle venue chercher à Alger? Ma fille, elle, a eu cette réplique qui se passe de tout commentaire “ça y est, même Lotfi s’y met!” Elle ne l’a pas dit, mais je l’ai lu dans ses yeux: c’est désespérant.

S.L.

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