“Pour une meilleure insertion sociale des jeunes”

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En sus des établissements scolaires et des centres de formation, les maisons de jeunes, appelées naguère les foyers d’activité de jeunes “FAJ”, offrent des opportunités d’intégration dans la vie active pour les jeunes qui n’avaient pas de chance de poursuivre leurs études ou de suivre des formations dans des centres spécialisés. Elles ont pour rôle, entre autres, la communication avec les jeunes, le soutien social, l’orientation, l’animation et la promotion.Pour en savoir davantage sur les objectifs assignés à ces établissements publics, Bahloul Lahlou, président de la maison de jeunes de M’chedallah a bien voulu répondre à nos questions.La Dépêche de Kabylie : D’abord, un mot sur l’historique de votre établissement ?M. B. Lahlou : L’histoire de la maison de jeunes de M’chedallah remonte à l’époque coloniale. Elle est connue sous le nom de FAJ. Son site se trouvait au centre-ville en contiguïté avec la poste. En 1969, les travaux de réalisation d’un nouveau siège au lieudit Zuramen ont été lancés. Deux ans après, en 1971, c’était son inauguration. Il (le siège) comporte 6 grandes salles et un logement de fonction. Depuis, ce lieu avait toujours ouvert ses portes aux jeunes de la région à longueur d’année, les jours fériés inclus. Plusieurs générations de jeunes se sont alors succédé et bon nombre d’entre-elles ont brillamment réussi leur carrière professionnelle. A l’époque, on assurait le rattrapage scolaire pour les élèves exclus, des cours d’alphabétisation, les cours du soir pour les tenants du certificat de fin d’études. Sur le plan culturel et animation, c’était une époque noire. Avec le peu de moyens dont ils disposaient, une pléiade de jeunes, tous des surdoués, avaient brillamment représenté et honoré la région, à plusieurs reprises, dans des festivités d’envergure nationale. On cite la troupe de danse folklorique animée par le défunt Amraoui Bouhou, Chekmane Daou, Bahloul Oulaïd et les autres qui ont pris part au premier festival international de la danse folklorique tenu à Tizi Ouzou en 1976. Une autre troupe de théâtre pour enfants a pris part, elle aussi, au festival national pour enfants à Constantine. En musique et en dessin, Aïmane Nacer (dessinateur), Berkane Omar, Boukrif Madjid, Menhoudj Mourad (chanteurs) avaient tous reçu leurs premiers cours d’initiation, ici, chez nous. Notons que de 1989 à 1995, suite à une convention interministérielle signée entre les deux ministères (Jeunesse et des Sports/ Formation Professionnelle), deux salles ont été dégagées pour assurer la formation de promotion d’aide-comptables. A l’époque, un seul centre de formation était opérationnel. C’était celui de Bechloul.

Qu’est-ce qui a changé depuis ?l Eh bien ! les choses ont évolué. Jusqu’en 1988, une seule association mère, créée en 1974, était d’activité. C’était l’Association des activités des jeunes (AAJ). Mais pour une meilleure prise en charge et une bonne orientation de cette masse de jeunes “exclus de partout” qui ne cessent de se réfugier chez nous, on a créé deux autres associations en 1989. Il s’agit de l’association des activités scientifiques : AAS “ITII” et l’association d’information AI “ITRI”.

En tant qu’organisme public, quelles, sont vos relations avec ces trois associations ?l D’abord, je tiens à vous informer que les maisons de jeunes ne bénéficient pas de budgets de fonctionnement de l’Etat. En ce moment on est trois cadres, je préfère plutôt éducateurs, sous la tutelle de la direction de la jeunesse et des sports de la wilaya de Bouira, à assurer le fonctionnement de cette maison. On dispose de six salles équipées d’un matériel approprié qu’on met à la disposition de ces différentes associations. Et comme vous le savez, une association agréée ouvre droit à une subvention de l’Etat. Disons que ces associations sont les piliers de ce site. Autre chose, elles sont tenues de respecter un planning annuel tracé par notre tutelle.

Brièvement, voulez-vous nous éclairer sur les tâches assumées par chaque AS ?l Commençons par l’AAJ, l’association mère. Elle s’occupe des volets culturel et loisirs (musique, arts traditionnels, couture, coiffure, peinture sur soie, photographie, etc.).Elle assure des cours d’initiation dans les disciplines sus-citées à des jeunes, filles et à des garçons exclus de l’école et auxquels on a refusé même l’accès dans des centres de formation, faute de niveau requis. Nous n’exigeons aucun niveau scolaire ni autre contrainte d’âge. Notre objectif est d’aider tous ces jeunes pour une meilleure insertion sociale, mais surtout leur faire éviter les réseaux dangereux telles que la drogue, la toxicomanie, la délinquance. Généralement, les plus intéressés réussissent à la fin de leurs parcours et arrivent à s’intégrer facilement dans la vie active. C’est le cas particulièrement pour ceux ou celles qui ont suivi des cours d’initiation en photographie. ils sont directement recrutés dans les différents studios-photos au niveau de la daïra. Pour le volet loisir, des tournois de volley-ball, jeux d’échecs, pétanque, billard, baby-foot, à chaque fête nationale ou religieuse.Pour l’AAS, trois clubs y activent : un club vert qui s’occupe de l’environnement, un club aquariophilie, et un club informatique qui est très fréquenté. En effet, les jeunes peuvent prendre des cours d’initiation en informatique et se distraire avec les jeux de réseaux à des prix symboliques. Là aussi, on peut citer l’exemple du jeune lycéen en l’occurrence, Allili Amar qui avait appris ses premières leçons en informatique, ici, et qui a pris part au concours international en informatique qui a eu lieu l’année dernière au Sultanat d’Oman.Enfin, l’Association d’information s’occupe de la collecte des différentes informations, et s’est organisée en banque de données où toute personne désorientée ou en difficulté peut s’y référer.

Des contraintes ?l C’est sûr ! Primo, on a un déficit en cadres. Deux éducateurs, qui sont censés travailler uniquement quatre heures par jour, ne peuvent pas gérer six salles de 10h du matin à 22 h, et ce, du samedi au vendredi, et à longueur d’année. Le second problème est relatif au fonctionnement, proprement dit, de ces associations. En effet, chacune d’elles doit présenter ses bilans moral et financier à chaque fin d’année, ce qui stipule, selon la nouvelle réglementation en vigueur la présence d’un huissier de justice et d’un commissaire aux comptes, qu’il faut bien sûr payer à chaque déplacement. Ce qui signifie des dépenses en plus pour ces associations, dont certaines ne peuvent pas les supporter. C’est le cas de l’Association d’information qui a malheureusement gelé ses activités depuis deux ans. Pour les mêmes raisons, l’AA n’avait pas perçu sa subvention l’année dernière.Enfin, un problème capital relatif aux conditions de travail. Nos locaux sont dépourvus de moyens de chauffage en cette rude période hivernale.A ce sujet, on apprend que vous avez procédé à l’installation du gaz de ville, et ce, grâce aux quêtes auprès des particuliers. Comment avez-vous eu cette idée ?l L’idée était l’œuvre des membres actifs au sein de nos associations. Ils voulaient prendre l’exemple des clubs sportifs dans ce domaine. En une semaine, on a pu récolter la somme requise, et on a immédiatement lancé les travaux de plomberie qui sont achevés actuellement. Il nous reste maintenant l’acquisition des moyens de chauffage. En attendant, on continue à travailler dans des conditions insupportables par moment. La tutelle nous a promis cette installation au courant de cette année. Mais cette dernière a jugé urgent plutôt de repeindre l’établissement, de refaire l’étanchéité et de procéder à certaines retouches après 30 ans de services. Pour atténuer les charges, on pratique la politique d’austérité. Comme vous voyez, on n’a pas de téléphone, l’utilisation des résistances électriques sont interdites, deux néons sur huit et un seul sur six, seulement sont allumés.

Pour terminer ?l Je tiens à remercier vivement tous ceux qui nous ont aidés à réaliser ce projet de chauffage, et ce, pour le bien-être de leurs enfants. Aux jeunes, je dirai que nos portes sont ouvertes au public, sans distinction, et chacun peut trouver les moyens et les guides qui vont l’aider à développer ses capacités et à l’orienter vers des horizons meilleurs.

Entretien réalisé par Farid A.

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