La grève des travailleurs de l’ETDE-Béjaïa perdure

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Depuis le 28 mars, les travailleurs de l’entreprise, dont onze sont en grève de la faim, ont mis au placard leurs outils de travail et s’emploient désormais à scruter l’horizon les bras levés au ciel implorant et attendant une salutaire intervention des pouvoirs publics pour prendre en charge leurs doléances. Que demandent-ils? Quatorze mois d’arriérés de salaires! Et pourquoi pas, insistent-ils, la reprise par l’Etat de leur entreprise ! C’est là que réside le salut de l’entreprise, pense-t-on. Voilà donc une revendication originale qui s’inscrit aux antipodes des règles rudimentaires de l’économie de marché et prend à contre-pied les préceptes basiques de l’OMC et autres FMI. Après avoir défendu mordicus l’optique de disposer de leur outil de travail en reprenant l’Entreprise qui était en proie, dit-on, à une imminente faillite, les travailleurs de l’entreprise des travaux et de distribution de l’énergie louent aujourd’hui les vertus de la gestion socialiste en sollicitant l’Etat de reprendre son bien et retourner à la case départ, autrement dit redevenir de simples smicards et donner les pleins pouvoirs à l’Etat pour, bien sûr, d’un côté éponger les dettes de l’entreprise et de l’autre, la maintenir comme au bon vieux temps sous perfusion, à l’instar de beaucoup d’autres entreprises publiques. C’est dire que les travailleurs de cette entreprise, aujourd’hui en grève illimitée, ont pris la décision la moins bonne en reprenant l’entreprise. Une décision, pourrait-on dire, irréfléchie qui sonne aujourd’hui comme un arrêt de mort qu’ils avaient signé autrefois sans se rendre compte, semble-t-il, au préalable de ses effets pernicieux à long terme. Et le résultat de ce qui s’apparente à un manque de prospective est là : aujourd’hui, ils ne peuvent même pas se prendre en charge, car les caisses de l’entreprise sont vides. Et contre toute attente, les travailleurs crient à qui veut les entendre qu’on les a “dupés”. Selon eux, si les pouvoirs publics avaient répondu par un “oui” à leur demande pour la reprise de l’entreprise, c’est parce qu’ils savaient pertinemment au moment des pourparlers que l’unité “était criblée de dettes”.

Au stade où en est la crise qui la secoue, une seule lucarne demeure entrouverte pour renverser la donne : assumer leur décision sinon endosser l’échec et élaborer une nouvelle stratégie à même de faire sortir leur entreprise de l’ornière !

C’est du reste ce que préconise le responsable de l’entreprise. “Les travailleurs qui sont devenus autonomes n’ont qu’à se débrouiller pour assurer leurs salaires et se prendre en charge sur tous les plans”, dit-il en faisant remarquer que le virage décisif qui a fait chavirer le destin des travailleurs a été négocié en 2005.

Cette année-là, selon le P-DG, un fournisseur les a poursuivis en justice pour “défaut de paiement d’un matériel d’une valeur de plus de sept millions de dinars qu’il a livré en 2003 et a eu gain de cause”. Et bonjour les soucis!

Ce dernier, poursuit-il, a immédiatement bloqué son compte bancaire et sa ligne de crédit induisant dans son sillage une véritable paralysie financière de l’entreprise et, partant, la crise qui secoue aujourd’hui l’entreprise au point que les 150 travailleurs n’ont que les allocations familiales pour subvenir aux besoins vitaux de leurs familles !

Il reste cependant que le responsable de l’entreprise s’engage solennellement à payer un mois de salaire aux travailleurs.

Ces derniers, répondent par un mot monosyllabique “non” et hurlent, car sentant leur honneur bafoué. “Nous voulons la totalité, soit quatorze mois de salaires impayés, sinon…”

A qui la faute, si le sein n’est plus en mesure de nourrir ?

Dalil S.

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