Une emprise tentaculaire qui ne semble épargner aucun secteur d’activité, dans une économie fragile et vulnérable à souhait et, par conséquent, inapte à s’immuniser contre la contagion.
Dans ce jeu de dupes, le consommateur, dernier maillon de la chaîne, campe le peu enviable rôle de dindon de la farce et fait figure d’éternelle victime.
Assertions et témoignages livrés par des experts, opérateurs économiques et citoyens réunis, tendent à accréditer la thèse selon laquelle l’écrasante majorité de la marchandise contrefaite est introduite frauduleusement, à partir de pays étrangers où sévissent les réseaux de faussaires dont l’irréfragalbe collusion avec les milieux maffieux ne fait que potentialiser cette pratique, rendant son contrôle des plus aléatoires.
«96 % des pièces de rechange automobiles sont contrefaites. L’imitation frise la perfection, à tel enseigne qu’il est pratiquement impossible pour le consommateur, fût-il le plus averti, de s’en rendre compte», nous explique un mécanicien d’Akbou, se voulant dubitatif quant à la capacité des pouvoirs publics d’extirper de l’économie le germe de la contrefaçon, avec des moyens aussi dérisoires et une mobilisation aux ras des pâquerettes. «Les contrefacteurs imitent de préférence les produits de grande marque. Les prix pratiqués défient toute concurrence», nous révèle un marchand de produits cosmétiques de la ville de Bgayet, qui confirme qu’il n’est pas évident même à un œil expert de distinguer les produits d’origine de ceux en toc.
Un autre revendeur de pièces de rechange nous relate le cas des vrais-faux pneumatiques dont la contrefaçon porte sur la sculpture de la bande de roulement.
L’illusion sème le doute dans l’esprit de l’acheteur qui n’arrive plus à faire le distinguo entre apparence et performance.
Les pneus touchés par ce mimétisme perdent en adhérence et en durabilité et exposent utilisateurs et usagers de la route en général à un danger certain.
Le plus souvent, les produits qui inondent notre marché ne portent aucune empreinte du fabricant, ce qui rend d’autant plus ardue la mise en évidence de leur traçabilité.
Autre exemple montrant en épingle la supercherie et son caractère délétère sur la santé du citoyen : les équipements sanitaires, notamment la robinetterie. Dans ce domaine, le matériau utilisé est généralement le laiton.
Les faussaires eux, se servent du Zamac, un matériau prohibé à cause de sa toxicité.
Un film de chrome en guise d’habillage confère du clinquant au produit fini. «Nos entreprises doivent apprendre à défendre leur outil de production en investissant dans la formation de contrôleurs», estime le gérant d’une SARL d’Ighzer-Amokrane, qui ne manque pas par ailleurs, de mettre l’index sur le flottement juridique et une réglementation tatillonne qui cadrent mal avec les enjeux économiques de l’heure. Dans pareil environnement perclus de pesanteurs de toutes natures, les contrefacteurs auront beau jeu de donner l’estocade à l’appareil économique et, l’absence d’une tradition aidant, à mettre en péril la sécurité du consommateur.
N. Maouche
