Crise et chuchotements autour d’une formation exsangue

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Des apparatchiks jusque-là parfaitement dévoués à la cause de Sadi découvrent brusquement l’enfer et s’en vont crier sur tous les toits ce que tout le monde savait déjà. Paradoxalement individualistes -un terme qui est l’exact contraire de « politiques » ils empruntent à la faconde peinée des éjectés de Koh-Lanta. En comparaison, la crise du MSP s’exprime plutôt sur un mode de réfutation solidaire et systémique de l’action d’Abou-djerra. Face à une survalorisation des destinées individuelles, c’est le plus souvent en arrière fond que l’opinion, quand elle n’est pas simplement indifférente, discerne les anomalies structurelles d’un parti, dont les accès de crise ne cessent d’affaiblir le dessein démocratique national. Le RCD semble ainsi pécher par son incapacité à joindre l’acte à la proclamation. Il ignore jusqu’au simple principe de séparation des pouvoirs. On apprend ainsi que la commission de discipline est désignée par Sadi lui-même et que celui-ci est statutairement érigé au rang d’instance jouissant de fait d’une forme d’immunité disciplinaire. Rarement la commission de discipline n’a eu à délibérer, ses clients choisissent la contumace convaincus par avance que l’acte d’accusation constitue un jugement en soi. Sur le plan de l’action publique, le parti semble s’engager dans des stratégies d’alcôves tellement sophistiquées que ses positions suscitent la méfiance de l’opinion et l’incompréhension de ses propres cadres. Ainsi en est-il de l’épisode du  » gel  » de ses activités lors du processus de présidentialisation-ter de Bouteflika. S’effacer en effet devant l’ascension d’un adversaire relève d’une finesse difficilement intelligible quoique celle-ci rappelle le boycottage tonitruant de la présidentielle de 1999 ponctuée par une entrée au gouvernement. L’épisode du drapeau noir a été ainsi interprété par Karim Tabou comme une perche tendue au pouvoir pour brouiller le mot d’ordre de boycottage de l’élection présidentielle par un artefact antipatriotique. Le FFS perçoit en le RCD une espèce de faux-cul du camp démocratique, un agent en service commandé qui doit redoubler d’ingéniosité pour conserver quelques apparences de vraisemblance. Le RCD mêle ainsi un verrouillage organique à une perception brouillée de son action publique. Tant et si bien que le parti aux allures d’EURL qui, dans un raffinement entrepreneurial, s’est même donné un logo stylisé, produit ce que les experts en Ressources humaines appellent un turn-over. Une effroyable dissipation de compétences fatalement mutilante. Mais la responsabilité de ceux qui, épisodiquement, crient à hue et à dia sur Sadi, est pleinement engagée. Les fidèles du leader relèvent que ceux-là n’ont aucunement objecté à l’instauration d’un diapositif statutaire scélérat. Ils se consolent de ce que ceux-ci qui stigmatisent l’inamovibilité du zaïm n’avaient pas voté contre sa reconduction au poste de président du parti. Saïd Sadi semble compter avec ces données en n’hésitant pas à soumettre le RCD à des saignées épisodiques. L’hypothèse de l’agrégation des dissidents autour d’une nouvelle organisation semble tout à fait scolaire. Les positions des exclus souffrent par-dessus-tout d’absence d’ancrage de principe car jamais la solidarité n’a prévalu quand c’était l’autre qui faisait les frais de la broyeuse RCD. Conséquemment, tous les illustres « ex-RCD », auront des destins politiques très individualisés malgré quelques attentes œcuméniques exprimées par l’opinion démocratique. Finalement, quels impacts auront ces dissidences sur la vie publique nationale ? A qui profite l’extinction tendancielle du RCD ? Sommes-nous à la veille d’une vaste recomposition du champ politique et notamment avec l’intention prêtée à Saïd Bouteflika de lancer un parti. Les chuchotements et les tentations spéculatrices ne manquent pas…

Mohamed Bessa

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