Son fils Mohand, encore sous le choc, à l’instar de toute la famille, nous déclare : “Si c’est cela le mérite qu’on a rendu à mon père, un homme qui a donné 40 ans de sa vie à la France ?!”. En effet, Ali Ziri, natif d’Ouled Rached, wilaya de Bouira, a émigré à l’âge de 19 ans en France. Il s’était installé à Argenteuil dans une très forte communauté kabyle (et) y vit depuis plusieurs décennies. Il a travaillé près de 40 ans dans une même société basée à Paris, habitué à se rendre régulièrement en Algérie où réside sa famille composée de deux filles et de deux garçons. Il était connu pour sa gentillesse et sa générosité ses compatriotes et jeunes du quartier, le surnommaient affectueusement “Ammi Ali”.
Le jour fatidique
Ammi Ali s’apprêtait à rentrer dans son pays le 15 juin, à 14h, pour assister au mariage de son fils aîné Rachid. Cependant, les choses ne vont pas toujours telles qu’on le souhaite ! En effet, le 9 juin, vers 20h 45, à Argenteuil, trois policiers dont une femme, ont arrêté un conducteur d’un véhicule, Arezki Kerfali, un Algérien de 61 ans au niveau du carrefour des boulevards Jeanne-d’Arc et Leon-Feix. L’homme, qui selon le rapport de la police était sous l’effet de l’alcool (0,80 g), était accompagné de son ami, Ali Ziri, 69 ans. Ce dernier était assis du côté passager. Pour motif de contrôle d’identité les trois policiers ont d’abord demandé au conducteur ses papiers. Mais celui-ci “a eu le tort de ne pas les sortir “assez vite” comme il lui a été demandé par conséquent, il s’en est suivi des menaces afin de l’emmener au poste, puis des insultes…” et enfin, “des menottes et des coups, une fois que le conducteur a été arraché de force de son siège!” Tandis que son ami, Ali Ziri, était jusqu’à cet instant assis gentiment sur le siège avant du véhicule, et voyant son ami, Arezki, “se faire traîner parterre et se faire insulter de tous les noms», il descend du véhicule pour calmer les policiers. “Laissez-le tranquille, vous n’avez pas le droit de le frapper et de le traîner par terre. Je connais la loi», dira Ali aux policiers. Pis encore, les policiers se saisirent de lui et le menottèrent à son tour ! Les deux individus sont alors “traînés et poussés avec violence” à l’intérieur du fourgon policier. Malheureusement, “c’est ici (au fourgon) que le drame ayant traîné la mort du retraité Ali Ziri, s’est apparemment produit”. Selon son ami, Arezki le défunt Ali avait dit aux policiers : “Vous n’avez pas honte de me frapper, je suis plus âgé que vous. Je connais la loi, je vais vous le faire payr.” Comme pour achever leur sale besonge, deux des trois policiers, dont la femme, le rouent de coups de poings et de pieds jusqu’à ce qu’il s’évanouisse. A chaque coup, les policiers rajoutaient à l’adresse du défunt : “Tu connais la loi salle bougnoule, tiens ceci, etc.” Après quoi, transporté à l’hôpital d’Argenteuil pour subir une prise de sang, c’était trop tard ! Les médecins ont constaté que Ammi Ali était “déjà mort”.
Mis en garde à vue, Arezki n’apprendra le décès de son ami que le 11 juin par la police du commissariat d’Argenteuil. “Mon ami se portait bien, c’est vous qui l’avez tué” leur a répondu Arezki. A l’initiative du syndicat de défense des Algériens en Europe, une réunion s’est tenue le 14 juin au foyer Sonacotra, les Remparts (rue Karl Marx à Argenteuil) où résidait le défunt. Sous le choc encore, les 300 habitants de cet établissement ont condamné avec force “la violence raciste utilisée par les policiers à l’encontre d’une personne âgée, dont le seul tort est de s’appeler Ali”. Les participants ont demandé à ce que toute la lumière soit faite pour élucider les circonstances du drame. A cela, une délégation, formée des proches de la victime et des résidants du foyers des Remparts devait “être reçue incessamment” par le maire d’Argenteuil. Egalement, une marche pacifique pour réclamer la vérité sur ce drame doit avoir lieu dans la même ville.
Quant à sa famille en Algérie, elle ne comprend pas cette haine gratuite et demeure toujours sous le choc. La population d’Ouled Rached, en attendant le rapatriement de la dépouille, ne compte pas en rester à ce stade de l’incompréhension et pourrait se montrer solidaire d’un des leurs en exigeant du gouvernement français des explications rationnelles si elles peuvent toutefois être fournies. Le corps du défunt se trouve actuellement à l’institut médico-légal de Paris pour les besoins de l’autopsie et des investigations sont menées par les enquêteurs. L’enterrement doit avoir lieu au courant de cette semaine.
L. M.